Choquée par des dépenses qu’elle juge exagérées, l’opposition officielle à l’hôtel de ville de Montréal appelle la présidente du comité exécutif, Dominique Ollivier, à quitter ses fonctions. Mais cette dernière écarte cette possibilité en affirmant que ses débours à l’époque ont été faits « dans un autre type d’environnement de travail ».

En cause : les voyages et les repas au restaurant qu’elle a facturés à la Ville de Montréal entre 2014 et 2021, alors qu’elle dirigeait l’Office de consultation publique de Montréal (OCPM). Mme Ollivier a notamment facturé pour près de 18 000 $ en dépenses de restaurant en 4 ans, dont un repas d’huîtres à Paris pour 347 $ avec un collaborateur et ex-partenaire d’affaires, selon les médias de Québecor.

Aref Salem, chef d’Ensemble Montréal, estime que Mme Ollivier ne peut plus être la grande argentière de l’administration Plante.

« Aujourd’hui, on est rendus à un point où la confiance qu’on avait, elle n’est plus là, elle est épuisée. C’est pour ça qu’on demande à Mme Plante d’intervenir dans le dossier et de nommer une autre personne à la place de Mme Ollivier », a lancé M. Salem en entrevue téléphonique, lundi.

Elle n’a plus la crédibilité nécessaire pour être la gardienne des finances des contribuables montréalais.

Aref Salem, chef d’Ensemble Montréal

La mairesse de Montréal est effectivement intervenue, lundi, mais en épargnant largement Mme Ollivier.

« Bien que le Bureau de la vérificatrice générale de Montréal vérifie annuellement les dépenses de l’OCPM, nous lui demanderons d’effectuer un mandat spécifique pour réviser les pratiques et les encadrements de l’Office afin de faire toute la lumière sur la gestion de l’organisme », a indiqué la mairesse dans une déclaration écrite, en milieu d’après-midi. « La directrice générale actuelle, Mme Isabelle Beaulieu, sera aussi convoquée à la Commission de la présidence pour qu’elle rende compte de sa gestion. »

Dominique Ollivier se défend

Depuis quelques jours, Le Journal de Montréal révèle les détails des allocations de dépenses à l’OCPM, une petite organisation municipale dont les dirigeants se réunissaient fréquemment dans des restaurants haut de gamme et multipliaient les missions à l’étranger coûteuses, à même les fonds publics.

Selon le quotidien, une mission en Afrique a notamment coûté 23 000 $ aux contribuables. Le restaurant Chez Alexandre, rue Peel, a accueilli des dizaines de réunions entre cadres de l’Office.

Interpellée lundi soir en marge de la séance du conseil d’arrondissement de Rosemont–La Petite-Patrie, où elle siège également, Dominique Ollivier a défendu ses dépenses à l’époque où elle était présidente de l’OCPM.

Dans la période prépandémie, et les gens ont tendance à l’oublier beaucoup maintenant, [mais] on n’est pas dans le même monde que celui où on vit maintenant. Les réunions Zoom, ça n’existe pratiquement pas, les gens se déplacent, les gens se rencontrent physiquement.

Dominique Olliver, présidente du comité exécutif de la Ville de Montréal

Selon elle, l’administration actuelle de l’OCPM doit toutefois « répondre de ses choix ». C’est pourquoi elle juge pertinent de revoir les façons de faire de l’organisation. « Les gens connaissent mon intégrité, ma rigueur et mon souci », réplique-t-elle lorsque questionnée à savoir si les récentes révélations pourraient nuire à son image de grande argentière de l’administration municipale.

« Dominique Ollivier est une femme extrêmement professionnelle et rigoureuse en qui j’ai pleinement confiance dans le rôle de présidente du comité exécutif », a ajouté la mairesse Valérie Plante, fermant totalement la porte à la demande de démission de l’opposition. « C’est une femme de cœur et de tête, qui est dévouée à sa mission de faire de Montréal une ville plus juste et équitable. »

Les voyages suspendus

En milieu d’après-midi, lundi, la successeure de Mme Ollivier à la tête de l’OCPM a annoncé qu’elle suspendait temporairement les voyages au sein de l’organisation.

« Nous commençons une révision complète de notre processus lié à la représentation de notre organisation, de nos règles et de nos pratiques », a indiqué Isabelle Beaulieu dans une lettre mise en ligne sur le site internet de l’organisme. « En attendant cette révision, je vais suspendre temporairement tous les voyages et renforcer la surveillance de nos activités de représentation, afin d’assurer l’utilisation judicieuse des fonds alloués à l’OCPM. »

Mme Beaulieu n’est pas seulement la successeure de Mme Ollivier à la tête de l’OCPM. Elle a aussi racheté, en 2018, une firme de communication créée par l’élue. Le propriétaire de l’entreprise à l’époque, Guy Grenier, est maintenant son bras droit à l’Office. Ces faits ont d’abord été révélés par Le Journal de Montréal.

Déjà éclaboussée par des allégations sur ses méthodes de gestion, Mme Beaulieu n’entend toutefois pas quitter son poste.

« Nommée en février 2022 par le conseil municipal, après un processus rigoureux, je suis devenue présidente de l’OCPM, a affirmé Mme Beaulieu. J’entends poursuivre le travail. »

En fin de journée, la ministre des Affaires municipales s’est engagée à effectuer des modifications législatives – en cas de besoin – pour empêcher qu’une telle situation se reproduise.

« J’ai été troublée par les faits rapportés lors de l’émission J.E. concernant l’Office de consultation publique de Montréal, a indiqué Andrée Laforest dans une déclaration écrite. Il s’agit d’une situation préoccupante, Mme Beaulieu et M. Grenier doivent s’expliquer. »