Après son arrestation pour l’agression commise chez Pietro Poletti vendredi dernier, l’un des accusés a déclaré aux policiers que les individus qui sont entrés chez l’ex-enquêteur du SPVM n’avaient vraisemblablement pas l’intention de le tuer.

« Je pense que les photos [montrées par l’enquêteur] parlent d’elles-mêmes. Si on avait voulu le tuer, il serait mort.

« Je ne pense pas que c’était l’intention des gens sur les lieux de le voir mort », a dit Yadley Deutz Saint-Jean.

Lorsque les policiers lui ont demandé s’il pouvait s’agir d’un message qu’on a voulu faire passer à l’ex-enquêteur spécialiste de la mafia, le jeune homme de 23 ans n’a pas voulu s’exprimer davantage. Il a toutefois dit qu’il ne pensait pas que l’événement serait médiatisé.

C’est ce qu’on a notamment appris vendredi à l’enquête sur remise en liberté de Saint-Jean et de ses deux présumés complices, Sandel Pierre, 18 ans, et Louis-Simon Jacques, 30 ans, au palais de justice de Montréal.

Le trio est accusé d’introduction avec effraction, de voies de fait, de menaces de mort et de possession d’arme. Jacques est celui qui aurait conduit le véhicule des suspects.

On a également appris qu’un troisième individu qui a fait irruption dans la résidence de M. Poletti et de sa mère de 87 ans, et qui les a agressés, est toujours au large et est activement recherché.

Pluie de coups

Le procureur de la poursuite, MAntonio Parapuf, a raconté les événements.

Vers 10 h le 12 juin, M. Poletti regardait la télévision lorsque trois hommes, portant des masques chirurgicaux, ont frappé à sa porte.

Lorsque l’ancien policier a ouvert, l’un des suspects a crié : « C’est lui ! » Ils sont ensuite entrés et l’ont roué de coups.

PHOTO DAVE SIDAWAY, ARCHIVES MONTREAL GAZETTE

Pietro Poletti, ex-enquêteur du SPVM

M. Poletti a demandé qu’on appelle la police, et sa mère, qui a entendu les cris, est montée du sous-sol. Un des individus l’a poussée, la blessant à un poignet. Elle est redescendue au sous-sol, est sortie par le garage et a demandé de l’aide à un voisin.

Pietro Poletti, frappé à la tête et à l’estomac à coups de bâton de baseball en métal et de brique, selon sa déclaration, s’est recroquevillé sur lui-même pour se protéger.

Fuite

Il semble qu’à ce moment, l’un des suspects ait ouvert la porte et pris la fuite. Puis M. Poletti a entendu l’un des deux toujours présents dans sa maison dire à l’autre : « Tue-le ! Tue-le ! » L’ex-enquêteur aurait alors profité de la porte ouverte pour sortir de la résidence. Les deux derniers suspects ont alors fui à leur tour vers une Nissan Sentra 2014 noire, immobilisée dans une rue voisine.

Lorsque la police s’est présentée sur les lieux, M. Poletti a fourni une bonne description des suspects.

Un témoin a vu ces derniers monter à bord de la Nissan et partir en trombe. Il a suivi la voiture et pris en note le numéro d’immatriculation. Le SPVM a alors envoyé la description du véhicule des suspects et le numéro d’immatriculation à tous les corps de police environnants.

À 17 h 55, la Nissan a été repérée par des policiers de Longueuil qui ont intercepté les suspects cinq minutes plus tard, près du pont Jacques-Cartier.

Nombreux indices

Après son arrestation, le conducteur et propriétaire de la Nissan, Louis-Simon Jacques, a raconté aux policiers qu’il était un consommateur de drogue depuis son adolescence et qu’il avait besoin d’argent pour cette raison. Pour en obtenir, il conduit des gens qui le paient en espèces ou en stupéfiants.

Il a expliqué qu’un certain Yadley l’avait appelé pour un transport. Il s’est rendu dans un appartement Airbnb au coin de l’avenue du Mont-Royal et de la rue Saint-Hubert, pour faire monter trois hommes.

« Yadley [...] a dirigé le conducteur avec un GPS jusqu’à un endroit et a dit au chauffeur d’attendre. Selon M. Jacques, Yadley a pris un balai à neige dans la voiture et les trois hommes sont partis. Ils sont revenus un peu plus tard sans rien dans les mains. Louis-Simon Jacques a dit qu’il ne savait pas qu’ils allaient commettre un crime », a raconté MParapuf.

Après l’agression chez l’ex-enquêteur, les quatre suspects sont retournés à l’appartement Airbnb, y laissant l’un d’eux, vraisemblablement celui qui est toujours recherché. Ils auraient ensuite effectué des transactions de stupéfiants à Montréal et à Varennes, avant de faire monter un quatrième individu qui n’a rien eu à voir avec le crime et qui a été libéré après les arrestations.

Selon le procureur, une vidéo enregistrée par une caméra de surveillance montre les suspects descendre de la Nissan et y remonter. Ils portent les mêmes vêtements que lors de leur arrestation. Des morceaux de balai à neige ont été trouvés dans la résidence de Pietro Poletti, portant des traces d’ADN et des empreintes digitales de Sandel Pierre.

Pietro Poletti a été lacéré au-dessus de l’œil gauche. Il a des rougeurs à un genou, souffre de douleurs au dos et au ventre, a de la difficulté à marcher, souffre d’une entorse et a des côtes fêlées.

Yadley Deutz Saint-Jean a une autre cause toujours active de possession d’arme et de stupéfiants et devait respecter des conditions au moment de l’agression chez Pietro Poletti.

Saint-Jean, coiffeur de profession, a livré un témoignage qui en a fait sourciller certains dans la salle, disant par exemple ignorer le nom de famille de sa petite amie, qui lui a été présentée par une connaissance dont il ne connaît pas le nom.

Le père de Sandel Pierre a témoigné en faveur de son fils. « Il n’a jamais été violent. Je ne peux pas le laisser tomber à cet âge-là. Il doit se rendre à l’évidence, il est au pied du mur », a dit Ketel Pierre, très ému par moments.

L’enquête sur remise en liberté se poursuivra vendredi prochain.

Pour joindre Daniel Renaud, composez le 514 285-7000, poste 4918 ou écrivez à drenaud@lapresse.ca.