Le ministre de la Justice Simon Jolin-Barrette a annoncé lundi la mise en place d’un service gratuit offrant quatre heures de conseils juridiques pour les personnes victimes de violences sexuelles et de violence conjugale.

« Ces services juridiques permettront d’accorder [aux victimes] plus d’autonomie, plus de sécurité et plus de confidentialité dans leurs démarches judiciaires », a indiqué M. Jolin-Barrette lors d’un point de presse. Ces consultations téléphoniques et virtuelles seront offertes à toutes les victimes « sans exception », peu importe leur niveau de revenus.

Une équipe de 12 avocats spécialisés en matière de violence sexuelle et conjugale sera créée pour offrir ces consultations, dans « tous les domaines du droit en lien avec cette violence ». M. Jolin-Barrette a précisé que le service vise à répondre à « l’ensemble des questions qui peuvent passer à travers la tête des personnes victimes », que ce soit au niveau de la garde des enfants ou de la résidence familiale. Au total, trois millions de dollars seront investis chaque année pour soutenir cette initiative.

Cette annonce suit l’une des recommandations du rapport de décembre 2020 intitulé Rebâtir la confiance, qui a été déposé par le comité d’experts sur l’accompagnement des victimes d’agressions sexuelles et de violence conjugale. Le 15 septembre dernier, Québec a déposé le projet de loi 92 pour la création d’un tribunal spécialisé en matière de violence sexuelle et conjugale.

S’attaquer aux obstacles d’accès à la justice

Lors du point de presse, le ministre de la Justice a aussi annoncé un partenariat bonifié jusqu’en 2024 avec la clinique juridique Juripop. Cette entente aura pour but d’offrir des formations en violence sexuelle et conjugale pour les avocats. Ceux qui auront suivi cette formation pourront s’ajouter à la banque spécialisée d’avocats qui offre des services adaptés aux victimes.

Présente aux côtés de Simon Jolin-Barrette, la directrice générale de Juripop, Sophie Gagnon, a évoqué la nécessité de faire du système de justice un « endroit plus accessible pour les personnes victimes ». « Juripop va représenter pratiquement 125 personnes victimes par année avec pour mission de documenter les obstacles d’accès à la justice […] et proposer des solutions innovantes pour améliorer leur parcours », a-t-elle précisé.

« Couvrir l’ensemble du territoire québécois »

En ce qui concerne l’accessibilité du service pour les Autochtones, M. Jolin-Barrette assure qu’en offrant des consultations par téléphone et visioconférence, l’équipe pourra « couvrir l’ensemble du territoire québécois ».

Ce dernier soutient que l’expérience que possèdent les avocats qui offriront des consultations leur permettra de travailler avec « tous les types de clientèle ». M. Jolin-Barrette a ajouté que l’une des avocates du service avait travaillé pour la Commission des services juridiques dans le Nord et était donc « sensibilisée à la réalité des personnes et des communautés autochtones ».

« Un pas dans la bonne direction »

Pour Sandrine Ricci, sociologue affiliée à la Chaire de recherche sur les violences sexistes et sexuelles en milieu d’enseignement supérieur de l’UQAM, l’annonce de Québec est « un pas dans la bonne direction ». « Mais il faut travailler à toutes les étapes », estime cette dernière, en soulevant entre autres la nécessité de « mieux former les agents et agentes qui reçoivent les plaintes ».

Mais vouloir changer le système judiciaire sans s’attaquer au colonialisme, au sexisme et au racisme relève de « l’anecdotique », ajoute Mme Ricci. « Il faut laisser les gens prendre leur place et les prendre au sérieux quand ils racontent ce qu’ils vivent », souligne-t-elle, en pointant le déficit de crédibilité et d’inclusion auquel les groupes minoritaires font face.

L’enjeu complexe de la violence sexuelle et conjugale nécessite également qu’un travail d’éducation soit fait dès le plus jeune âge, soutient Sandrine Ricci.

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