Un ancien soldat québécois a tenté de convaincre un tribunal fédéral qu'il devait être considéré comme blessé en service parce qu'il aurait attrapé le VIH d'une prostituée alors qu'il était déployé en Afrique.

L'ex-soldat, homosexuel, blâme l'armée pour sa maladie : il a plaidé qu'il s'était senti obligé de recourir à ce type de services à deux reprises - malgré lui - pour faire taire les rumeurs qui circulaient dans les rangs à propos de son orientation sexuelle.

Les faits remontent au début des années 90. Jusqu'en 1992, les homosexuels étaient bannis de l'armée.

C'est «pour être plus accepté au sein des Forces armées qu'il a fréquenté des prostituées», a expliqué son avocat, Me Gaëtan D. Paquette, en entrevue avec La Presse. «Selon lui, c'était le seul moment» où la contamination a été possible, a-t-il continué.

Le vétéran a aussi fait valoir que «les condoms fournis par l'armée étaient de mauvaise qualité et que ceux-ci déchiraient facilement, ce qui a été le cas lors de ses fréquentations».

Le Tribunal des anciens combattants, chargé de réviser les décisions du Ministère du même nom, a rejeté la demande d'indemnisation de l'homme dans une décision datée du 11 décembre dernier.

«Le comité n'a pas de doute que l'orientation sexuelle du demandeur lui a occasionné des problèmes tout au long de son service militaire, surtout au Kenya», où il se trouvait en soutien aux troupes déployées en Somalie, ont écrit les deux membres du tribunal, Dana Kean et Mélanie Leduc. Toutefois, «il est impossible d'établir avec exactitude quand et/ou comment le demandeur a été infecté avec le VIH», ont-elles continué.

Déçu de la décision

L'avocat du vétéran a indiqué que son client, qui demeure anonyme, était déçu par la décision.

«C'est sûr qu'il n'est pas content», a affirmé Me Paquette. Mais «il y a une autre procédure après, il y a un appel possible. On va regarder ça ensemble».

L'homme était convaincu qu'il n'avait pas pu contracter le VIH ailleurs qu'au Kenya. «Les autres [relations sexuelles], c'était toujours protégé», a expliqué son avocat.

Selon le témoignage de son client, «il était pratique courante parmi ses collègues militaires de fréquenter des filles locales, qui étaient des prostituées».

«Comme il n'était pas marié, se rapprochait de la quarantaine et ne fréquentait pas des femmes, un de ses collègues a commencé à soupçonner qu'il était homosexuel», d'où, selon lui, la pression de fréquenter des prostituées.

L'homme a été diagnostiqué en l'an 2000. Il a expliqué au tribunal que le délai entre la découverte de son état et sa demande d'indemnisation était attribuable à des traitements médicaux affectant sa mémoire.