Nous sommes à Montréal, en 2021. Tous les locataires ont été évincés de ces deux immeubles, avec des dédommagements qui varient selon la tête du client. Tous ? Non ! Deux irréductibles Gaulois résistent, encore et toujours, aux assauts des rénovictions qui ont vidé leurs immeubles respectifs. Portrait d’un fléau qui gangrène de nombreux quartiers de Montréal. Et de ceux qui lui résistent.

Seuls dans leur immeuble

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Julien Stout arpente les couloirs de l’immeuble duquel il est désormais le seul locataire.

L’appartement de Julien Stout est très loin d’être un palace. Le deux et demie au plancher de bois usé est minuscule. Dehors, les balcons étroits tombent en ruine. À l’intérieur, il y a des « coquerelles ». D’autres locataires, dans l’immeuble, ont eu des souris ou des punaises. « On a eu les sept plaies d’Égypte », résume le docteur en littérature, qui amorce une carrière en enseignement.

Non, l’appartement de M. Stout n’est pas un palace. Mais à 650 $, chauffage inclus, le logement a une qualité rare, ces jours-ci, à Montréal. Il n’est pas cher. Et c’est pourquoi Julien Stout résiste. Il faut dire qu’il commence à avoir de l’expérience : depuis 2018, il en est à sa seconde éviction. « La première fois, je me suis fait avoir. Cette fois-ci, je connaissais mieux mes droits. »

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L’appartement de Julien Stout

Le 185, Beaubien Est, c’est un immeuble décrépit de 20 logements, où une faune bigarrée habitait. Des jeunes, des immigrants récents, des toxicomanes, et aussi des gens qui, comme Julien et sa voisine Ninon Fajolles, n’avaient pas beaucoup d’argent à consacrer au loyer. Mme Fajolles bénéficie pourtant d’un revenu qui tourne autour du salaire moyen au Québec, mais elle vit seule.

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Ninon Fajolles, dans son nouvel appartement de la Petite Italie

C’est impossible pour moi de payer un appartement à 1200 $.

Ninon Fajolles, locataire du 185, Beaubien Est

La plupart d’entre eux sont partis dès le premier avis — verbal — de la part du conjoint de la nouvelle propriétaire, Franco Tangorra. Ce dernier a fait le tour des locataires en novembre dernier, les avertissant qu’ils devaient partir parce que des travaux majeurs allaient se dérouler dans l’immeuble.

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Julien Stout

Il venait voir les locataires qui refusaient. […] Il disait que ça allait être la guerre.

Julien Stout, locataire du 185, Beaubien Est

Après ce premier avis de M. Tangorra, la plupart des locataires, peu au fait de leurs droits, sont partis sans être indemnisés, dit Julien Stout. D’autres ont obtenu des miettes : 1000 ou 2000 $. « En trois semaines, à mon étage, tout le monde était parti », témoigne Ninon Fajolles.

Quatre locataires ont refusé de s’en aller. Ils se sont rendus au Tribunal administratif du logement en contestant le motif de l’éviction, pour « agrandissement et subdivision ». Ils se sont défendus eux-mêmes, avec l’aide du comité logement de La Petite-Patrie. Pendant le processus, les locataires ont appris que les propriétaires, contrairement à ce qu’ils avaient toujours prétendu, ne détenaient pas de permis pour rénover l’immeuble. Les quatre résistants ont gagné. Le TAL a rejeté les évictions.

Agrandissement et subdivision, « il s’agit de deux notions contradictoires », souligne la juge Sarah Croteau dans son avis rendu en février dernier. L’avis doit être « suffisamment précis pour que le locataire soit en mesure d’apprécier pleinement les intentions de la locatrice », et à l’évidence, le document envoyé par Mme Carciero « ne rencontre pas cette exigence ». Nous avons joint la propriétaire du 185, Beaubien Est, Adèle Carciero. Après discussion avec son avocat, elle a décliné notre demande d’entrevue.

Appuyés sur ce jugement clair, trois des quatre locataires ont négocié des dédommagements nettement plus élevés. On ne peut les révéler, car les ententes sont couvertes par une clause de confidentialité. Ils sont partis. Seul Julien Stout a refusé. Et il est devenu l’irréductible Gaulois de son immeuble.

