Robinets à sec, écoles fermées, hôpital à éviter : plus de la moitié de la population de Saint-Jean-sur-Richelieu est toujours privée d’eau courante après une rupture majeure de canalisation survenue lundi. La situation devrait durer au moins jusqu’en fin de journée ce jeudi, selon la mairesse, qui l’attribue à un possible problème de « vibration » lié à un chantier d’infrastructure.

« On n’avait jamais vu ça, une aussi grosse coupure d’eau », lance Jean-François Guilbault, au volant de sa voiture. Comme lui, quelque 56 000 personnes, vivant à 26 000 adresses, étaient toujours privées d’eau en fin de soirée mercredi. Plus de la moitié de la population totale de la municipalité est donc touchée.

La gravité de la situation a d’ailleurs forcé la Ville à déclencher l’état d’urgence local. Des points de distribution d’eau embouteillée ont rapidement été mis sur pied par la Ville au Carrefour Richelieu et au terminus d’autocars de la rue Boucher.

PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

La mairesse de Saint-Jean-sur-Richelieu, Andrée Bouchard

« Nous, tout ce qu’on a, c’est à peine un filet d’eau. Il n’y a plus rien qui marche dans la maison. On s’en va au restaurant et on espère que ça se rétablira rapidement. Ça fait longtemps qu’il y avait des travaux dans le coin. C’est comme si ça avait pété d’un coup », glisse M. Guilbault, qui salue toutefois le « travail incroyable » de la Ville dans les dernières heures.

Un peu plus loin, Daniel Labelle demeure optimiste malgré la situation. « On se lave à la mitaine au lieu de prendre notre bain et notre douche, mais sinon, on s’arrange. Il y a des choses pires que ça dans la vie, on va s’en sortir », lâche-t-il, le sourire aux lèvres.

Pas avant ce jeudi soir

Si tout se passe bien, la population devra attendre jusqu’en fin de journée, ce jeudi, pour retrouver son accès à l’eau. « Cela dit, quand tout le monde va avoir de l’eau, ça ne veut pas dire que chacun va avoir de la pression. Ça va se rétablir sur environ six à huit heures une fois que la réparation sera faite », a expliqué mercredi la mairesse Andrée Bouchard, en entrevue avec La Presse.

Plusieurs dizaines d’employés de la Ville s’affairaient alors, derrière elle, à distribuer des bouteilles d’eau aux centaines d’automobilistes faisant la file au Carrefour Richelieu, en plein centre-ville. Jusqu’à deux contenants de quatre litres d’eau potable par adresse étaient remis gratuitement.

« Depuis [mardi] après-midi, c’est non-stop », résume d’un trait André Marquis, du service des loisirs de la Ville. « Tous les services municipaux sont mis à contribution pour essayer de rendre ça le plus fluide possible », ajoute-t-il.

La rupture de canalisation s’est produite dans un chantier situé à l’intersection des rues Saint-Jacques et Caldwell, lundi. La conduite d’eau potable en cause a un diamètre de 75 centimètres et alimente les quartiers Saint-Luc, L’Acadie, Saint-Jean et l’île Sainte-Thérèse.

« On a déjà vécu le verglas et les inondations, alors on a un plan de mesures d’urgence qui est pas mal efficace. Et une rupture d’eau potable, même si ce n’était jamais arrivé, c’était prévu dans le plan, alors les services ont pu se mettre ensemble rapidement pour soutenir les citoyens », affirme Mme Bouchard.

Des travaux dans l’urgence

Une dizaine d’ouvriers s’affairaient toujours mercredi soir à réparer la canalisation. Une première tentative de réparation avait d’ailleurs échoué dans la journée. « On se sent tous un peu coupables malgré tout », a lancé l’un des ouvriers, même si tout indique qu’une erreur humaine n’est pas en cause. Certains travaillaient sans relâche depuis 50 heures pour réparer la conduite, selon la mairesse.

PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

Jusqu’à deux contenants de quatre litres d’eau potable par adresse étaient remis gratuitement mercredi aux résidants.

La pièce qui s’est rompue en était à la moitié de sa vie utile d’environ 120 ans. « Ce n’est pas un enjeu de vétusté. On pense plutôt que c’est un enjeu de vibration avec des travaux d’infrastructure qu’il y avait pas très loin. C’est un bête accident », affirme Andrée Bouchard.

Quatorze écoles demeureront fermées ce jeudi et vendredi en raison de « l’absence d’eau potable et [de] l’inaccessibilité des blocs sanitaires dans les milieux », a annoncé le centre de services scolaire des Hautes-Rivières dans un communiqué.

Peu avant, le CISSS de la Montérégie-Centre avait demandé à la population d’éviter les urgences de l’hôpital du Haut-Richelieu en raison de problèmes liés à la rupture de canalisation. La coupure d’eau affectait en effet les activités de l’établissement de santé.

« Nous actualisons notre plan de mesures d’urgence et nous déployons nos plans de contingence. Il y aura des variations dans nos services offerts », a expliqué par courriel une porte-parole du CISSS, Chantal Vallée.

Dans le boulevard du Séminaire, devant l’hôpital, de nombreux employés municipaux tentaient d’alimenter l’hôpital en eau par les bornes d’incendie. Comme les quantités demeuraient limitées, la garderie située à proximité ne savait pas encore, à ce moment, si elle pourrait rouvrir ses portes ce jeudi, le système de santé étant priorisé pour l’alimentation en eau.

PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

Plusieurs camions pompes-citernes ont été commandés par la Ville de Saint-Jean-sur-Richelieu.

Dans les autres installations du CISSS, les activités étaient maintenues. Certains services pourraient toutefois « être modulés différemment en fonction de la situation », a précisé Mme Vallée.

Plusieurs camions pompes-citernes ont été commandés par la Ville de Saint-Jean-sur-Richelieu. L’un d’eux, fourni par la Ville de Longueuil, est arrivé mercredi sur les lieux. « Peut-être que demain [ce jeudi], on invitera les gens à aller remplir directement leur bouteille », a conclu la mairesse Andrée Bouchard à ce sujet. Aux résidants des secteurs touchés qui continuaient de recevoir un très faible débit d’eau dans leurs robinets, elle recommandait de la bouillir avant consommation.

Avec Philippe Teisceira-Lessard, La Presse