L’arrestation de trois entraîneurs sportifs soupçonnés de crimes de nature sexuelle, à l’école secondaire Saint-Laurent mercredi, démontre de nouveau toute l’importance d’implanter des mécanismes assurant des environnements sportifs « sains et sécuritaires », et ce, particulièrement auprès des élèves-athlètes, estiment deux intervenants qui travaillent auprès de jeunes sportifs et sondés par La Presse.

« Ce n’est pas la première fois qu’on vit des situations comme celle-là, et pour moi, ça réitère l’importance que les milieux – au-delà des vérifications usuelles d’antécédents judiciaires – doivent être outillés à sélectionner les bons entraîneurs. Les écoles doivent mettre en place des processus avec des suivis réguliers », affirme Fabrice Vil, directeur général de Pour 3 points, un organisme qui forme notamment des entraîneurs pour accompagner de jeunes athlètes en milieu défavorisé.

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« Choqué » par l’arrestation des trois entraîneurs, M. Vil affirme que le choix d’entraîneurs doit être nettement mieux balisé.

PHOTO PATRICK SANFAÇON, ARCHIVES LA PRESSE

Fabrice Vil, directeur général de Pour 3 points

Avoir de meilleurs mécanismes, ça ne va pas éliminer les abus. Il y en aura toujours, mais il y a clairement une question de réduction de risques à considérer.

Fabrice Vil, directeur général de Pour 3 points

Dans son Guide de sélection des entraîneurs, paru en 2019, l’organisme Pour 3 points fixe d’ailleurs des critères pour bien « choisir un entraîneur ». Parmi eux, on compte sa volonté d’apprendre, son ouverture à l’introspection, sa « croyance en la capacité de développement du joueur », sa persévérance et son aptitude à la collaboration.

À l’inverse, les critères défavorables à une sélection peuvent être « la fermeture ou l’indifférence d’un coach face à l’apprentissage », voire sa tendance à blâmer les autres ou à être sur la défensive, ou encore à mettre trop d’accent sur la recherche de résultats à tout prix, « par opposition au développement ».

« Ce qui est clair, c’est que les écoles peuvent être beaucoup mieux outillées. On doit entamer cette démarche », soutient Fabrice Vil, qui milite pour « transformer » les entraîneurs en « coachs de vie ».

De l’importance de porter plainte

Pour le directeur général et cofondateur de Sport’Aide, Sylvain Croteau, l’affaire illustre aussi toute l’importance de porter plainte lorsque survient une agression.

« Récemment, on fêtait justement le premier anniversaire de l’Officier indépendant aux plaintes, qui avait été mis sur pied en 2020 par le gouvernement. Cette entité-là existe, et peut traiter les plaintes de manière totalement confidentielle, en enquêtant sans passer par les organisations ou les fédérations sportives. À partir du moment où il reçoit une plainte, l’Officier peut investiguer », explique-t-il.

CAPTURE TIRÉE D’UNE VIDÉO DE LOISIRS ET SPORTS LANAUDIÈRE

Sylvain Croteau, directeur général et cofondateur de Sport’Aide

C’est ça, le message qu’il faut passer aujourd’hui. Si vous vivez des situations, parlez-en, demandez de l’aide, portez plainte.

Sylvain Croteau, directeur général et cofondateur de Sport’Aide

M. Croteau reconnaît toutefois que ce processus est souvent encore « très ardu ». « Malheureusement, une victime peut avoir envoyé jusqu’à sept signaux dans son entourage immédiat avant que quelqu’un l’écoute ou comprenne que quelque chose se passe. Le problème, c’est quand ça fait sept fois que tu le fais et que personne ne t’écoute, tu doutes encore plus », dénonce le DG.

Son organisme est justement « là pour aider les victimes » à porter plainte, si elles en ressentent le besoin, rappelle-t-il. « On peut vous accompagner là-dedans. On est là pour ça », lance-t-il, avant de conclure sur une note plus personnelle. « Moi-même, je suis le papa d’enfants qui font du sport. Et juste de penser que ça pourrait leur arriver, ça me bouleverse. On souhaite tellement juste qu’ils aient du plaisir, qu’ils développent des aptitudes. Si on peut aider, on va le faire. C’est notre travail, c’est notre mission. »