Une femme de 29 ans se trouvait toujours dans un « état critique », samedi soir, après avoir été rouée de coups par son conjoint tôt samedi matin dans son appartement de la rue des Oblats, dans l’arrondissement de LaSalle. La police de Montréal a ouvert une enquête sur cette affaire et le conjoint a été accusé.

C’est vers 6 h 50 que le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) rapporte avoir reçu un appel pour une intervention d’urgence dans un édifice résidentiel, non loin de la rue Bergevin. Une fois sur place, les patrouilleurs ont trouvé la jeune femme dans un état jugé critique. Elle a été transportée à l’hôpital, où on craignait toujours pour sa vie en fin de journée, samedi.

« On parle vraiment de violence physique, donc de coups de poing. Il n’y a pas eu d’arme d’impliquée », a expliqué l’agent Jean-Pierre Brabant, porte-parole du corps policier, en soulignant que l’enquête viserait néanmoins à faire toute la lumière sur les « circonstances exactes » de l’évènement.

PHOTO CATHERINE LEFEBVRE, COLLABORATION SPÉCIALE

Un périmètre de police a été établi rue des Oblats. Des enquêteurs ont passé la scène au peigne fin.

Le conjoint, un homme de 32 ans qui est connu des services policiers, a comparu tard en soirée depuis le centre de détention. Il a été formellement accusé de voies de faits graves et bris de conditions. Ni son identité ni celle de sa victime n’ont été précisées à ce stade.

Un périmètre de police a été établi rue des Oblats. Des enquêteurs ont passé la scène au peigne fin.

« Il faut que ça cesse »

La ministre responsable de la Condition féminine, Isabelle Charest, a qualifié d’inacceptable la série d’actes de violence contre des femmes. « Les événements des derniers jours sont tragiques et préoccupants. Des ressources existent, et c’est important d’y faire appel en cas de besoin », a-t-elle déclaré dans un tweet.

Même son de cloche du côté de la mairesse de Montréal, Valérie Plante. « Il faut que ça cesse. Cette violence envers les femmes est inacceptable. Après le féminicide dans St-Léonard [vendredi], voilà un épisode de violence conjugale à LaSalle. Ça ne peut plus durer », a-t-elle martelé dans un tweet.

Ce nouvel épisode de violence conjugale survient en effet au lendemain d’un tragique évènement dans Saint-Léonard, où un chauffeur de taxi a tué sa conjointe à l’arme blanche avant de se donner la mort, vendredi matin. Il s’agissait du sixième féminicide en six semaines au Québec. En moyenne, on en compte environ 12 par année dans la province.

La situation fait craindre une « série noire » de féminicides et d’épisodes de violence conjugale aux maisons d’hébergement pour femmes, qui appréhendent que le déconfinement empirera les choses.

« [Les mesures sanitaires] amplifient le pouvoir du partenaire violent. Son contrôle est beaucoup plus grand. Nous avons de grandes préoccupations par rapport à des escalades de violence conjugale à mesure que les consignes sanitaires seront levées et que le partenaire perdra le contrôle sur sa victime », expliquait plus tôt Claudine Thibaudeau, travailleuse sociale et responsable du soutien clinique de l’organisme communautaire SOS violence conjugale.

De son côté, la Fédération des maisons d’hébergement pour femmes appelle Québec à « envisager des solutions à court terme » en matière de sensibilisation. « Affronter le conjoint violent, ce n’est pas une bonne chose, puisque ça se retourne toujours contre la victime. Il faut intervenir d’une façon ou d’une autre. Appelez-nous : c’est notre travail au quotidien », implore sa directrice, Manon Monastesse.

« Ça fait presque trois de suite. C’est quelque chose que nous avions prévu, mais nous avons la confirmation maintenant : nous faisons face à une épidémie de féminicides », se désole-t-elle en entrevue avec La Presse.

Selon Mme Monastesse, il est impératif que le gouvernement mette en œuvre rapidement les 190 recommandations proposées par un comité d’experts transpartisan sur l’enjeu des violences faites aux femmes, en décembre dernier.

Elle donne l’exemple des bracelets électroniques, qui permettraient de surveiller les ex-conjoints violents. « Notre politique d’intervention en matière de violence conjugale date de 1995. Nous avons besoin d’une actualisation de notre plan d’action », incite Mme Monastesse.

Ensuite, il faut interpeller davantage les hommes dans le combat contre la violence conjugale. « Il faut que les hommes soient proactifs, à la fois individuellement et collectivement. Il faut qu’ils disent haut et fort qu’ils n’acceptent pas les violences faites aux femmes. Qu’ils en parlent à leurs collègues, qu’ils offrent leur soutien à leurs amies. Ce n’est pas à nous, les femmes, de toujours lutter contre les violences qui nous sont faites », conclut-elle.

Avec Léa Carrier, La Presse

Quelques ressources pour les victimes de violence conjugale et leurs proches

SOS violence conjugale : 1 800 363-9010 (ligne sans frais) ou 438 601-1211 (par texto)

Fédération des maisons d’hébergement pour femmes

Quelques ressources pour les personnes violentes et leurs proches

Groupe d’aide aux personnes impulsives, ayant des comportements violents (Québec) : 418 529-3446

Action sur la violence et intervention familiale (Montréal) : 450 692-7313