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Julien Stout est devenu l’irréductible Gaulois de son immeuble.

« L’immeuble se trouvait dans un état délabré et insalubre et celui-ci avait besoin d’une transformation majeure pour le remettre en état. L’immeuble ne fait donc pas l’objet d’une simple rénovation, mais plutôt d’une transformation, plaide l’avocat d’Adèle Carciero, Anthony Giammaria, qui a répondu à nos questions par courriel. Notre cliente a agi en tout temps de bonne foi, selon les lois en vigueur, et a respecté à la lettre le processus dicté par celles-ci. » La décision du TAL, souligne-t-il, a d’ailleurs été portée en appel devant la Cour du Québec. Les locataires qui sont partis ont reçu une compensation « substantielle », précise-t-il.

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Le 185, Beaubien Est compte 20 logements.

Mais malgré cette compensation, l’éviction va lui coûter cher, témoigne Ninon Fajolles. Elle versait 680 $, électricité comprise, pour son trois pièces et demie de la rue Beaubien. Elle paie désormais 800 $, électricité non comprise, pour son nouvel appartement de même taille dans la Petite Italie.

Retournera-t-elle au 185, Beaubien Est une fois les travaux terminés, comme la loi l’y autorise ? « Je voudrais revenir au prix légal, mais le propriétaire m’a dit qu’il n’en était pas question. Avec le nouveau loyer, ça va être largement au-dessus de mes moyens. »

Autre quartier, autre Gaulois

Déplaçons-nous maintenant dans un autre secteur de Montréal, situé dans le sud-ouest de l’île. Nous restons vague afin de ne pas identifier notre second Gaulois, que nous appellerons Daniel B. L’homme de 49 ans craint les représailles de son propriétaire s’il témoigne de sa situation à visage découvert.

Si le 185, Beaubien Est est au début d’un processus de rénovation majeur, l’immeuble de Daniel B., lui, est à la toute fin des travaux. Pendant des mois, M. B. a été le seul auditeur d’un concert de scies rondes et de marteaux. Les ouvriers ont complètement refait l’immeuble de six logements. Et ces rénovations étaient plus que nécessaires, convient Daniel B. : l’immeuble était, ni plus ni moins, un taudis. Il y avait des souris, et certains appartements étaient si mal isolés que la neige y pénétrait en hiver.

Un immeuble délabré qui appartenait au même propriétaire depuis 2004. Un propriétaire qui non seulement n’a pas entretenu l’immeuble, mais qui a également laissé vacants tous les logements qui se libéraient au fil des ans. « Il savait très bien qu’un immeuble vide, ça vaut de l’or : il enlevait du travail au futur propriétaire », résume Daniel B. À la fin, M. B. était seul avec sa voisine dans l’immeuble. Il paie 405 $ par mois pour son quatre et demie, qu’il habite depuis maintenant 20 ans.

Et que fait ce propriétaire dans la vie ? Il est inspecteur au Service d’inspection et prévention de la Ville de Montréal. En d’autres termes, il est chargé de sanctionner… les propriétaires de logements insalubres. Nous avons demandé à la Ville de Montréal de commenter cette situation. Il ne travaille plus pour la Ville de Montréal, nous répond la porte-parole Audrey Gauthier. Elle indique que la Ville a été « mise au courant de la situation » en octobre 2020 et qu’elle a « fait un suivi » auprès de son employé.

Ce propriétaire avait payé l’immeuble 190 000 $ en 2004. En 2020, il est revendu un peu plus de 1 million à deux promoteurs qui détiennent 15 immeubles de logements, presque tous situés dans ce même quartier du Sud-Ouest. Rapidement, les deux propriétaires visitent les deux locataires qui restent. « Vous allez devoir déménager. On vous donne trois semaines pour partir », indiquent les deux nouveaux propriétaires.

Il était très intimidant. Il nous pressait de partir. En plein hiver. Et pendant la pandémie ! Il a fini par dire qu’il allait nous couper l’électricité. C’est des terroristes, ce monde-là. Ils font tout pour que tu partes !

