Son procès était unique dans les annales judiciaires québécoises : un homme ayant l’âge mental d’un enfant condamné à la prison à vie pour avoir tué sa conjointe dans un contexte de violence conjugale. Trois ans après ce verdict, Yves Nadeau aura droit à un nouveau procès, a annoncé vendredi la Cour d’appel du Québec.

Les motifs des juges Jacques J. Lévesque, Stephen W. Hamilton et Michel Beaupré seront déposés ultérieurement, indique le jugement de deux pages annulant la déclaration de culpabilité pour meurtre.

Yves Nadeau avait été reconnu coupable en février 2020 du meurtre non prémédité de sa conjointe Louise Girard, survenu en février 2014 à Montréal. La femme vulnérable avait été poignardée et étranglée. Le juge Mario Longpré avait condamné le tueur à la prison à vie sans possibilité de libération conditionnelle avant 11 ans et demi.

Ce verdict avait de quoi étonner compte tenu du profil particulier d’Yves Nadeau. L’homme de 64 ans présente en effet une déficience intellectuelle « modérée » et un QI aussi bas que 45, selon un expert. Son âge mental serait celui d’une personne âgée de 10 à 12 ans.

« C’est quelqu’un qu’on peut assimiler à un enfant de moins de 10 ans. Ça vous en dit pas mal ! […] Sa déficience intellectuelle saute aux yeux ! », avait plaidé son avocat MMartin Latour en 2020. Pendant le procès, Yves Nadeau semblait en effet avoir du mal à comprendre le concept de jurer sur la Bible.

Son témoignage au procès et son interrogatoire policier montraient un homme tenant des propos confus et s’exprimant dans un langage enfantin.

Néanmoins, le juge Longpré a déterminé qu’Yves Nadeau était « pleinement responsable » de ses gestes et que sa déficience intellectuelle n’avait pas contribué à son crime. Notons qu’Yves Nadeau a toujours nié avoir tué sa conjointe, répétant qu’elle était simplement « tombée ».

Scène « bizarre »

Le juge Longpré a conclu qu’Yves Nadeau a poignardé à deux reprises sa conjointe, Louise Girard, dans leur appartement insalubre de Hochelaga-Maisonneuve. Le tueur a ensuite maladroitement tenté de maquiller la scène de crime en lavant le couteau. C’était d’ailleurs le seul objet propre dans leur logement.

Dans son appel au 911 de six minutes, Yves Nadeau peine à comprendre les directives de l’employée. « Elle dort ! Elle a tombé ! Elle a tombé sur la tête », s’emporte-t-il. « Ma blonde n’est pas légère », lâche-t-il quand l’intervenante lui demande quelque chose.

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Les premiers secouristes ont découvert dans l’appartement une scène « bizarre » : une chaise avait été posée par-dessus le corps inanimé de la victime. Quand les ambulanciers ont sorti le corps, Yves Nadeau leur a lancé : « Sortez le frigidaire, tant qu’à y être ! »

« Nous serons prêts à recommencer le procès de M. Nadeau aussitôt que cela sera possible de le faire », a indiqué à La Presse son avocat MMartin Latour. Notons que l’accusé a été représenté en appel par MMaxime Hébert Lafontaine.

Yves Nadeau avait été libéré pendant les procédures d’appel en mai 2020.