La police a découvert des traces de ricine dans l’appartement de Pascale Ferrier, cette femme de la Rive-Sud de Montréal accusée d’avoir envoyé une lettre empoisonnée à Donald Trump. Un juge américain a refusé lundi de libérer la citoyenne franco-canadienne, qui détenait plusieurs armes et une quantité importante de munitions lors de son arrestation.

Pascale Ferrier était de retour devant le tribunal à Buffalo, dans l’État de New York, lundi, dans la foulée de son arrestation à un poste frontalier américain le 20 septembre.

Le procureur fédéral américain Timothy Lynch, chargé de la poursuite, a déclaré qu’il venait tout juste de recevoir les résultats d’analyse du Laboratoire national de microbiologie du Canada, confirmant que des traces de ricine ont été relevées sur un mortier dans l’appartement de la femme.

« C’était de la vraie ricine, ça aurait pu tuer une personne », a martelé le procureur.

Une équipe spécialisée de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) assistée par des experts en armes chimiques et bactériologiques de l’armée canadienne avait passé au peigne fin le petit logement de l’arrondissement de Saint-Hubert, à Longueuil, la semaine dernière.

Plusieurs armes

Le procureur a aussi expliqué que lorsqu’elle s’est présentée au poste-frontière qui relie la ville de Buffalo et l’Ontario, Pascale Ferrier avait sur elle un pistolet semi-automatique, environ 300 cartouches fonctionnelles, un couteau à ressort, un pistolet à impulsion électrique, une matraque et un faux permis de conduire du Texas.

Elle aurait tout de suite déclaré qu’elle était la personne recherchée pour l’envoi de lettres contaminées à la ricine. Elle aurait ensuite avoué en interrogatoire qu’elle avait envoyé les lettres non seulement au président américain, mais aussi à des policiers au Texas qui l’avaient détenue lors d’un voyage précédent en 2019. Elle avait alors été arrêtée avec une arme de poing non enregistrée, un gilet pare-balles et un permis de conduire texan trafiqué affichant sa photo avec un faux nom.

L’avocate de Mme Ferrier a souligné que sa cliente s’était rendue elle-même aux agents de la protection des frontières et avait avoué être la personne recherchée, sans essayer de s’enfuir ou de disparaître. Elle a proposé que celle-ci puisse reprendre sa liberté en attendant le procès, sous de sévères conditions. La mère de deux enfants, qui vit au Canada depuis 2008 et possède la double citoyenneté franco-canadienne depuis 2015, détient une maîtrise en génie et a toujours été une membre productive de la société, a-t-elle souligné. Elle travaillait jusqu’à récemment chez Pratt & Whitney à Longueuil, a le soutien de sa famille et n’a pas d’antécédents de problèmes d’alcool et de drogue, a-t-elle indiqué.

PHOTO COURTOISIE COMTÉ D’HIDALGO, TEXAS

Pascale Ferrier

Le juge H. Kenneth Schroeder Jr a toutefois indiqué que la preuve laissait croire à un risque pour la sécurité du président et d’autres membres de la communauté. Il a ordonné que l’accusée demeure détenue dans l’attente de son procès.

Le cas de Meng Wanzhou cité en exemple

Le juge a cité le cas de Meng Wanzhou, dirigeante de Huawei dont les États-Unis réclament l’extradition au Canada depuis 2018. Selon lui, cette cause démontre qu’il peut être difficile de faire revenir une personne du Canada pour un procès aux États-Unis, et qu’il serait hasardeux de permettre à Mme Ferrier de retourner au Québec en attendant la suite des procédures.

Le magistrat a aussi évoqué la longue histoire d’attentats politiques visant des présidents américains, incluant le meurtre d’Abraham Lincoln et l’assassinat à Buffalo du président William McKinley par un sympathisant anarchiste, ainsi que la tentative de meurtre contre Ronald Reagan.

Pour le moment, Pascale Ferrier est seulement accusée d’avoir menacé de tuer le président américain, mais la poursuite a déjà annoncé que de nombreux chefs d’accusation s’ajouteront bientôt.

L’acte d’accusation déposé contre elle jusqu’à présent résume les propos que la Franco-Canadienne de 53 ans aurait tenus dans les sept lettres qu’elle aurait envoyées aux États-Unis, selon le FBI. L’une des missives était adressée personnellement à Donald Trump.

Poison ou fusil

« J’ai trouvé un nouveau nom pour toi : le clown tyran hideux. J’espère que tu l’aimes. Tu ruines les É.-U. et les conduits au désastre. J’ai des cousins américains, donc je ne veux pas les prochains quatre ans avec toi comme président. Abandonne et retire ta candidature pour cette élection », précisait la lettre envoyée à la Maison-Blanche, dans laquelle se trouvait une poudre blanche identifiée en laboratoire comme étant de la ricine, un puissant poison.

« J’ai fait un ‟cadeau spécial” pour t’aider à prendre une décision. Le cadeau est dans cette lettre. S’il ne fonctionne pas, je trouverai une meilleure recette pour un autre poison, ou je pourrais utiliser mon fusil quand je pourrai venir », aurait ensuite poursuivi la femme.