Les droits de mutation immobilière, communément appelés « taxe de bienvenue », doivent-ils être remis en question à Montréal ? C’est ce qu’a semblé suggérer le candidat à la mairie Denis Coderre, lundi soir, sur les ondes de Radio-Canada, lors du deuxième débat télévisé de la campagne municipale l’opposant à la mairesse sortante, Valérie Plante.

« La question de la taxe de bienvenue, c’est un peu indécent, a laissé tomber M. Coderre. Notre budget dépend à 76 % des taxes foncières, donc il est temps qu’on réévalue ça, qu’on diversifie nos sources de revenus et qu’on arrête de tergiverser. Je pense qu’il faut qu’on repense cette question de taxe de permutation, parce que ça n’a pas de bon sens. »

Les droits de mutation immobilière, payés par les acheteurs au moment d’une transaction immobilière, ont rapporté 289 millions à la Ville de Montréal en 2020, ce qui représente 8 % des 3,6 milliards récoltés par la Ville en taxes chaque année.

Valérie Plante a déclaré, de son côté, que son parti allait augmenter le plafond d’admissibilité au Programme d’appui à l’acquisition résidentielle. Celui-ci permet aux ménages qui acquièrent une propriété de recevoir une compensation financière de la Ville au moment de l’achat.

Débat plus civilisé

Au cours du face-à-face d’une heure, les échanges ont été beaucoup plus civilisés que lors du premier débat télévisé entre les candidats, la semaine dernière au réseau TVA. Un troisième candidat à la mairie, Balarama Holness, qui participait au débat à TVA, était absent de celui organisé par Radio-Canada.

Valérie Plante a attaqué à plusieurs reprises les promesses de son adversaire, notamment sur le logement, le développement de l’est de la ville et la sécurité, en laissant entendre qu’elles étaient irréalistes, inutiles et improvisées.

« Moi, je ne fais pas des trucs sur le bord d’une table », a lancé Mme Plante, en référence à la promesse de Denis Coderre de doter les policiers de caméras portatives dans les 100 premiers jours de son mandat.

Le chef du parti Ensemble Montréal a critiqué, de son côté, le bilan de Mme Plante comme mairesse, répétant que son parti, Projet Montréal, n’avait rien fait au cours des quatre dernières années, entre autres au sujet de la mobilité, de l’entretien des rues et de la propreté.

« La ville est sale, les gens voient ça, a-t-il fait remarquer. On dépense un budget projeté de près de 7 milliards de dollars, et les citoyens ont l’impression qu’ils n’ont pas plus de services. Il y a un problème. »

Sur la question de la hausse du prix des logements, le premier thème sur lequel les candidats ont croisé le fer, deux visions opposées se sont affrontées : celle de Denis Coderre, qui mise sur la densité et des règles plus flexibles pour la construction de logements abordables, et celle de Valérie Plante, qui estime que son règlement obligeant les promoteurs à construire 20 % de logements sociaux, 20 % de logements abordables et 20 % de logements familiaux est la solution.

Pour moi, l’habitation est un droit fondamental, et pour M. Coderre, c’est un bien de consommation.

Valérie Plante, candidate à la mairie de Montréal pour Projet Montréal

Elle a aussi accusé son adversaire de tenir un double discours, étant donné qu’un candidat de son équipe, le courtier immobilier Antoine Richard, qui brigue la mairie de Verdun, a effectué des opérations immobilières de vente-achat (des flips) qui lui ont permis d’empocher de grosses sommes en peu de temps.

Plus de pistes cyclables

L’aménagement des pistes cyclables a bien sûr été abordé, et la mairesse sortante de Montréal a défendu bec et ongles ses réalisations à ce chapitre, affirmant qu’il fallait encore « plus de pistes cyclables, faites de façon intelligente sur de grands axes ».

Denis Coderre s’est défendu d’être « anti-vélo ». Lui aussi continuera d’ajouter des pistes cyclables, a-t-il dit, tout en ajoutant qu’il fallait une meilleure cohabitation des vélos avec les voitures et les piétons. « La mobilité est stallée, il faut arrêter d’être anti-voiture », a-t-il plaidé.

Les deux candidats se sont montrés favorables à l’idée d’interdire les véhicules à essence au centre-ville de Montréal. « On a besoin d’arrêter avec les voitures à essence », a convenu M. Coderre.

Abordant le sujet de la lutte contre la criminalité, le chef d’Ensemble Montréal a laissé entendre que l’administration Plante avait tardé à s’y attaquer sérieusement.

Vous avez été là pendant quatre ans. Mais sur le terrain, les gens ont peur, les gens ont besoin d’avoir plus de policiers sur le terrain.

Denis Coderre, candidat à la mairie de Montréal pour Ensemble Montréal

M. Coderre a répété que, selon lui, Montréal n’était pas sûre actuellement, en référence aux nombreuses fusillades qui se succèdent depuis plusieurs mois.

Valérie Plante a rétorqué qu’il était « irresponsable », selon elle, qu’un candidat à la mairie fasse une telle affirmation, alors que les entreprises touristiques et les universités tentent d’attirer plus de visiteurs à Montréal.

En cas de défaite, Mme Plante a affirmé qu’elle comptait rester conseillère municipale, rappelant que son adversaire avait « quitté le bateau » après avoir perdu son poste de maire en 2017.

M. Coderre a répondu qu’il y a quatre ans, il devait s’occuper de sa santé, mais que, cette fois-ci, il avait « envie de rester ». « Mais le plan A, c’est de gagner, parce que je pense que Montréal a besoin d’un nouveau leadership », a-t-il conclu.

Avec la collaboration de Pierre-André Normandin, La Presse