Un des individus accusés d’avoir agressé Pietro Poletti chez lui en juin 2020 nie avoir voulu tuer l’ancien enquêteur du SPVM.

Cet individu, Yadley Deutz-St-Jean, et un présumé complice, Mitchaino Bruno, font face depuis lundi à leur procès pour voies de fait armées, voies de fait avec lésions, menaces de mort, séquestration et méfait. Deutz-St-Jean est également accusé de possession d’une arme à feu.

Mardi, Pietro Poletti a témoigné et raconté l’agression dont il avait été victime. Il a dit que lors de l’altercation, il a entendu un des suspects crier : « Tue-le ! »

Mercredi, le procureur de la poursuite, MPhilippe Vallières-Roland, a déposé une vidéo d’une minute tirée de l’interrogatoire de Deutz-St-Jean, mené dans la nuit ayant suivi son arrestation, le jour même de l’agression, le 12 juin 2020.

« Je te pose une question simple : est-ce que vous aviez l’intention de le tuer ? », demande un enquêteur du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) à Deutz-St-Jean, qui porte un masque médical et qui est couché sur une chaise, les yeux fermés.

Après un silence de quelques secondes, Deutz-St-Jean répond, un peu nonchalamment : « Je pense que les photos parlent d’elles-mêmes. Si on avait voulu le tuer, il serait mort. »

Lors de l’arrestation des quatre suspects, l’après-midi du jour de l’agression, les policiers ont notamment trouvé dans leur voiture un sac à bandoulière contenant une arme à feu.

Les expertises effectuées sur l’arme n’ont révélé la présence d’aucune empreinte ni de traces d’ADN.

Un des quatre suspects, celui qui conduisait la voiture, Louis-Simon Jacques, a témoigné contre ses deux anciens présumés complices mercredi et les a identifiés formellement.

Il a notamment déclaré que le sac à bandoulière contenant l’arme était resté dans l’auto pendant que les trois autres suspects agressaient M. Poletti.

Payé en crack et en essence

Louis-Simon Jacques a témoigné derrière un paravent, caché de la vue des accusés.

Il a raconté avoir connu Deutz-St-Jean en novembre 2019, alors que ce dernier lui fournissait du crack.

Un jour, Jacques s’est retrouvé à court d’argent et Deutz-St-Jean en a fait son chauffeur ; il le payait 120 $ par jour, une somme qui servait à payer sa drogue et l’essence pour le véhicule.

« Le matin du 12 juin 2020, vers 10 h, il m’a demandé de venir les chercher dans un logement du Plateau Mont-Royal. Ils m’ont ensuite demandé de me rendre à un endroit et le passager derrière moi [qu’il a identifié comme étant Bruno] me dirigeait avec l’aide du GPS de son téléphone », a décrit le témoin.

Une fois sur la rue Laplante, les passagers ont demandé à Jacques de se garer, d’ouvrir le coffre de sa voiture et de les attendre.

Les trois hommes sont sortis de la voiture et sont revenus au moins cinq minutes plus tard, en courant et en criant à Jacques de démarrer immédiatement.

Par la suite, le quatuor est retourné à l’appartement, où Bruno est descendu. Ils ont ensuite magasiné dans Montréal-Nord et ont filé vers Varennes, puis vers Saint-Jean-sur-Richelieu.

C’est en revenant près de Montréal, sur la route 116, qu’ils ont été repérés par des patrouilleurs du Service de police de l’agglomération de Longueuil et qu’ils ont été arrêtés.

« Aussi bien mourir »

Le témoin dit qu’il n’a rien su du crime commis alors qu’il attendait dans sa voiture, jusqu’à ce que les enquêteurs l’interrogent après son arrestation.

Lorsque MPhilippe Vallières-Roland lui a demandé ce qu’il savait sur ce crime, Louis-Simon Jacques est devenu très émotif.

Je suis mélangé. Je ne suis pas bien là-dedans. Vous voyez dans mon visage que ça ne va pas bien. J’ai chaud et je shake. Aussi bien mourir.

Louis-Simon Jacques lors de son témoignage contre ses deux anciens présumés complices

Louis-Simon Jacques a toutefois conservé son aplomb. Il a placé chacun des agresseurs sur chacune des banquettes de sa voiture.

Il a identifié ses anciens présumés complices sur des vidéos de caméras de surveillance. Un constable spécial a brièvement replié le paravent et le témoin a identifié Yadley Deutz-St-Jean et Mitchaino Bruno dans le box des accusés.

La clé : l’identification des accusés

En contre-interrogatoire, l’avocate de Deutz-St-Jean, MAlexie Galarneau, a fait valoir que Jacques avait encore les facultés affaiblies lors de son interrogatoire durant la nuit qui a suivi l’agression de M. Poletti, qu’il disait ne pas avoir dormi depuis six jours et qu’il prêtait parfois sa voiture. Elle l’a aussi questionné sur le sac à bandoulière qui contenait l’arme.

L’avocate de Bruno, MNoémie Tellier, a tenté de soulever des contradictions entre le témoignage de Jacques et des propos qu’il a tenus lors de son interrogatoire, relativement à l’identification de son client.

Louis-Simon Jacques a plaidé coupable à des accusations de voies de fait graves et d’introduction avec effraction et a été condamné à 32 mois d’emprisonnement. Il est actuellement en libération conditionnelle.

Le quatrième individu, Sandel Pierre, a plaidé coupable lui aussi, mais sa peine n’a pas encore été prononcée.

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