« La marina n’est pas un trou financier. » Dans un mémoire déposé vendredi devant une commission municipale, des plaisanciers s’opposant à la fermeture annoncée du port de Lachine reviennent à la charge. Ils affirment que l’infrastructure représente des retombées annuelles d’environ 10 millions pour le Québec, un chiffre toutefois fortement remis en question par la Ville.

« On est tannés d’entendre que la marina n’est pas viable. Ce n’est tout simplement pas vrai, et nos chiffres le démontrent. On voulait amener un éclairage nouveau », soulève la porte-parole de l’Association des plaisanciers (APPPL), Josée Côté.

En juillet, Montréal avait annoncé que le port de plaisance de Lachine, dont elle est propriétaire, en serait à sa dernière année. L’intention de la Ville est de transformer l’espace en un nouveau parc sur les eaux du lac Saint-Louis, avec des investissements substantiels de 25 millions pour des travaux allant jusqu’en 2025, dans l’objectif de « rendre les berges accessibles à tous ».

Rappelons que la municipalité évalue à 16,5 millions le montant requis pour rénover la marina. Celle-ci composerait avec une « problématique d’érosion généralisée » et des infrastructures « vieillissantes », dont une fosse septique qui « tombe en ruine ». L’APPPL, de son côté, arrive plutôt à une évaluation de 5,3 millions, et dénonce qu’aucune étude crédible n’ait été effectuée par les autorités.

« Il est clair que la décision de la Ville, […] qui repose sur un ensemble d’informations bricolées et souvent erronées, priverait l’arrondissement de Lachine et Montréal d’un apport économique non négligeable, en plus d’effacer de son bilan une infrastructure évaluée à plusieurs millions de dollars », lit-on dans le rapport de l’organisme, déposé devant la Commission sur les finances, dans le cadre de l’étude du budget 2021.

Des retombées « importantes »

Pour l’ensemble du Québec, l’association chiffre à dix millions les retombées annuelles du port de plaisance, dont 5,5 millions pour Montréal et 3,1 millions pour l’arrondissement de Lachine. « On génère aussi des surplus moyens d’exploitation de 133 000 $ par an depuis 1995 », dit Josée Côté, pour qui la navigation de plaisance a aussi « un caractère patrimonial » qu’il faut protéger.

Or, ces chiffres sont loin de la réalité, selon l’arrondissement. « Les chiffres utilisés par l’association n’incluent pas les investissements requis pour le maintien et la mise aux normes des actifs, ni le temps et le salaire des employés de l’arrondissement et de la Ville qui sont affectés au port de plaisance », avance l’attaché de presse, Matthieu Lampron. « Le portrait n’est donc pas représentatif de l’ensemble de la situation », ajoute-t-il.

Avec ce mémoire, on espère aller vers une solution gagnant-gagnant, donc un parc-marina où les bateaux pourraient demeurer, mais en accueillant les citoyens.

Josée Côté, porte-parole de l’APPPL

Dans une déclaration, la mairesse de Lachine, Maja Vodanovic, n’a pas souhaité commenter le mémoire en question, mais assure que le dialogue est ouvert. « Nous avons déjà entamé des discussions avec nos citoyens et il y a une grande effervescence envers la construction de ce site unique », note-t-elle.

« Nous avons la chance de bâtir un lieu qui répond aux défis du 21e siècle dans une optique de résilience climatique, sociale et économique », poursuit Mme Vodanovic, qui dit avoir « hâte d’entendre » les idées de la communauté lors des consultations publiques à ce sujet, prévues ce printemps. « Ensemble, nous construisons le Lachine de demain », insiste l’élue.

En entrevue avec La Presse en août, la mairesse Vodanovic s’était dite disposée à trouver des compromis avec l’APPPL. Une marina « locale », de 70 à 80 places, pourrait par exemple être conservée. « On continuera à discuter. Ce n’est pas une décision politique, mais pragmatique », a-t-elle alors soutenu.