Des files d’attente en voiture ou en autobus aux délais d’attente à la douane, les embûches s’accumulent à l’aéroport Montréal-Trudeau. Et le pire est probablement à venir, puisque des travaux majeurs doivent avoir lieu pour augmenter la capacité du débarcadère. Zoom sur les défis immenses qui attendent l’aéroport dans les prochaines années.

En auto, l’attente se multiplie

Aéroports de Montréal (ADM) en convient : la situation « est loin d’être idéale » pour les automobilistes, qui doivent parfois patienter plus d’une heure pour accéder au quai des arrivées. Des mesures temporaires ont été prises, comme l’ajout de personnel et l’ouverture d’un troisième stationnement d’attente, mais « visiblement, ces mesures ne sont pas satisfaisantes », avoue la porte-parole d’ADM, Anne-Sophie Hamel. Un nouveau stationnement étagé doit ouvrir au début de 2024, avec la possibilité d’un débarcadère éloigné. Mais le vrai enjeu, « ça va être l’augmentation de la capacité du débarcadère », note-t-elle. « Un plan va être dévoilé prochainement, mais on parle de chantiers majeurs qui vont demander plusieurs mesures d’atténuation. »

L’explosion du nombre de voyageurs

30 %. C’est la hausse d’achalandage au deuxième trimestre à l’aéroport Montréal-Trudeau par rapport à avant la pandémie. Les mois printaniers sont ceux qui ont vu la plus importante hausse de passagers en comparaison de 2019. Quelque 1,7 million de personnes ont emprunté l’aéroport en mai et 2 millions en juin, a-t-on appris dans le plus récent bilan annuel d’ADM. « La reprise est arrivée beaucoup plus rapidement que ce qu’on avait prévu. On prévoyait une reprise du trafic en 2025, mais déjà, on est au-delà des volumes de 2019 », indique Mme Hamel, en précisant que cette augmentation devrait se poursuivre dans les prochaines années si on se fie aux prévisions de l’industrie.

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Le 747 surchargé

Ce retour en force des voyageurs surcharge aussi la ligne d’autobus 747, qui fait le lien vers le centre-ville, avec des files d’attente de plus en plus longues. Un groupe de travail mis sur pied par la Société de transport de Montréal (STM) doit bientôt rendre ses recommandations pour optimiser la desserte. Déjà, on évoque l’ajout de distributrices de titres, d’un terminal de point de vente mobile ou encore la vente de titres en concession. Des mesures en ce sens devraient arriver à compter « de la semaine prochaine », selon la porte-parole de la STM, Amélie Régis. Entre cinq et six voyages quotidiens ont aussi été ajoutés ces derniers jours sur la ligne 747 pour soutenir la hausse d’achalandage.

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Autobus 747 de la STM

Les délais d’attente augmentent aussi à la douane

L’attente à la douane augmente aussi depuis quelques semaines, pour atteindre parfois plus de 60 minutes. ADM montre du doigt le fait que les demandeurs d’asile transitent maintenant par l’aéroport alors que les installations ont été conçues pour des voyageurs. À l’Agence des services frontaliers (ASFC), la porte-parole Maria Ladouceur soutient que « la capacité de la salle d’arrivée est utilisée au maximum ». En moyenne, entre 30 et 35 agents sont affectés au centre de correspondance des voyageurs, en plus de 13 guichets à l’immigration. « Les délais d’attente sont habituellement causés par une convergence de vols internationaux », précise Mme Ladouceur. L’ASFC a constaté « une augmentation du nombre de demandes d’asile », surtout en provenance du Mexique, de l’Inde, du Kenya, du Congo et du Nigeria.

Un chantier « chaotique » à venir

Selon l’expert en planification des transports à l’Université de Montréal, Pierre Barrieau, « le pire est à venir » à l’aéroport. « Refaire l’entrée, dans les faits, ça veut dire démolir la structure et la refaire à neuf. Il faudra probablement fermer les deux voies en même temps. Ça va être très intense, encore plus chaotique que ce ne l’est déjà », prévient-il. Selon lui, l’aéroport a « frappé un mur ». « La réalité est que le débarcadère est devenu trop court pour la demande. Le REM va aider d’ici quelques années, mais en même temps, il ne soutiendra que peut-être un ou deux ans de croissance. C’est toute l’interface de l’aéroport qu’il faut repenser », ajoute le spécialiste.

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Des besoins financiers importants

Dès novembre 2021, l’ancien PDG d’ADM, Philippe Rainville, qui a depuis laissé sa place à Yves Beauchamp, avait prévenu qu’il faudrait injecter beaucoup d’argent dans l’aéroport Trudeau au retour de la pandémie. À l’époque, M. Rainville parlait de « quelques milliards » pour se refaire une santé financière. Jusqu’ici, ADM a touché 170 millions d’Ottawa, dont 100 millions pour le REM, qui coûtera 600 millions à construire d’ici 2027. Son impact sera immédiat, mais le REM risque toutefois de faire perdre jusqu’à 10 millions en revenus de stationnement. La dette nette d’ADM demeure de 2,27 milliards.

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Poignées d’un wagon du REM

Les taxis illégaux

Le phénomène s’améliore depuis que Québec impose des amendes allant jusqu’à 50 000 $, mais les « taxis illégaux » sont encore bel et bien présents à l’aéroport Montréal-Trudeau. Depuis juin, ADM doit d’ailleurs tenir sur ordre de Québec un « registre des autorisations délivrées » en plus d’augmenter le nombre d’inspecteurs pour mettre fin à ces taxis non réglementaires, dont les chauffeurs sont parfois harcelants, ou encore cherchent à frauder l’usager en augmentant le prix de façon arbitraire. Tourisme Montréal s’était inquiété dans la foulée d’un « enjeu réputationnel » pour Montréal. « L’accueil, c’est le facteur numéro un du retour d’un visiteur dans une destination », avait illustré la porte-parole du groupe, Aurélie de Blois.

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Les « taxis illégaux » sont encore bel et bien présents à l’aéroport Montréal-Trudeau.

En savoir plus
  • 114
    Depuis le début septembre, 114 demandeurs d’asile atterrisent quotidiennement à Montréal en moyenne. Ce chiffre était de 30 en janvier. La hausse est constante depuis plusieurs mois. En juin, on accueillait 85 demandeurs d’asile chaque jour.