Le principal accès au sommet du mont Royal, la voie Camillien-Houde, sera interdit aux véhicules en 2027, a confirmé mercredi Valérie Plante. Le chemin Remembrance deviendra la seule façon d’accéder à la montagne en auto ou en bus.

Ce qu’il faut savoir

L’administration Plante prévoit transformer la voie Camillien-Houde en chemin cycliste et piétonnier, accessible seulement au véhicules d’urgence, en 2027.

Selon les plus récentes données, 10 000 automobilistes y circulent chaque jour.

L’accès à la montagne en auto et en transports en commun serait seulement possible via le chemin Remembrance.

Confirmant des informations publiées par La Presse, la mairesse a dévoilé un projet de réaménagement total de cette artère, où quelque 10 000 automobilistes roulent chaque jour.

À la place de la route actuelle, « on va créer une grande promenade pour les piétons avec un chemin parallèle et séparé pour les cyclistes », a affirmé Mme Plante, évoquant un « verdissement massif » de l’artère. « On fait preuve de courage. »

Les véhicules d’urgence pourront circuler, mais pas les automobiles. Celles-ci devront utiliser le chemin Remembrance, sur l’autre versant de la montagne, dans l’arrondissement de Côte-des-Neiges–Notre-Dame-de-Grâce. Les autobus de la Société de transport de Montréal (STM) aussi.

« Nous prenons notre responsabilité et posons les gestes concrets et ambitieux qui sont attendus de nous pour répondre aux défis de notre époque et aux besoins des générations futures, a dit la mairesse. La montagne ne sera plus un raccourci, mais elle restera une destination de calibre international. »

« Au cœur de la vision qu’on vous présente aujourd’hui s’inscrit la sécurité des plus vulnérables : les piétons et les cyclistes », a ajouté Mme Plante.

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, ARCHIVES LA PRESSE

Valérie Plante, mairesse de Montréal

La montagne, elle appartient à tout le monde. À tous les Montréalais et à toutes les Montréalaises.

Valérie Plante, mairesse de Montréal

La mairesse a reconnu qu’un rapport de l’Office de consultation publique de Montréal (OCPM) recommandait en 2019 le maintien de la circulation automobile sur Camillien-Houde, mais a fait valoir que la situation climatique avait changé en quatre ans, avec une urgence plus imminente que jamais.

La décision survient après des années de tergiversations sur l’avenir du principal accès au mont Royal, entre préoccupations pour l’écologie, la sécurité et l’accessibilité.

Par le passé, Valérie Plante s’est souvent montrée ouverte au réaménagement de la voie Camillien-Houde, où la mort de Clément Ouimet, jeune cycliste de 18 ans, lors d’une collision avec un automobiliste avait marqué les esprits en 2017. Un autre cycliste est mort au pied de la côte en 2021.

Deux ans plus tard, après un projet pilote bloquant la circulation de transit, la mairesse avait fait valoir que le statu quo n’était « plus envisageable ».

Un enjeu clivant

La mairesse de Montréal s’était entourée de nombreux supporters de son projet pour l’annonce de mercredi après-midi.

La directrice de santé publique de Montréal, Mylène Drouin, a salué un plan « audacieux, mais bien réfléchi ». « Je pense que c’est un geste courageux », a-t-elle dit, soulignant avoir procédé à un calcul coûts/bénéfices d’une telle interdiction. « On s’en va dans la bonne direction quand on a ce genre de projets. »

Six grandes organisations écologiques – dont Équiterre, Vélo Québec et le Conseil régional de l’environnement de Montréal – se sont aussi réjouies. Ces groupes « saluent le courage et la cohérence de la Ville de Montréal et soulignent que cette décision permettra d’améliorer la protection de la biodiversité en augmentant la canopée et répondra à l’urgence des changements climatiques et l’érosion de la nature, tout en améliorant l’expérience sur la montagne », ont-ils indiqué.

D’autres étaient beaucoup moins enthousiastes.

« On est en train de décourager les gens d’utiliser la montagne », a déploré Aref Salem, chef de l’opposition officielle à l’hôtel de ville. Il a souligné à plusieurs reprises que l’OCPM avait recommandé en 2019 le maintien de la circulation automobile sur la voie Camillien-Houde, dans un cadre plus sécuritaire.

En y interdisant les véhicules, « on est en train de créer des bouchons ailleurs. On est en train de créer de l’insécurité dans d’autres quartiers. On a juste à penser au quartier Côte-des-Neiges », a-t-il dit.

PHOTO PHILIPPE BOIVIN, ARCHIVES LA PRESSE

Aref Salem, chef de l’opposition officielle à l’hôtel de ville de Montréal

La montagne doit être accessible aux citoyens de Montréal. Il y a certainement une partie de cette population qui va trouver ça difficile, l’accès. Elle est inquiète aujourd’hui. On est un peu les porte-parole de cette population.

Aref Salem, chef de l’opposition officielle à l’hôtel de ville de Montréal

Le Cimetière Mont-Royal occupe un versant du mont Royal depuis 171 ans. Son directeur général accueille l’annonce de mercredi avec beaucoup de scepticisme.

« On aurait souhaité que l’administration Plante ne fasse pas fi de la consultation publique qui avait été faite en 2019, qui suggérait de continuer avec la coexistence du transport en commun, des véhicules, des vélos et des piétons », a affirmé Maxime Jacques, en entrevue téléphonique. « On est très inquiets. »

M. Jacques a souligné qu’il craignait particulièrement que des automobilistes n’utilisent les chemins du cimetière pour redescendre la montagne, une fois arrivés au sommet.

Les pompiers rassurés

À la fin d’août, La Presse a révélé que l’administration Plante avait demandé aux pompiers de Montréal leur avis sur la possibilité de fermer complètement la route aux véhicules. Le SIM affirmait alors privilégier le statu quo.

Mercredi, le chef du service a fait valoir que le travail continuait pour préciser les modalités d’accès des véhicules d’urgence au nouveau chemin, mais qu’il était rassuré par le nouveau plan mis de l’avant par l’administration. « On travaille pour développer une vision sécuritaire », a dit Richard Liebmann.

Au printemps dernier, le conseil municipal a voté un emprunt de 45 millions pour financer la conception et la réalisation des travaux de réaménagement de la voie Camillien-Houde et du chemin Remembrance, à effectuer d’ici 2026.

Les documents remis aux élus avant le vote ne soufflaient toutefois pas mot de la possibilité de fermer complètement la voie Camillien-Houde aux voitures – la responsable de la mobilité au sein de l’administration Plante évoquait simplement une « proposition fort emballante ».

Le mois suivant, la mairesse Valérie Plante avait déploré que le projet soit plus lent que prévu à voir le jour. Elle s’exprimait alors qu’un cousin de Clément Ouimet venait d’être lui-même victime d’un automobiliste ayant perdu la maîtrise de son véhicule. Il n’a pas été gravement blessé.