«Je suis passé à deux poils de la mort. J'ai été chanceux. Très chanceux!» Le conducteur Benoît Robert raconte sa chute de 50 mètres dans la carrière Maskimo à L'Épiphanie.

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Benoit Robert est un miraculé. L'expression est peut-être galvaudée, mais aucun autre mot ne décrit mieux l'homme de 47 ans qui a survécu hier à une chute d'une cinquantaine de mètres alors qu'il se trouvait dans sa pelle mécanique à la carrière Maskimo.

Étendu sur sa civière à l'hôpital Le Gardeur, l'homme confie qu'il se sent bien. On lui a administré un peu de morphine pour l'aider à endurer des douleurs au dos et au thorax, et on lui a déjà retiré le carcan qu'il avait au cou.

La coupure qu'il a au menton n'est même pas liée à l'accident, mais plutôt à sa partie de hockey de dimanche dernier.

Sa femme, Isabelle Leblanc, est à ses côtés, euphorique et presque incrédule de retrouver son homme en un seul morceau. Leurs deux fils de 16 et 17 ans ne sont pas encore passés le voir. Benoit Robert dit avoir vécu assez d'émotions pour aujourd'hui.

Ces émotions ont commencé subitement lorsque la terre s'est mise à tanguer sous sa pelle mécanique. «Je pensais avoir un problème de vision. Puis, le sol a cédé», raconte l'homme, encore dépassé par les évènements.

L'employé expérimenté, qui travaille à la carrière depuis 1995, a eu le réflexe de faire déplacer sur le côté sa pelle de 52 000 kg, en plein plongeon dans le vide. Un geste qui, de son propre aveu, lui a sauvé la vie. «J'ai pu ainsi sortir de ma cabine sans obstacle. L'affaissement continuait. J'aurais été enterré...»

L'employé s'est alors éloigné de son poids lourd en courant. Ses jambes dérapaient sur la glaise. Il a enfin trouvé refuge un peu plus loin sur un sol rocailleux. Il était sauvé.

Il a alors tenté d'apercevoir les camions à benne des deux autres victimes de l'accident, une femme qui travaille pour une autre entreprise qu'il ne connaît pas et Daniel Brisebois, qu'il côtoie depuis 25 ans. Croyant voir le camion renversé de la femme, il a crié: «Si tu m'entends, donne des coups!» Silence.

Il se souvient d'avoir entendu la voix de femme sur la radio émettrice au moment du drame: «Je suis en train de glisser. Je vais mourir», a-t-elle lancé.

Debout sur son tas de roches, Benoit Robert a dégainé son cellulaire pour appeler les secours. Il l'ignorait à ce moment, mais des images de la scène roulaient déjà en boucle en provenance de l'hélicoptère de TVA. Il a dû attendre encore un bon moment avant de voir celui de la Sûreté du Québec qui venait l'extirper de là. «Je grelottais. Ma conjointe ne répondait pas à son cellulaire, j'ai donc appelé ma belle-mère. Elle m'a dit: Benoit, je te vois à la télévision!»

Cette dernière a aussitôt averti sa fille, sans lui donner de détails pour ne pas la faire paniquer. «Je me suis présentée à l'hôpital. Quand j'ai parlé au patron de Benoit, il m'a dit: Il est un miraculé», laisse tomber Mme Leblanc, émue.

Le résidant de L'Épiphanie ne sait pas pourquoi la paroi de la carrière s'est écroulée. Rien de tel ne s'est jamais produit à cet endroit. Le dynamitage a peut-être fragilisé le sol, pense-t-il. Mais ce n'est pas le moment de se creuser la tête. L'homme est fatigué.

S'il s'estime chanceux, Benoit Robert pense très fort à ses deux compagnons d'infortune. Il remercie aussi les gens de la SQ de lui avoir porté secours de façon aussi spectaculaire en le hissant à bord d'un l'hélicoptère en vol stationnaire stabilisé à l'intérieur du cratère.