Le tiers des employés à temps plein de la Ville de Montréal ont empoché au moins 100 000 $ en un an, selon des données obtenues par La Presse. Une proportion en augmentation rapide depuis quelques années.

Les heures supplémentaires effectuées par les policiers poussent la majorité d’entre eux au-dessus de la barre des 100 000 $, ce qui explique en partie cette situation.

Le top 10 des employés les mieux payés de la Ville de Montréal comprend d’ailleurs cinq policiers syndiqués qui ont tous touché plus de 270 000 $, vraisemblablement en travaillant des centaines d’heures à taux double. Au total, ils ont gagné davantage que le chef de police.

« La Ville souhaite être un employeur attractif et se compare à la médiane du marché dans l’établissement du salaire de ses employés », a indiqué le relationniste du service des communications de la Ville Hugo Bourgoin.

Un ratio en hausse

  • 2019 : 26 %
  • 2020 : 29 %
  • 2021 : 32 %
  • 2022 : 33 %

Ces ratios ont été obtenus en divisant le nombre d’employés qui ont gagné plus de 100 000 $ par le nombre d’« années-personnes » inscrit au budget de la Ville.

Une étude de trois chercheurs de HEC Montréal datant de 2020 montre que la rémunération des employés de Montréal se situe dans le haut du peloton municipal, juste après Longueuil, Gatineau et Laval.

Les salariés des municipalités bénéficient d’une rémunération globale 23 % plus élevée, en moyenne, que dans le secteur privé.

Selon Revenu Québec, 10 % des Québécois qui ont soumis une déclaration de revenus en 2021 gagnaient plus de 100 000 $.

Le DG au sommet

Au total, 7876 employés municipaux ont touché plus de 100 000 $ en 2022, année des dernières données disponibles. Il s’agit de 33 % des quelque 24 000 employés équivalent temps plein que comptait la Ville à ce moment.

M. Bourgoin a précisé que si l’ensemble des employés municipaux (y compris ceux à temps partiel) étaient pris en compte, ce ratio descendrait à environ 1 sur 4.

L’employé montréalais le mieux payé en 2022 demeure le directeur général, Serge Lamontagne, avec 345 000 $. Bien davantage que la mairesse de Montréal, qui a touché environ 212 000 $.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE

La mairesse de Montréal, Valérie Plante, et le directeur général de la Ville de Montréal, Serge Lamontagne

M. Lamontagne est toutefois suivi d’assez près par trois policiers anonymes qui ont frôlé les 300 000 $ de revenus. Il s’agit de lieutenants-détectives et de sergents-détectives, a indiqué la Ville.

Top 5 des employés les mieux payés en 2022 à la Ville de Montréal

  • 1. Serge Lamontagne, directeur général : 345 145 $
  • 2. Alain Dufort, DG adjoint : 313 601 $
  • 3. Diane Bouchard, DG adjointe : 304 632 $
  • 4. Policier non identifié : 299 524 $
  • 5. Policier non identifié : 293 009 $

Les rémunérations obtenues par l’entremise de notre demande d’accès à l’information excluent les contributions de l’employeur au régime de retraite et aux assurances collectives, mais incluent notamment les primes, les allocations et les heures supplémentaires.

Manque de main-d’œuvre policière

Une partie importante des 7876 employés municipaux qui ont gagné plus de 100 000 $ en 2022 sont des policiers du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM).

Lors de l’année 2022, dans un contexte de manque de main-d’œuvre au SPVM, plusieurs évènements ont fait en sorte que les policiers syndiqués ont dû effectuer plus d’heures supplémentaires.

Hugo Bourgoin, relationniste du service des communications de la Ville

Il a notamment souligné que la tenue de la COP15 et la multiplication des évènements impliquant des armes à feu en 2022 avaient obligé les policiers à travailler davantage et poussé nombre d’entre eux au-dessus de la barre des 100 000 $.

Le président de la Fraternité des policiers et policières de Montréal, Yves Francœur, a confirmé que ses membres avaient été très sollicités pour effectuer des heures supplémentaires, particulièrement pendant les fusillades de l’été 2022.

« Tous les soirs, j’avais une cinquantaine de duos pour les armes à feu qui étaient du monde en temps supplémentaire », se souvient-il. Les policiers du SPVM travaillent à 150 % de leur salaire pour le travail effectué juste avant ou juste après leur quart, mais à 200 % de leur salaire dans les autres cas.

Ces heures supplémentaires obligatoires ne peuvent toutefois pas expliquer que des policiers se retrouvent mieux payés que le chef du SPVM, a souligné M. Francœur.

« Quand on tombe dans ces montants-là, admettons plus de 200 000 $, ce sont des gens dont les circonstances personnelles leur permettent d’accepter de faire beaucoup de temps supplémentaire », a-t-il expliqué. Ceux-là « font un choix ».

« Les embauches de policiers effectuées en 2023 et celles prévues en 2024 devraient permettre au SPVM de se rapprocher du plein effectif d’ici la fin de l’année », a-t-il continué. De plus, le SPVM travaille sur « un plan de réduction des heures effectuées en temps supplémentaire » qui devrait permettre de réduire la facture « tout en ne compromettant pas la sécurité de la population ».

Ces données ne prennent pas en compte la conclusion de la nouvelle convention collective des policiers du SPVM, survenue au printemps dernier et incluant des augmentations de 19 % sur cinq ans.

Avec William Leclerc, La Presse