Daniel B., un locataire du sud-ouest de Montréal ayant requis l’anonymat

Sa voisine, âgée de 76 ans et affectée par un important problème de santé, témoigne que la situation lui a fait vivre l’enfer. « Quand il m’a contactée, en février, il m’a dit : « Vous devez partir d’ici, très vite. » Je pleurais. J’étais sous le choc. Je suis une personne malade. Je ne suis pas capable de me faire brasser comme ça. Je ne dormais plus tellement j’étais inquiète. »

Après avoir consulté le comité logement de son quartier, elle se rend compte qu’elle a droit à un dédommagement. Après avoir négocié, elle obtient 4000 $. Elle a depuis quitté Montréal. Impossible pour elle de trouver un appartement à un prix raisonnable dans la métropole, dit-elle. « Moi, j’ai juste une petite retraite. Je ne sais pas comment les gens font pour payer ces prix-là. »

À Daniel B., le propriétaire a aussi offert une compensation, qui a grimpé au fil des négociations jusqu’à un montant de plusieurs milliers de dollars. Daniel B. a toujours refusé. Pourquoi ? « J’ai regardé le prix des logements. Un logement à 1000 $, c’est 20 000 $ de plus pour moi sur trois ans. Je lui ai dit : si vous me donnez cette somme-là, je pars. »

Avec la collaboration de Hugo Joncas, La Presse

Des évictions en forte hausse

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, LA PRESSE

Le phénomène d’éviction pour cause de rénovations majeures frappe de plein fouet le quartier Parc-Extension.

S’il est difficile d’avoir un portrait de l’ampleur du phénomène des rénovictions à Montréal, sur le terrain, les comités logement et associations de locataires sont formels : la hausse des évictions et des reprises de logement est très importante dans certains secteurs de la métropole.

Les quartiers les plus touchés sont situés le long de la ligne orange, dans le sud-ouest de la ville ainsi que le long du futur prolongement de la ligne bleue.

Des quartiers comme Montréal-Nord, Saint-Léonard et Saint-Laurent, qui ne vivaient à peu près jamais le problème, sont désormais concernés. « Ils en voient de plus en plus. C’étaient des problèmes d’insalubrité qu’on voyait dans ces quartiers-là. Et maintenant, on parle d’évictions », dit Maxime Roy-Allard, du Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec (RCLALQ).

Parc-Extension

En trois ans, plus de 350 dossiers pour reprise de logement, éviction et rénovations majeures ont été ouverts au Tribunal administratif du logement (TAL), pour le seul quartier Parc-Extension.

Des chiffres colligés par le Comité d’action de Parc-Extension (CAPE) à l’aide des registres du TAL montrent que les évictions se sont multipliées dans le quartier depuis l’établissement du nouveau campus MIL de l’Université de Montréal. En 2018, 138 cas de reprise, d’éviction ou de rénovations majeures ont été soumis au TAL. En 2019, 110. Et en 2020, 120. Au total : 368 cas en trois ans.

Le nouveau campus a créé un engouement pour le secteur et les dossiers d’éviction ont commencé à affluer au CAPE, témoigne Celia Dehouche, qui y travaille. « En 2017, on avait eu 9 dossiers d’éviction. En 2018, 20. En 2019, 20. Et ça a explosé en 2020. On a géré 74 dossiers d’éviction l’an dernier. »

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, LA PRESSE

Celia Dehouche travaille au comité logement de Parc-Extension, qui a documenté les évictions dans le quartier depuis trois ans.

Et ce n’est que la pointe de l’iceberg, puisque ce sont les personnes qui viennent réclamer notre aide. Ce n’est pas représentatif du nombre réel d’évictions !

Celia Dehouche, du Comité d’action de Parc-Extension (CAPE)

L’effet sur les prix s’est rapidement fait sentir. Le loyer moyen dans le quartier pour un quatre et demie tournait autrefois autour de 700 $. « Là, on parle de quatre et demie à 1500 $. Tout ce qui est proche du MIL, c’est au bas mot 1300 $. On a même vu des quatre et demie à 2700 $ apparaître rue Beaumont. »

PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE

Le nouveau campus MIL de l’Université de Montréal

Les promoteurs ont rapidement jeté leur dévolu sur Parc-Extension, un des derniers quartiers centraux de l’île qui ne sont pas touchés par l’embourgeoisement. « Ils ont profité du fait que les habitants de ces immeubles sont des travailleurs à faible revenu, des immigrants, qui ne connaissent pas leurs droits. »

Rosement – La Petite-Patrie

Et Parc-Ex est loin d’être le seul quartier frappé par les rénovictions. Pendant quatre ans, le comité logement de La Petite-Patrie a minutieusement documenté les évictions pour lesquelles les locataires venaient les consulter. Plus de 350 appartements ont ainsi été examinés. Résultat : les trois quarts de ces évictions étaient de nature malveillante, a établi le comité.

