La saga judiciaire entre Ray-Mont Logistiques et la Ville de Montréal se poursuit. L’entreprise, qui opère depuis six mois un terminal de conteneurs dans Hochelaga, s’adresse de nouveau aux tribunaux pour bloquer un règlement de municipalité ayant pour effet de « nuire, voire empêcher » ses activités.

« Alors que dans les dernières années, la Ville s’est appuyée, sans succès, sur sa réglementation entourant le zonage et les usages, aujourd’hui, la Ville tente de s’appuyer sur une modification de sa réglementation entourant le bruit et les nuisances afin de nuire voire empêcher les activités », écrit le groupe Ray-Mont Logistiques dans une demande de contrôle judiciaire consultée par La Presse mercredi.

Essentiellement, l’entreprise accuse la Ville d’avoir imposé des normes « déraisonnables, discriminatoires et abusives » qui viseraient à « prohiber ou rendre impossible » l’exploitation du terminal de conteneurs, dans un changement récent au Règlement sur les bruits et les nuisances de l’arrondissement de Mercier–Hochelaga-Maisonneuve qui a été adopté au début du mois de mai.

Ray-Mont Logistiques déplore notamment la volonté de l’arrondissement d’interdire « le chargement et déchargement de conteneurs effectué à moins de 100 m d’un terrain comportant un lieu habité », une directive qui « va à l’encontre des usages autorisés » sur son terrain.

Dans son règlement, l’arrondissement stipule que tout exploitant industriel devra « démontrer qu’aucune vibration et qu’aucune émission d’odeur, de poussière, de bruit, de vapeur, de gaz ne sont perceptibles hors des limites du terrain ». Pour Ray-Mont Logistiques, cette norme serait « impossible à respecter », d’autant plus qu’elle « va à l’encontre de la description des usages dans le règlement de zonage ».

Les manœuvres de chargement et de déchargement de conteneurs par tout type de véhicule seraient aussi dorénavant « interdites entre 22 h et 6 h » selon le règlement, ce qui rendrait les activités du terminal de conteneurs « inopérables » pendant « une grande partie de la journée », accuse Ray-Mont Logistiques.

« Inacceptable », rétorque Montréal

Appelé à réagir, le maire de Mercier–Hochelaga-Maisonneuve et membre du parti de la mairesse, Pierre Lessard-Blais, a soutenu mercredi « qu’il est inacceptable qu’une entreprise cherche à abolir les règlements qui protègent la population contre le bruit, la poussière et les îlots de chaleur ». « La sécurité et le bien-être de la population doivent primer sur les intérêts financiers d’une entreprise. Comme les autres entreprises du secteur, il est temps que Ray-Mont Logistiques assume ses responsabilités et respecte le quartier dans lequel il déménage », a-t-il martelé.

« Déraisonnable, discriminatoire et abusif. : des mots qui définissent bien le projet que [le promoteur] tente lui-même de forcer avec le Port de Montréal contre les citoyens de l’est », a de son côté réagi l’organisme Mobilisation 6600, qui milite contre le projet. Sa porte-parole, Anais Houde, déplore que l’entreprise tente d’utiliser sa poursuite contre la Ville « pour exiger des avantages qui nuiront grandement à la santé et l’environnement de la population ».

L’entreprise, elle, a dit mercredi avoir accueilli « avec surprise et déception » l’adoption « en catimini et sans consultation » du règlement de l’arrondissement. « En tentant d’interdire par règlement des opérations clairement permises par notre zonage, l’arrondissement fait fi des décisions de la Cour supérieure et de la Cour d’appel du Québec qui ont confirmé la légalité de nos activités », martèle-t-elle.

Mme Plante et son équipe s’étaient opposées dès 2016 à l’implantation du projet de Ray-Mont Logistiques, en refusant de délivrer les permis requis. Mais la justice avait finalement donné raison à l’entreprise : le terrain – une ancienne aciérie – pourrait être développé en projet industriel. L’administration avait alors indiqué qu’elle respecterait le jugement.

En savoir plus
  • Un tiers de milliard
    Le groupe du promoteur Charles Raymond poursuit déjà la Ville pour un tiers de milliard de dollars en raison du retard infligé à la construction. Les travaux sur le site ont finalement commencé en mars 2022, et le site opère depuis le mois de novembre dernier. Ray-Mont Logistiques avait d’abord acquis les terrains de l’ancienne fonderie Canadian Steel, entre les rues Hochelaga et Notre-Dame, en 2016.