Tous les soirs, avant de se coucher, les détenus de la prison de Bordeaux roulent une serviette et la calent au bas de la porte de leur cellule pour empêcher la vermine d'y entrer.

«Au deuxième étage, on avait des souris. Mais au rez-de-chaussée, c'était des rats!», raconte Jimmy Dumaresq, qui vient de terminer une peine de cinq mois à Bordeaux.

Pendant des travaux de rénovation, l'été dernier, l'infestation de rats était telle que la direction a dû appeler un exterminateur à la rescousse.

«Les rats étaient énormes. Ça grouillait partout. Il y a des gros gars qui montaient sur leur lit et qui nous appelaient: "Garde! Garde! J'ai un rat dans ma cellule! Venez m'aider!"», raconte Philippe, un gardien de 30 ans de métier.

Aujourd'hui, les rats ont disparu, mais les souris sont toujours légion. Des détenus les nourrissent, leur fabriquent des cabanes. Récemment, un petit rongeur a élu domicile dans un grille-pain. «Il y en a qui trouvent ça drôle, les maudites souris, mais elles sont porteuses de maladies», dit Philippe en maugréant.

La prison de Bordeaux est sale, voire insalubre. Et la surpopulation ne fait rien pour arranger les choses. Soir après soir, des dizaines de détenus en surnombre sont trimballés d'une cellule à l'autre. Surnommés les «dodos», ils dorment sur un mince matelas - jamais le même - qu'ils étendent pour la nuit sur le sol d'une cellule déjà occupée.

«Les dodos prennent n'importe quel matelas. C'est sale. Ils se couchent la tête à côté des toilettes. Il y en a qui nous appellent: "Sortez-moi d'icitte!" Ça n'a pas de bon sens», dit Marc, un gardien.

Jimmy Dumaresq a déjà dormi à même le sol de béton pour ne pas avoir à s'allonger sur un matelas particulièrement crasseux. «Ils ne sont jamais lavés, ça sent vraiment fort. Certains sont infestés de punaises. Les gars attrapent des boutons. À l'infirmerie on leur donne des crèmes cheap qui ne règlent pas le problème.»

Mathieu, agent, confirme le problème des punaises, ajoutant que plusieurs cas de gale ont aussi été diagnostiqués, surtout dans l'aile C.

«C'est tellement vétuste qu'on n'arrive pas toujours à ouvrir les portes des cellules, équipées d'un vieux système à manivelle. Il faut appeler les responsables du bâtiment pour qu'ils nous aident», ajoute Mathieu. Il n'ose pas imaginer ce qui se passerait en cas d'incendie.

Selon Jimmy Dumaresq, le système d'aération du bâtiment centenaire aurait avantage à être rénové. «L'été dernier, il faisait chaud et on transpirait beaucoup. L'odeur était insupportable dans les secteurs surpeuplés.» Éric, un gardien, confirme: «La plupart des détenus fument et la qualité de l'air laisse plus qu'à désirer. Les bouches d'aération n'arrivent pas à fournir.»