Du petit propriétaire qui prétend reprendre un logement pour son fils mais le reloue en réalité avec 63 % d’augmentation au promoteur qui achète un immeuble où vivent 32 locataires et les expulse sous prétexte de travaux — jamais réalisés — pour tripler les loyers, les exemples abondent dans ce rapport. « Ces résultats sont bouleversants, y lit-on. Si la loi est aussi souvent contournée, c’est qu’il est facile de le faire. »

Et le phénomène s’aggrave avec la crise du logement. Depuis un an, on a eu une explosion des loyers. Ça pousse les propriétaires à des comportements contestables.

Martin Blanchard, coordonnateur du comité logement de La Petite-Patrie

Dans certains cas, les futurs propriétaires commencent à discuter avec les locataires avant même que la transaction ne soit conclue, raconte Jean-Claude Laporte, du comité logement de Rosemont. « On a eu un exemple récent d’un propriétaire qui a commencé sa cabale auprès des locataires avant même d’avoir acheté ! »

Verdun

Même scénario à Verdun, quartier aussi très touché par les rénovictions. « Ça explose, et c’est sauvage. Les loyers ont monté en flèche depuis trois ou quatre ans », résume Annie Lapalme, du Comité d’action des citoyens et citoyennes de Verdun. Une récente enquête du Devoir montrait que le loyer d’un logement à louer à Verdun s’élevait en moyenne à 1435 $ par mois, soit le tarif le plus élevé dans les quartiers centraux de l’île si on exclut le centre-ville.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, LA PRESSE

Laurence Delaunoy et Annie Lapalme, du Comité d’action des citoyens et citoyennes de Verdun

Au cours de la dernière année, Annie Lapalme et sa collègue Laurence Delaunoy se sont occupées d’au moins un cas de locataire frappé par une rénoviction chaque semaine. « Certains locataires en sont à leur deuxième ou troisième éviction. Récemment, on a eu le cas d’une dame avec trois enfants, dont un autiste. Elle a été expulsée quatre fois ! », dit Mme Delaunoy.

C’est comme une épée de Damoclès qui est constamment au-dessus de la tête des locataires.

Laurence Delaunoy, du Comité d’action des citoyens et citoyennes de Verdun

Les nouveaux propriétaires, qui détiennent parfois plusieurs immeubles dans le quartier, usent souvent de techniques d’intimidation et évitent d’envoyer des avis écrits. « Ils disent carrément aux gens : tout le monde dehors », dit Laurence Delaunoy.

Qu’en disent les propriétaires ?

Le nombre d’évictions est élevé à Montréal, convient la Corporation des propriétaires immobiliers du Québec (CORPIQ). « Ça ne fait plaisir à personne d’arriver à un point comme ça », dit Benoît Ste-Marie, directeur général de la CORPIQ, qui aimerait réduire le nombre d’évictions.

« Pour y arriver, il faut qu’il y ait des actions en amont, parce que la principale raison pour les évictions, c’est que les propriétaires ne font pas beaucoup de rénovations sur une base continue. Il n’y trouvent pas leur compte : il n’y a pas de rendement. Alors les immeubles se détériorent et on en arrive à un besoin de rénovations majeures. Si on avait un rendement régulier, on n’en arriverait pas à ce point de bascule », explique-t-il.

Pour lui, le processus de fixation des loyers doit impérativement faire l’objet d’une refonte si on veut diminuer les évictions. « Ça va régulariser le marché et permettre une meilleure offre. Chose certaine, on veut réduire les évictions, et quand ça se produit, il faut que ça se passe de façon correcte. S’il y a des propriétaires qui font de la fausse représentation, et qu’ils ne procèdent pas aux travaux, il faut agir pour éliminer ces situations-là. »

Des dédommagements qui grimpent en flèche

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Le propriétaire de cet immeuble de la rue Querbes a envoyé un avis de rénovations majeures à tous ses locataires. Il ne s’agit cependant pas de l’immeuble dont nous parlons dans le texte qui suit.

