Le chien de type pitbull qui a mordu six personnes à Montréal-Nord, en août dernier, n'échappera vraisemblablement pas à l'ordre d'euthanasie qui pèse contre lui. L'avocate Anne-France Goldwater a échoué dans sa tentative de le faire transférer dans un refuge américain qui promettait de le réhabiliter.

Dans sa décision rendue ce mardi, le juge Lukasz Granosik, de la Cour supérieure, estime que la propriétaire du chien, Christa Frineau, s'est manifestée beaucoup trop tard pour réclamer la sauvegarde de son animal.

« L'état actuel du chien est pitoyable : en cage depuis plusieurs mois et coupé de son environnement et de ses maîtres, son état se détériore, il est gavé d'anxiolytiques et ses activités sont limitées. Il dépérit », écrit le magistrat.

L'animal est gardé depuis des mois par la SPCA, après qu'il ait attaqué six personnes - dont deux enfants grièvement, alors qu'ils se faisaient garder chez leur grand-mère Frances Richardson. Le SPVM avait obtenu qu'il soit maintenu en vie jusqu'à ce que la Direction des poursuites criminelles et pénales décide, la semaine dernière, de ne déposer aucune accusation contre la grand-mère.

Le recours judiciaire pour sauver le molosse, déposé en novembre par le refuge américain Road to Home Rescue Support, a donc pu procéder la semaine dernière. Mais ce n'est qu'à la veille de l'audience que Mme Frineau s'est manifestée personnellement pour dire qu'elle s'opposait à la mise à mort de son chien. « Il n'existe aucune justification valable du délai de sept mois pris par Mme Frineau pour se porter partie demanderesse" dans le recours, écrit le juge Granosik. Ce n'est pas un délai raisonnable. »

Le Tribunal considère que le refuge américain « ne possède pas la qualité juridique » pour réclamer la sauvegarde de l'animal. Aucune preuve n'a démontré « qu'il est dans la mission de Road to Home Rescue Support de secourir tous les animaux, peu importe où ils se trouvent dans le monde », écrit le juge.

« Le Tribunal éprouve un malaise de voir une organisation étrangère, qui ne participe d'aucune façon au processus démocratique montréalais et québécois et n'ayant aucun facteur de rattachement ni au territoire ni à (sa) population, contester la validité d'un règlement d'un ville du Québec. »    

Me Anne-France Goldwater contestait par ailleurs la légalité du règlement municipal permettant à la ville d'ordonner d'éliminer des animaux dangereux sans que le maître soit d'abord consulté ou qu'une expertise soit menée. Le juge s'est plutôt rendu aux arguments de l'avocat de la Ville de Montréal, selon qui le comportement « désaxé » du chien et sa dangerosité « manifeste » permettaient de se passer d'une telle expertise.

Ce qui adviendra du chien dans l'immédiat demeure incertain. Me Goldwater n'a pas spécifié si elle allait porter le jugement en appel. La SPCA réclame un « dénouement rapide » de cette histoire. « Compte tenu de l'historique de Shotta et de son comportement, nous devons prendre des précautions particulières lors de ses sorties de son enclos, ainsi que lors de ses interactions avec les humains, afin d'assurer la sécurité de nos employés, affirme la porte-parole Anita Kapucinska dans un courriel.

En plus de compromettre le bien-être de Shotta, la situation est très difficile à vivre pour notre personnel, qui est témoin, au quotidien, des importantes restrictions dont il fait l'objet et de l'impact majeur sur sa qualité de vie »

Road to Home Rescue Support avait versé 3000 $ en caution pour garantir les frais liés au recours judiciaire. Cette somme devra maintenant servir « de façon prioritaire à courir les frais de subsistance de Shotta auprès de la SPCA depuis le 20 mars 2019 », tranche le juge.