La cohabitation est de plus en plus tendue dans le réseau du métro. Le nombre des plaintes à la Société de transport de Montréal (STM) a triplé l’an dernier, surtout à cause de l’itinérance et de la consommation de drogue et d’alcool, révèlent les données obtenues par La Presse.

Les comportements dérangeants des usagers du métro ont suscité près de 1300 plaintes à la STM l’an dernier, montrent les chiffres fournis à la suite d’une demande d’accès à l’information. C’est trois fois plus qu’au cours de la décennie précédente, durant laquelle la STM a reçu 377 plaintes par an en moyenne.

Plus de la moitié des plaintes de 2023 étaient liées à l’itinérance et à la consommation de drogue ou d’alcool.

Les signalements en lien avec l’itinérance ont quadruplé. Par rapport à la décennie 2013-2022, alors que la STM recevait 128 plaintes par an en moyenne au sujet de la « flânerie » et des « mendiants », elle en a enregistré plus de 500 l’an dernier.

La STM consigne d’ailleurs ces plaintes de façon plus précise depuis deux ans. Longtemps amalgamées dans la grande catégorie « flânerie – mendiants », elles sont désormais réparties entre « Itinérance-présence/flânerie » (lorsqu’elles ne présentent aucun enjeu de sécurité) et « Itinérance – sécurité ». Plus de 60 % des plaintes relatives à l’itinérance reflétaient des préoccupations de sécurité l’an dernier.

« Il faut préciser que cette catégorisation se base sur la description faite par le plaignant », a souligné une porte-parole de la STM, Laurence Houde-Roy, par courriel.

Quant aux plaintes liées à la drogue et à l’alcool (y compris la présence de seringues abandonnées), elles se sont multipliées par 6, soit au total 175 l’an dernier.

Sortie de pandémie

Les autres motifs les plus fréquents sont l’attitude de la clientèle (136 plaintes en 2023) et la présence d’un comportement menaçant ou d’intimidation (130 plaintes). Jusqu’en 2020, la seconde catégorie était incluse dans la première. Une catégorie distincte « comportement menaçant/intimidation » a été créée en 2021 pour étiqueter plus précisément les plaintes où l’attitude d’usagers était plus menaçante, précise la STM.

Les plaintes liées à la Loi concernant la lutte contre le tabagisme, qui a pourtant été adoptée en 2015, sont également en hausse. La STM en a reçu 126 l’an dernier, presque cinq fois plus que la moyenne des dix années précédentes.

La sortie de pandémie ne semble donc pas avoir calmé le jeu dans le métro. Entre 2022 et 2023, le nombre total de plaintes, tous motifs confondus, a bondi de 50 %, passant de 832 à 1256.

« Une hausse de l’achalandage peut entraîner une hausse des plaintes », fait valoir Mme Houde-Roy. En 2022, la STM avait seulement retrouvé 63 % de son achalandage d’avant la pandémie, contre 77 % en 2023. L’achalandage s’est encore un peu accru depuis, à 80 % du niveau prépandémique.

Pour l’année 2024, la STM avait déjà reçu plus de 399 plaintes, montrent les données couvrant les deux premiers mois de l’année.

Gaz poivre et autres agents irritants

Des décharges de gaz poivre (« poivre de Cayenne ») et d’autres agents irritants ont encore empoisonné l’air du métro l’an dernier, avec 20 épisodes du genre, presque autant que l’année précédente (23).

L’usage de ces répulsifs dans l’espace clos du métro peut avoir un effet paralysant sur le service, forçant l’évacuation de plusieurs stations. Or, le nombre de ces pulvérisations indésirables avait bondi en 2022, les 23 cas de cette année-là contrastant violemment avec les 4 cas par an en moyenne recensés au cours de la décennie précédente.

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, ARCHIVES LA PRESSE

Constables spéciaux de la STM

Tous ces évènements sont considérés comme des « méfaits volontaires », car aucun d’eux n’a été provoqué par des constables spéciaux de la STM. En effet, c’est seulement depuis le début du mois que ces employés sont équipés de gaz poivre en gel, et ils ne l’ont pas encore utilisé, a indiqué la société de transport mardi.

Au moins six méfaits impliquant des gaz irritants ont toutefois été enregistrés dans le métro depuis le début de l’année, montrent les données de la STM pour les mois de janvier et février 2024.

Avec la collaboration de Lila Dussault et de Pierre-André Normandin, La Presse

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