Un aide-animateur du camp de jour de Relance des Loisirs Tout 9 (RDLT9), dans le Plateau Mont-Royal, a failli se noyer à la piscine du parc Sir-Wilfrid-Laurier la semaine dernière. Retiré inconscient du fond de l’eau, il s’en est remis, mais la piscine réserve désormais sa section la plus profonde aux utilisateurs du plongeoir.

« Je voyais un peu comme une tache dans le fond. Il était couché à peu près à côté du drain », raconte Philippe Grégoire-Bergevin en désignant la zone où, du haut de sa chaise de sauveteur, il a aperçu le corps inanimé d’un adolescent.

« C’est vraiment instinctivement, j’ai été le chercher. J’aurais pu me tromper, mais j’ai bien fait d’y aller. »

Les jeudis après-midi se suivent et ne se ressemblent pas, à la piscine Laurier. Désert lors de notre passage cette semaine, l’espace était très achalandé le 20 juillet, avec 250 baigneurs, beaucoup provenant de camps de jour.

L’aide-animateur bénévole, dont RDLT9 a refusé de révéler le nom parce qu’il s’agit d’un mineur, se déplaçait dans la piscine avec des jeunes du camp de jour.

« Du côté du camp, on nous informe que l’aide-animateur savait nager. On ne sait toutefois pas exactement ce qui l’a mené à perdre conscience et à couler. […] Le jeune n’a aucun souvenir de l’incident », a indiqué la porte-parole de l’arrondissement, Geneviève Allard, par courriel.

L’adolescent était inconscient à sa sortie de l’eau.

Pendant que je le tenais, mon collègue a pris son pouls. Au début, on n’avait pas de pouls.

Philippe Grégoire-Bergevin, sauveteur

Le pouls s’est heureusement manifesté après quelques secondes, permettant d’éviter les manœuvres de réanimation.

Le jeune, qui avait finalement passé « moins d’une minute sous l’eau », a été transporté en ambulance à l’hôpital, où il est resté quelques jours, a indiqué Mme Allard.

La victime reconnaissante

Au moment de cette quasi-noyade, quatre chaises de sauveteurs étaient occupées, et d’autres sauveteurs en congé étaient présents. Ils ont donc été nombreux à participer à l’opération. Le jeune miraculé est d’ailleurs revenu les saluer mercredi.

PHOTO JOSIE DESMARAIS, LA PRESSE

L’équipe de sauveteurs de la piscine du parc Sir-Wilfrid-Laurier qui sont intervenus pour porter assistance à la victime, évacuer la piscine et la pataugeoire, et appeler les secours.

« J’avoue que ça m’a vraiment fait chaud au cœur, parce que la dernière fois que je l’ai vu, il n’était pas dans une très bonne posture », témoigne M. Grégoire-Bergevin.

« Il m’a dit merci, je lui ai dit que c’était normal. Il m’a remis une petite carte. »

L’aide-animateur est même retourné dans la piscine avec son groupe cet après-midi-là.

Pour réduire l’achalandage dans la section profonde de la piscine Laurier et en faciliter la surveillance, celle-ci est maintenant utilisée uniquement comme zone de tremplin, « comme c’était le cas avant la pandémie », note Mme Allard.

Une rencontre a aussi été organisée avec la Société de sauvetage.

« Quand on rencontre les sauveteurs post-évènement, ça nous permet de nous demander s’il y a des éléments de notre formation qu’on devrait revoir, et aussi d’appuyer les sauveteurs dans leur démarche post-trauma », explique le directeur général de l’organisme, Raynald Hawkins.

PHOTO CATHERINE LEFEBVRE, COLLABORATION SPÉCIALE

Le directeur général de la Société de sauvetage, Raynald Hawkins

Celui qui travaille depuis près de 40 ans avec la Société de sauvetage ne se souvient pas d’autres noyades impliquant un moniteur de camp de jour. Mais ce drame évité de justesse l’interpelle.

On recommande que les sauveteurs qui accueillent des enfants des camps de jour puissent identifier ceux et celles qui ont besoin d’une veste de flottaison. On pourrait aller aussi dans ce sens pour ceux et celles qui les accompagnent.

Raynald Hawkins, directeur général de la Société de sauvetage

L’identification se fait à l’aide d’un court test de nage, où le baigneur doit démontrer des aptitudes minimales : se maintenir à la surface pendant 30 secondes et se déplacer sur une distance d’au moins 25 mètres, par exemple.

À l’arrondissement, on dit avoir déjà commencé à faire passer des tests de nage aux moniteurs des camps de jour. « On leur demande d’ailleurs de montrer l’exemple à leurs groupes », mentionne Mme Allard.

Des incidents qui ne sont pas documentés

RDLT9 a refusé de commenter l’évènement, nous renvoyant à l’arrondissement. « On aurait changé quelque chose s’il y avait eu une faute, mais [d’après] nos discussions avec la piscine, il n’y a pas de faute, c’est un malencontreux accident », a indiqué le directeur adjoint de l’organisme, Jonathan Villemus, au téléphone.

Chaque année, une vingtaine de personnes sont hospitalisées pour une noyade non mortelle dans un bain public ou une piscine résidentielle, montrent les données de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) pour la période de 2011-2012 à 2020-2021. Mais contrairement aux noyades mortelles, qui font l’objet de rapports du coroner, les circonstances des quasi-noyades ne sont pas toujours documentées.

« Quand arrive ce genre d’incident, et heureusement c’est non mortel, ça devient une information importante pour nous », souligne M. Hawkins. « À partir du moment où on me présente qu’il y a peut-être là un risque par rapport aux moniteurs de camps de jour ou aux adultes, forcément, ma recommandation, c’est valider [les aptitudes à la nage]. Je ne veux pas que ça se reproduise. »