La Cour suprême du Canada a accepté jeudi d'entendre l'appel de Radio-Canada et de sa journaliste Marie-Maude Denis, qui veut protéger les sources de ses reportages sur l'ancien ministre libéral Marc-Yvan Côté.

«On est très satisfaits. Pour nous c'est une autre démonstration que le judiciaire prend à coeur ces questions de droit du public à l'information, a expliqué l'avocat de Radio-Canada, Me Christian Leblanc. Il faudra bien sûr que la cause soit entendue, mais c'est déjà une excellente nouvelle que la Cour suprême accepte de l'entendre.»

«Très heureuse de la décision de la cour Suprême. On continue notre combat pour la protection des sources journalistiques», a quant à elle réagi Mme Denis sur Twitter.

M. Côté et ses avocats veulent forcer la journaliste à identifier la ou les personnes qui lui ont coulé les informations derrière deux reportages, qui liaient l'ancien ministre à un système de collusion entre des élus et la firme Roche.

L'identité de la source est importante pour la thèse de M. Côté, qui cherche à faire avorter son procès. L'homme est accusé de complot, fraude et corruption avec Nathalie Normandeau et trois autres personnes.

Selon la thèse de M. Côté, un acteur important de l'Unité permanente anticorruption (UPAC) a coulé des informations à la journaliste pour faire mal au gouvernement libéral. Ces fuites orchestrées par l'État constituent une atteinte à l'intégrité du système judiciaire, selon la défense, qui justifie que le procès avorte.

En mars dernier, la Cour supérieure du Québec avait donné raison à M. Côté et forcé la journaliste à identifier ses sources.

En refusant aux avocats de Marc-Yvan Côté d'interroger Marie-Maude Denis, «on se trouverait à fermer les yeux sur une inconduite policière systémique qui (...) érode le système de justice et perpétue une injustice», écrivait le juge Jean-François Émond.

L'avocat de Radio-Canada estime que la jurisprudence protège les sources journalistiques sauf dans « quelques rares exceptions », comme des cas de crimes graves ou de sécurité nationale. Il avait donc décidé avec son client de porter l'affaire devant la Cour suprême.

Celle-ci a précisé jeudi « qu'un traitement accéléré » sera accordé à l'audition de l'appel. Le procès Côté-Normandeau devait commencer le 7 avril dernier. Mais la Cour du Québec a décidé de repousser le début des procédures tant que la question des sources journalistiques ne sera pas résolue.

Un journaliste qui refuserait de dévoiler ses sources en cour s'expose à un outrage au tribunal, passible d'une amende de 10 000 $ et d'un an de prison.