Une sexagénaire battue sauvagement pendant qu’elle jardinait devant chez elle. Une travailleuse du sexe étranglée avec un câble. Ces deux femmes ont été victimes d’agressions sexuelles extrêmement violentes aux mains de David Biwota, un prédateur qui pourrait être déclaré délinquant dangereux.

« Je suis très malade. Je suis schizophrène. Je prends des médicaments. Parfois, des choses dramatiques se produisent et je ne me souviens pas de ce qui s’est passé », a expliqué David Biwota en décembre dernier au palais de justice de Montréal. L’homme de 29 ans a plaidé coupable à trois chefs d’agression sexuelle causant des blessures, d’agression sexuelle grave et de séquestration.

Déjà déclaré non criminellement responsable pour cause de troubles mentaux dans des dossiers d’entrée par effraction et de possession d’arme, David Biwota était un homme libre en mai 2016 quand il a attaqué, vraisemblablement au hasard, sa première victime, alors qu’il marchait dans une rue de Montréal. Une agression terrifiante.

La femme de 63 ans jardine devant sa maison lorsque David Biwota lui demande son numéro de téléphone. Devant son refus, l’homme de 6 pi 2 po (1,88 m) suit la femme vers son garage et tente de l’embrasser sur la bouche.

Alors qu’elle le repousse, Biwota agrippe fermement la victime avec une prise de la tête par l’encolure. Elle est incapable de respirer ou de crier à l’aide.

David Biwota jette la femme au sol et se met à la frapper au visage. Il va même jusqu’à lui frapper le crâne contre le sol. Pendant ce temps, il touche les parties génitales de la victime. Avec l’énergie du désespoir, la femme empoigne une petite pelle et réussit à pousser l’accusé à prendre la fuite.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE

Le procureur de la Couronne Me Bruno Ménard, en 2020

La victime a dû être opérée pour une fracture cervicale, a expliqué à la cour le procureur de la Couronne MBruno Ménard. L’ampleur de ses séquelles n’a pas été précisée pendant l’audience. Notons que Biwota a été accusé seulement en mai 2021 pour ce crime passible de la prison à vie.

« Je suis très malade mentalement »

En avril 2020, David Biwota se rend chez une travailleuse du sexe après avoir fixé un rendez-vous pour obtenir des services sexuels. Le prédateur ne perd pas de temps : dès son entrée dans l’appartement, il retient la victime par les bras et l’étrangle avec un câble de type USB.

David Biwota transporte la femme dans la chambre et l’agresse sexuellement, tout en la frappant au visage. Il repart en prenant le téléphone de la victime.

À la suite de son arrestation, le Service de police de la Ville de Montréal avait lancé un appel au public pour trouver d’autres victimes potentielles de David Biwota, indiquant qu’il aurait pu agresser d’autres travailleuses du sexe.

Malgré ses antécédents en matière de santé mentale, David Biwota a été jugé apte à subir son procès. Les psychiatres ont également conclu qu’il était responsable de ses actes. Cependant, pendant qu’il plaidait coupable, l’accusé a plusieurs fois coupé la parole au juge pour évoquer ses problèmes de santé mentale.

« Je veux juste ajouter une chose, monsieur le juge. Je suis un patient en santé mentale. Je prends des médicaments tous les jours. Je suis très malade, je suis très malade mentalement », a-t-il déclaré en anglais. Il a également évoqué des problèmes touchant sa médication.

Dans ce contexte, le juge Alexandre St-Onge a bien pris soin de s’assurer que l’accusé plaidait coupable de façon éclairée. L’avocat de la défense MLouis Morena a également déconseillé à son client de lire une lettre dans laquelle il évoquait les agressions.

Délais « catastrophiques » à Pinel

Compte tenu de la gravité des crimes, le ministère public a demandé que David Biwota soit évalué afin de déterminer s’il devrait être déclaré délinquant à contrôler ou délinquant dangereux. Ces statuts permettent d’imposer une peine à durée indéterminée ou une surveillance serrée du délinquant pendant des années.

Le juge St-Onge a ordonné une période d’évaluation de 60 jours à l’Institut national de psychiatrie légale Philippe-Pinel. Or, il serait étonnant que l’Institut soit en mesure d’évaluer David Biwota pendant cette période.

Surchargé de demandes et confronté à une pénurie de psychiatres, l’établissement a été systématiquement incapable de respecter ce délai en 2022.

Les délais « catastrophiques » ont même poussé le juge Dennis Galiatsatos à refuser de prolonger la période d’évaluation de 60 jours dans le dossier d’un violent criminel en décembre dernier. Cet homme coupable d’avoir poignardé quelqu’un au visage n’a donc pas été déclaré délinquant dangereux.

« L’Institut Philippe-Pinel lance des cris d’alarme depuis plus de deux ans et l’État a choisi de ne pas réagir. […] Il est inacceptable que rien n’ait été fait », avait tonné le juge Galiatsatos. L’Institut a admis devant la cour qu’il faudrait trois ans pour respecter le délai légal.

Fin décembre, il s’en est fallu de peu qu’un influent pédophile international échappe à son tour à l’étiquette de délinquant dangereux pour la même raison.

Des délais au service des délinquants sexuels dangereux

Le juge Richard P. Daoust décidera mardi s’il accepte d’accorder à l’Institut national de psychiatrie légale Philippe-Pinel un nouveau délai de 45 jours pour évaluer la dangerosité du prédateur sexuel Gabriel-Karl Côté, qui a plaidé coupable, le 23 décembre 2021, aux accusations de production, de possession et d’accès à de la pornographie juvénile. Lors de son arrestation, il avait 483 photos et 66 vidéos de sa victime, en plus d’avoir eu accès à 160 photos supplémentaires. Le problème est que la poursuite en était à sa troisième demande de délais en sept mois, alors que la loi fixe à 60 jours le maximum pour une telle évaluation et que l’avocat de la défense, Nicolas Gagnon, s’y est vigoureusement opposé. Il a invoqué une décision rendue en décembre dernier par un juge de la Cour du Québec, à Montréal, qui a refusé de nouveaux délais pour un accusé que Pinel tardait à évaluer, faute de personnel.

Normand Boivin, Le Quotidien

Lisez l’article au complet sur le site du Quotidien