Zachary Shriar Paquin a été littéralement poignardé dans le dos par un ami de confiance, il y a cinq ans. Paralysé, le jeune homme a agonisé pendant deux jours dans son salon avant d’être secouru. Son bourreau, Ahmed Abou Sharkh, a été condamné à 11 ans de détention pour ce crime « cruel et gratuit », malgré ses problèmes mentaux et son quotient intellectuel « extrêmement bas ».

« Il n’y a aucune explication à ces agissements cruels, commis par un ami de surcroît », a tranché le juge Christian M. Tremblay, la semaine dernière au palais de justice de Montréal.

Février 2015, Zachary Shriar Paquin est seul dans son appartement de Dollard-des-Ormeaux, dans l’ouest de Montréal. Il boit quelques bières en matinée, comme sa mère est en voyage à Cuba. Son ami Ahmed Abou Sharkh arrive à l’improviste et lui demande de lui rouler un joint de marijuana.

Pendant que l’hôte s’exécute, Ahmed Abou Sharkh le poignarde à une dizaine de reprises dans le cou, dans le dos et dans le thorax. La victime s’effondre dans le salon, incapable de bouger, mais toujours consciente. L’agresseur prend le temps de se laver les mains, de prendre 40 $ dans le portefeuille de sa victime et de débrancher le téléphone.

M. Paquin a été abandonné seul pendant plus de deux jours, baignant dans son sang et ses excréments, agonisant, sans savoir si quelqu’un lui porterait secours ou s’il allait mourir.

Le juge Christian M. Tremblay

Inquiet d’être sans nouvelles de son ami, Jonathan Cohen se rend sur place le surlendemain. Il entend son ami gémir derrière la porte et appelle la police. Sans cette intervention salvatrice, le jeune homme serait « sans doute » mort, estime le juge. Hospitalisé pendant deux mois, Zachary Shriar Paquin conserve encore aujourd’hui des séquelles physiques et psychologiques, dont des problèmes de dextérité à la main.

Ahmed Abou Sharkh a été reconnu coupable de tentative de meurtre et de vol qualifié en juillet 2019 au terme d’un long procès. Le juge Tremblay avait alors rejeté sa défense d’alibi. En effet, l’homme de 33 ans prétendait être en train de dormir le matin fatidique et plaidait même ne pas connaître la victime. La défense a porté en appel le jugement sur la culpabilité.

Le faible QI de l’accusé n’a pas joué de rôle, dit le juge

Le juge s’est rangé à la suggestion de la procureure de la Couronne, Me Anne-Marie Émond, en imposant 11 ans de détention à l’accusé. Il a ainsi relevé de nombreux facteurs aggravants, comme les conséquences importantes pour la victime, les risques de récidive et l’absence de remords.

« Il a planifié son crime. Il a attendu que la victime soit seule. Il s’est présenté à l’improviste. La victime avait bu et ne se méfiait pas. Il a utilisé un prétexte et l’a attaqué sournoisement par-derrière. […] L’accusé a même débranché le fil du téléphone pour s’assurer que la victime ne puisse demander de l’aide », résume le juge Tremblay.

L’avocate de la défense, Me Stéphanie Basso, demandait de quatre à six ans de prison en insistant sur les problèmes mentaux et la déficience intellectuelle de son client. Peu scolarisé, l’accusé vivait de l’aide sociale et peinait à socialiser. Or, la schizophrénie et le faible quotient intellectuel de l’accusé n’ont aucun lien avec le crime, selon le juge.

« Répétons-le pour la dernière fois, nous ne sommes pas dans un contexte où la maladie mentale de l’accusé, ou encore son faible quotient intellectuel, a joué un rôle dans la commission des crimes », a martelé le magistrat de la Cour du Québec. Il reste neuf ans et huit mois à la peine de l’accusé en tenant compte de la détention préventive.

Cette affaire n’est pas sans rappeler le cas d’Yves Nadeau, condamné plus tôt ce mois-ci à la prison à vie sans possibilité de libération conditionnelle avant 11 ans et demi pour le meurtre non prémédité de sa conjointe. Le juge de la Cour supérieure avait alors accordé une peine moindre à l’accusé en raison de sa déficience intellectuelle, même si sa condition n’avait pas contribué au crime.