Le Bloc québécois affirme que le ministre David Lametti n’a pas le choix de révéler combien de procès secrets ont eu lieu au Canada et de « tirer un trait » définitivement sur cette « justice parallèle » en condamnant ces pratiques une fois pour toutes.

Sur la base de documents obtenus grâce à la Loi sur l’accès à l’information, La Presse révélait mardi que le ministre de la Justice du Canada a eu des contacts étroits avec la patronne des procureurs de la Couronne fédérale au sujet d’un controversé procès criminel secret qui s’est tenu au Québec. Depuis le début de cette saga, lorsqu’on lui demandait s’il comptait intervenir, le bureau de M. Lametti disait pourtant que la Couronne « est une entité qui opère à distance et qui est indépendante ».

Dans la foulée de ses échanges avec la Couronne, M. Lametti a refusé de dire si d’autres procès secrets avaient eu lieu au Canada pendant son mandat. Il a aussi refusé de condamner la pratique, évoquant plutôt son « inquiétude » et se disant « préoccupé ».

« Faire preuve de transparence »

« M. Lametti refuse de confirmer si, oui ou non, il y a eu d’autres procès secrets depuis son arrivée en poste. Il n’a pas le choix : il est de son devoir de garantir le respect de la règle de droit et les dispositions de la Charte. Et la Charte ne prévoit aucun régime judiciaire parallèle pour quelque situation que ce soit. Le ministre doit donc faire preuve de transparence, tirer un trait sur cette pratique et nous dire si, oui ou non, il y a eu d’autres procès de ce type tenus ici », a réagi le député Rhéal Fortin, porte-parole du Bloc québécois en matière de justice.

PHOTO OLIVIER JEAN, ARCHIVES LA PRESSE

Le porte-parole du Bloc québécois en matière de justice, Rhéal Fortin

M. Fortin a aussi demandé au ministre de condamner cette pratique une fois pour toutes. Il a parlé d’une « justice parallèle » et de « méthodes du Far West », qui selon lui n’ont « aucunement leur place dans un État de droit fondé sur la transparence, où tous doivent être égaux devant la justice ».

« On peut comprendre qu’il y a certaines parties d’un procès tenues à l’écart des micros, ça peut être une question de sécurité pour les témoins, a reconnu M. Fortin. Mais de là à tenir un procès dans le secret, sans numéro de dossier, sans trace quelconque, on parle alors de justice parallèle. Nous ne sommes plus à l’époque du Far West ; ça prend des règles claires afin d’encadrer ces pratiques. »

Demandes à la Cour suprême

Le Procureur général du Québec s’est déjà adressé à la Cour suprême pour lui demander de faire la lumière sur cette affaire, qui a « suscité d’importants questionnements et inquiétudes dans la population québécoise et a porté atteinte à la confiance du public envers l’administration de la justice », selon lui.

Une coalition d’organisations journalistiques, incluant La Presse, a aussi demandé l’intervention du plus haut tribunal du pays. La Cour n’a pas encore dit si elle entendrait l’affaire.