Un total de 80 000 $. C’est ce qu’il en a coûté au propriétaire de Julia F. pour persuader les quatre locataires qu’il voulait évincer de son immeuble de s’en aller. Et le cas de Julia est loin d’être unique : selon les comités logement, les montants des dédommagements ont grimpé en flèche pour les locataires évincés.

Julia F., qui nous a demandé de ne pas révéler son identité car l’entente conclue avec son propriétaire est confidentielle, habitait dans son immeuble depuis 12 ans. En septembre dernier, l’édifice de six logements, situé dans le Mile End, est vendu en l’espace d’une petite semaine. Cinq locataires reçoivent un avis d’éviction. L’un des locataires accepte de partir.

« Mais les quatre autres, on a résisté », relate la femme. Ils reçoivent les conseils du comité logement de La Petite-Patrie, dirigé par Martin Blanchard. Ils font une offre à leur nouveau propriétaire : ils veulent 20 000 $ chacun. « Le propriétaire a d’abord essayé de négocier avec chacun d’entre nous. Mais on est restés ensemble, raconte Julia F. Au début, il a dit que c’était trop. Mais quand il a vu qu’on faisait bloc, il a fini par accepter. »

L’histoire de Julia est loin d’être unique : les locataires, de plus en plus au fait du montant d’un loyer mensuel à Montréal, négocient leur départ à fort prix.

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Martin Blanchard, du comité logement de La Petite-Patrie

On voit de plus en plus de compensations de 10 000, 15 000, 20 000 ou même 25 000 $.

Martin Blanchard, du comité logement de La Petite-Patrie

« Ça montre à quel point les opérations d’éviction sont profitables, si on est prêts à offrir ce genre de somme », ajoute Maxime Roy-Allard, du RCLALQ. « Il faut viser le maximum », résume Laurence Delaunoy, du Comité d’action des citoyens et citoyennes de Verdun.

Que faire lorsqu’on reçoit un avis d’éviction, de reprise ou de rénovations ?

1. Ne rien signer sur-le-champ.

2. Consulter le comité logement ou l’association de locataires de son quartier pour être informé de ses droits.

3. S’il s’agit d’une reprise de logement, le locataire qui désire refuser n’a rien à faire. C’est le propriétaire qui devra ouvrir un dossier au Tribunal administratif du logement (TAL) et démontrer qu’il a bel et bien l’intention de loger un membre de sa famille immédiate dans l’appartement.

4. S’il s’agit d’une éviction pour agrandissement, subdivision ou changement d’affectation, c’est au locataire d’ouvrir un dossier au TAL. Le propriétaire devra faire la preuve de ses intentions, plans et permis à l’appui, mais ces demandes sont très généralement acceptées par le TAL.

5. S’il s’agit de rénovations majeures, on ne parle pas d’une éviction, mais d’un déplacement temporaire du locataire. Il a le droit d’être compensé pour ses dépenses supplémentaires — déménagement, rebranchements, frais supplémentaires de loyer. Le locataire a également le droit de retourner dans son logement rénové au tarif fixé par son bail. Au renouvellement du bail, le propriétaire pourra demander une augmentation selon une formule de calcul fournie par le TAL aux propriétaires. Ce taux oscille autour de 2 % à 3 %, mais il a aussi été plus élevé étant de 3,5 % en 2015 et de 4,3 % en 2020.

6. Les locataires âgés, qui demeurent depuis plus de dix ans dans leur logement et ont un revenu modique, ne peuvent être évincés.

RECTIFICATIF
Dans la version originale de ce texte, nous indiquions que les hausses de loyers recommandées par le Tribunal administratif du logement (TAL) oscillaient généralement entre deux et trois pour cent par année. Or, dans les faits, ce taux a été plus élevé pour certaines années, notamment de 3,5 % en 2015 et de 4,3 % en 2020. Le TAL ne fixe pas le niveau des augmentations de loyer au Québec, mais fournit plutôt une formule de calcul aux propriétaires.
Le texte a aussi été modifié pour y préciser que c’est après 10 ans dans un logement que les locataires âgés à revenu modique ne peuvent être évincés.