Quatre policiers de l’Unité permanente anticorruption (UPAC) font l’objet d’une enquête à la suite d’allégations d’actes criminels dans le cadre de l’arrêt du processus judiciaire contre l’ex-maire de Terrebonne Jean-Marc Robitaille, a annoncé jeudi le commissaire à la lutte anticorruption.

Le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI) a été mandaté par la ministre de la Sécurité publique, Geneviève Guilbault, pour enquêter sur des allégations d’actes criminels visant quatre policiers de l’UPAC dans le cadre de l’arrêt du processus judiciaire contre l’ex-maire de Terrebonne, détaille un communiqué du commissaire à la lutte anticorruption, Frédérick Gaudreau, publié jeudi.

Ces policiers, qui ont été affectés à des tâches administratives pour la durée de l’enquête, ne font pas l’objet pour l’instant d’accusations criminelles.

PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE

L’ex-maire de Terrebonne Jean-Marc Robitaille, au palais de justice de Saint-Jérôme, en octobre 2019

Rappelons qu’en octobre dernier, le tribunal a ordonné l’arrêt du processus judiciaire dans le procès de l’ex-maire de Terrebonne Jean-Marc Robitaille et de trois coaccusés, en raison de l’inconduite de membres de l’UPAC et des procureurs de la Couronne. Ceux-ci auraient caché aux accusés de l’information nuisant à la crédibilité d’un de leurs témoins importants. La raison : « ils voulaient gagner à tout prix », avait asséné la juge de la Cour du Québec Nancy McKenna.

Fait important : le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) a porté en appel la décision de la juge McKenna à peine un mois plus tard. « À la lumière d’une analyse préliminaire du jugement rendu […] les conclusions factuelles retenues par la juge de première instance McKenna ne nous apparaissent pas fondées sur la preuve présentée », avait déclaré à La Presse MPatricia Johnson, porte-parole adjointe du DPCP, peu après l’avortement du procès.

Jugement pris « très au sérieux »

Le jugement de la juge McKenna a été analysé par le commissaire à la lutte anticorruption, qui est allé plus loin en annonçant jeudi avoir transmis des allégations d’actes criminels concernant quatre policiers de l’UPAQ impliqués dans l’affaire à la ministre de la Sécurité publique, en vertu de la Loi sur la police. Mme Guilbault a ensuite mandaté le BEI pour mener l’enquête.

Frédérick Gaudreau a pris « très au sérieux dès le départ » le jugement de la juge Nancy McKenna, assure en entrevue Mathieu Galarneau, porte-parole de l’UPAC.

Deux membres de l’UPAC visés dans l’affaire, soit le numéro deux Sylvain Baillargeon et le lieutenant Janik Lacoursière, avaient déjà été affectés à des tâches administratives l’automne dernier. Deux autres enquêteurs sont aussi maintenant dans la ligne de mire et ont été retirés de leurs fonctions « le temps que l’enquête soit menée », soutient M. Galarneau.

Les accusations de corruption dans les affaires municipales et d’abus de confiance contre Jean-Marc Robitaille et trois autres hommes remontent à 2018, année où ils ont été arrêtés dans le cadre d’une enquête de l’UPAC baptisée Projet Médiator.

Selon la théorie de la Couronne, deux firmes d’ingénierie se partageaient les contrats publics à Terrebonne en vertu d’une « directive » du maire. M. Robitaille aurait mis en place entre 2000 et 2012 un « système de corruption » basé sur le partage de contrats et la remise de cadeaux aux hauts fonctionnaires, plaidait la poursuite. Il était question de pots-de-vin, de voyages, de séjours de pêche et de travaux de rénovation domiciliaire offerts aux bénéficiaires du système.

Rétablir la crédibilité de l’UPAC

« La raison pour laquelle on donne cette information-là [au public] aujourd’hui, explique M. Galarneau, c’est pour faire acte de transparence et montrer qu’on a des procédures et des politiques bien établies [à l’UPAC] lorsqu’on a des allégations qui peuvent toucher nos membres. »

De plus, depuis décembre, le juge à la retraite Robert Pidgeon a aussi été mandaté par le commissaire à la lutte anticorruption pour réaliser un examen externe du processus de traitement et de gestion d’une dénonciation à l’UPAC. « [Robert Pidgeon] a tous les pouvoirs et le temps nécessaires pour réaliser cet examen et nous soumettre des pistes d’amélioration, s’il le juge nécessaire », renchérit M. Galarneau.

Avec les informations de Vincent Larouche, La Presse