Attacher une adolescente pour la violer, publier les images intimes de ses victimes pour les « exposer », dénoncer celles-ci à la police : le cyberprédateur Alexandre Bossé avait recours à de sordides menaces pour arracher des photos et vidéos de nature sexuelle à des adolescentes de 13 à 16 ans.

« [Bossé] voudrait avoir une relation sexuelle avec elle. Il lui demande de venir à Montréal et lui explique vouloir l’attacher dans un lit, la rendre inconsciente et la violer. Il lui envoie plusieurs photos [d’elle-même] et lui dit que si elle le bloque, et ne répond pas à ses demandes, dont venir le voir, il l’exposera », indique le résumé présenté en cour lorsque le cyberprédateur de 21 ans a plaidé coupable à une vingtaine d’accusations pour des crimes de nature sexuelle.

Devant une menace aussi sérieuse, Vanessa*, 13 ans, obtempère et envoie au cyberprédateur une quinzaine de photos nue d’elle-même. Mais pour Alexandre Bossé, ces photos ne suffisent pas. Il exige alors que Vanessa se filme dans des positions très précises. Pour lui soutirer les vidéos, il crée un profil fictif d’une adolescente contenant des photos de sa proie. Si elle bloque le compte, « ça se passera mal », lui dit l’auteur du compte.

Ça fait alors déjà six mois que l’adolescente est prise au piège, à la merci de son bourreau virtuel. Comme pour les autres victimes, le cauchemar de Vanessa commence lorsqu’Alexandre Bossé prend contact avec elle sur Facebook, alors qu’ils ont des amis en commun.

Très vite, il envoie à Vanessa du contenu explicite de lui-même, puis réclame des photos d’elle nue. Si elle ne se plie pas à ses demandes, il menace de ternir sa réputation.

Ce modus operandi est de plus en plus fréquent chez les cyberprédateurs. Ceux-ci n’hésitent pas à employer la menace et l’extorsion pour arracher des images intimes à des enfants. Dans certains cas, des cyberprédateurs mettent leur menace à exécution en relayant les images intimes de la victime à leur entourage. Un phénomène exacerbé par la pandémie, alors qu’on observe une explosion des cas d’exploitation sexuelle en ligne.

Prises au piège

Une autre ado de 13 ans est tombée dans les griffes d’Alexandre Bossé en 2019. Au début de leur conversation, la victime accepte d’avoir une relation sexuelle avec son interlocuteur, mais l’adolescente fait avorter la rencontre à la dernière minute. L’homme de 19 ans se trouvait alors devant la résidence de la victime.

Pendant plus d’un mois, Alexandre Bossé réclame des photos à sa victime. Pour l’appâter, il lui assure qu’elle peut lui faire confiance. Elle cède finalement lorsque le cyberprédateur lui promet de lui acheter une vapoteuse. Mais après lui avoir envoyé une vingtaine de photos et de vidéos, l’adolescente refuse de continuer. Alexandre Bossé la menace alors de l’« exposer à ses amis Facebook et ses parents ».

Le cyberprédateur emploie aussi une autre menace récurrente : comme l’adolescente lui a envoyé des vidéos d’elle-même, elle risque d’avoir des « problèmes avec la police » pour avoir distribué de la pornographie juvénile, prétend-il.

Même modus operandi pour piéger Clara*, 16 ans. Alexandre Bossé lui envoie des photos de son pénis et lui réclame ensuite des photos d’elle nue. Devant sa réticence, le cyberprédateur la rassure en lui disant qu’il effacera les images aussitôt.

Le cycle des menaces s’amorce. Si Clara n’obtempère pas et appelle la police, le prédateur la prévient que « ça finira mal pour elle ».

Lorsque Clara s’exécute, Bossé en redemande aussitôt. Et quand l’adolescente tente de se sortir de son emprise, il menace d’exposer ses images intimes. Le cyberprédateur renchérit : il va venir « lui-même » s’en prendre à elle. Pour obtenir son adresse de résidence, il soutient que des pirates informatiques sont sur le coup.

Alexandre Bossé va aussi menacer un agent d’infiltration de la police, qui s’était présenté en ligne comme une fille de 14 ans, de « trouver son adresse » s’il refuse de répondre à ses demandes.

17 chefs d’accusation

Le résidant de Saint-Stanislas, en Mauricie, a plaidé coupable à 17 chefs d’accusation devant le juge Yves Paradis, en septembre dernier, au palais de justice de Montréal. Il est question de chefs de leurre informatique, d’incitation à des contacts sexuels d’un mineur, d’extorsion, de production de pornographie juvénile et d’avoir rendu accessible à un enfant du matériel sexuellement explicite.

Si Alexandre Bossé a été libre pendant une bonne partie du processus judiciaire depuis son arrestation en octobre 2019, il demeure détenu depuis l’été dernier. Le jeune homme a enfreint ses conditions en possédant un téléphone cellulaire. Le cyberprédateur s’est fait pincer alors qu’il était à l’hôtel avec une jeune femme majeure, dont les parents, inquiets, avaient joint la police.

Alexandre Bossé retourne en cour en décembre en vue des observations sur la peine.

* Prénoms fictifs