La relation difficile avec ses contrôleurs et des patrons de la Sûreté du Québec, sa relation houleuse avec une ancienne conjointe qui aurait voulu le tuer, son intention de poursuivre celle-ci, de même que des policiers et des psychologues, sa consommation de médicaments et de cannabis, même durant les jours de procès, ses colères, des écrits ou propos à l’aspect menaçants, dénigrants ou violents ; la défense a passé la journée à tenter de cerner la personnalité de l’ancien tueur à gages de la mafia, mardi, au procès devant jury de Marie-Josée Viau et de Guy Dion.

Le couple de Saint-Jude, près de Saint-Hyacinthe, est accusé d’avoir comploté et d’avoir participé aux meurtres de Vincenzo et de Giuseppe Falduto, commis le 30 juin 2016 dans le garage de leur propriété. Le tueur à gages, qui a assassiné les deux frères, a collaboré avec les enquêteurs de la SQ deux ans et demi plus tard et compromis Viau et Dion en les amenant à parler du crime et en les enregistrant à leur insu avec un système d’enregistrement portatif.

L’ex-tueur à gages témoigne au procès pour une quatrième semaine. En contre-interrogatoire, MMylène Lareau de la défense l’a poussé dans ses derniers retranchements, provoquant parfois l’impatience du témoin, notamment en le mitraillant de question sur le fait qu’il aurait déjà confié à des gens avoir fait des psychoses.

« Souvent, j’ai des creux, des moments dépressifs très noirs, mais ce ne sont pas des psychoses. Oui j’ai déjà dit ça à des gens, mais ce n’était pas le bon mot », a-t-il commencé par répondre à la criminaliste.

Mais face à l’insistance de cette dernière, le témoin s’est fâché et a levé le ton. « Lâche le morceau », a-t-il lancé à MLareau, forçant le juge Éric Downs de la Cour supérieure à calmer la situation et à dire au témoin que l’avocate faisait son travail et qu’il avait permis que ces questions lui soient posées.

Répondant à la même série de questions, l’ancien tueur à gages a dit consommer des médicaments et du cannabis presque chaque jour, même parfois sur l’heure du dîner, durant le présent procès.

Une relation toxique

MLareau a passé une partie de l’avant-midi et tout l’après-midi à questionner le témoin sur sa relation houleuse avec une ancienne conjointe contre laquelle l’ancien tueur à gages a porté plainte notamment parce que, selon lui, elle aurait tenté de le compromettre auprès de criminels, aurait voulu le faire arrêter et le faire tuer.

La femme a aussi porté plainte contre lui pour menaces de mort et harcèlement.

« Tous mes amis comme Arsène Mompoint – BM – me disaient de mettre fin à cette relation ».

« Je n’ai jamais voulu la tuer. Je vais tuer des crapules, mais pas des citoyens. Je ne suis pas dangereux comme ça », a-t-il dit.

Lorsque MLareau lui a souligné qu’il s’était engagé à ne pas porter d’arme à la suite de cette plainte et que Charlie Renda lui a portant donné une arme à feu dans une voiture à l’automne 2017, le témoin a fortement réagi.

« Toutes les fois que j’ai eu une arme à feu, j’ai brisé cette condition. Mais techniquement, en vertu de la loi, comme je ne me suis pas fait prendre, je n’ai fait aucun bris. Lorsque j’ai avoué tous les crimes (à la SQ), j’ai avoué avoir eu des armes à feu. J’ai fait (j’ai tué) Rocco Sollecito ! Comment je ne pouvais pas avoir une arme à feu ? », a répondu le témoin.

« Bon, on va mettre fin à ça, c’est de la sémantique », est intervenu le juge Downs, avant d’ordonner la pause de l’après-midi.

Plus tard, d’autres questions portant sur son ancienne conjointe ont fait sortir le témoin de sa contenance, tellement que le magistrat a mis fin à la journée prématurément, à 16 h plutôt qu’à 16 h 30.

Passage à tabac

Quant aux anecdotes mafieuses, le témoin a dit avoir eu plusieurs contrats sur sa tête, de la part notamment de Pietro D’Adamo et d’un certain Dany Cochu.

Il a aussi raconté s’être rendu en 2016 dans un bar du boulevard Saint-Laurent, près de l’avenue du Mont-Royal, dans le Petit-Portugal, en compagnie de Salvatore Scoppa et de celui que l’on surnomme Brad Pitt depuis le début du procès – car on ne peut révéler son identité – pour battre le propriétaire, un certain Sergio, qui, selon Scoppa, aurait vendu de la cocaïne illégalement.

« Sal m’a demandé de battre le type, mais c’est lui-même qui l’a fait. J’étais content qu’il le fasse lui-même. Brad Pitt et moi, on a payé un verre aux clients et on leur a ordonné de rester tranquilles. Sal a pris des pauses de 2-3 minutes et m’a demandé de protéger ses arrières. Le gars a ensuite versé 2000 $ par semaine à Sal durant un certain temps », a raconté le témoin, qui a dit porter une veste anti-balles ce jour-là – au cas où il se ferait tirer ou poignarder – mais pas d’arme à feu.

« Si j’ai un gun sur moi, c’est pour deux choses, pour me protéger ou pour tuer », a expliqué le témoin.

Son contre-interrogatoire se poursuit mercredi.

Pour joindre Daniel Renaud, composez le 514 285-7000, poste 4918, écrivez à drenaud@lapresse.ca ou écrivez à l’adresse postale de La Presse.