Avec plus de 1,5 million de passages au compteur en 2023, un record, le Réseau express vélo (REV) Saint-Denis continue à prendre de la vitesse. Et même chez les commerçants de l’artère, d’abord réfractaires, la piste cyclable fait de plus en plus d’adeptes.

C’est mercredi, en fin de journée, que le compteur du REV situé au coin de la rue des Carrières a officiellement franchi la barre symbolique des 1,5 million de déplacements, une première depuis son inauguration en novembre 2020.

Même si on est loin des 10 000 passages par jour observés en été, l’artère continue à attirer plus de 1500 cyclistes par jour malgré l’arrivée du temps froid et de la neige. Partout sur l’axe cyclable, les quatre compteurs montrent une hausse des déplacements, qui ont grimpé de 14 % dans la dernière année.

Durant les jours de la semaine, le REV Saint-Denis a enregistré en moyenne 4600 passages en 2023. Le reste du temps, surtout le week-end, le REV accueillait en moyenne 4300 passages sur une base quotidienne. « Ça montre que les gens l’utilisent pour aller au travail et à l’école. Ce n’est pas qu’une infrastructure de loisirs », explique le PDG de Vélo Québec, Jean-François Rheault.

« Quand on construit des infrastructures cyclables, on se fait souvent dire que c’est utilisé par un faible nombre, par une minorité de gens. Et les chiffres de ce matin, ça montre sans aucun doute que c’est largement utilisé et que, surtout, c’est de plus en plus utilisé », ajoute M. Rheault.

Tout ce qu’on voit en ce moment, ça légitime aussi les déplacements de cyclistes. Ça amène à élever la conversation autour du réaménagement d’espaces dans nos rues, à la rendre plus mature.

Jean-François Rheault, PDG de Vélo Québec

Des commerçants rendus ailleurs

À la Société de développement commercial (SDC) de la rue Saint-Denis, le directeur général Julien Vaillancourt Laliberté constate que depuis son implantation, en 2020, le REV n’est plus du tout perçu de la même manière par ses membres. « On est vraiment dans une phase après-REV où il n’y a plus vraiment de mécontents. Ça a permis un autre accès à notre artère et on le constate », soutient le gestionnaire.

Certaines discussions sont toutefois encore en cours pour optimiser la voie cyclable, confie-t-il, en saluant l’« ouverture » de l’arrondissement.

« On aimerait faire en sorte d’avoir une infrastructure qui fait que les gens s’arrêtent davantage rue Saint-Denis, [outre des supports à vélos]. Ça nous prend un système qui permet aux cyclistes de s’arrêter, de profiter de l’artère, au-delà du stationnement », explique M. Vaillancourt Laliberté en ce sens.

Actuellement, le taux d’occupation commerciale de la rue Saint-Denis est d’un peu plus de 84 %, soit beaucoup plus qu’avant l’arrivée du REV. « C’est un très bon taux, mais on ne peut pas comparer avec avant le REV, puisque notre rue était en chantier. La rue n’était pas ouverte. Notre meilleur taux, ça a été en décembre de l’année passée, avec 86 % », dit le DG à ce sujet.

Montréal veut accélérer le rythme

« On a beaucoup de demandes pour la suite, et pas seulement de la part des cyclistes. L’appétit est là. Et je pense que la vitrine qu’offre le REV Saint-Denis, ça a beaucoup d’impact. Les gens le voient bien, l’effet que ça a sur la rue », note la conseillère associée aux transports actifs au comité exécutif de la Ville, Marianne Giguère.

Jusqu’ici, on compte six axes existants du REV : Berri–Lajeunesse–Saint-Denis, Viger–Saint-Antoine–Saint-Jacques, Souligny, Peel, Bellechasse et Notre-Dame–parc de la Traversée. À court terme, d’ici 2027, la Ville compte en aménager quatre autres, sur les axes Côte-de-Liesse, Henri-Bourassa, Jean-Talon et Lacordaire.

Sur des artères comme la rue Jean-Talon Est, on discute actuellement avec la Ville pour se doter d’un REV, affirme Mme Giguère. « Dans Saint-Laurent, c’est la même chose : ils voient les bienfaits et en prendraient aussi. […] Après, c’est sûr que d’est en ouest, il y a plus d’intersections et les modèles de déplacement ne sont pas les mêmes, donc les défis sont différents », note-t-elle.

« Là, on travaille beaucoup sur Henri-Bourassa, qui avance par tronçons. Et c’est un peu les mêmes enjeux : on travaille à bien expliquer le projet, à rassurer les commerçants. Le cycle, c’est souvent comme ça : les gens ont de l’appréhension au début, c’est de la peur, c’est normal. Mais une fois que c’est implanté et adopté par les cyclistes, tout le monde commence à voir les beaux côtés », conclut la conseillère.

Sur X, jeudi, la mairesse Valérie Plante a quant à elle souligné l’atteinte de 1,5 million de déplacements en soutenant qu’« une ville qui fait place au vélo, c’est une ville plus équitable, en santé et sécuritaire ».