La Ville de Montréal resserre ses mesures pour lutter contre les inconduites sexuelles, dans la foulée du mouvement #moiaussi. Une équipe spéciale a été mise en place pour recevoir et traiter les plaintes tandis que le contrôleur général aura pour mandat de protéger les plaignants.

L'opposition à l'hôtel de ville avait demandé l'an dernier à la métropole de revoir ses pratiques en matière d'inconduite sexuelle. La Ville a ainsi entrepris de réécrire sa politique de respect de la personne pour mieux encadrer le phénomène.

« Quand on a regardé le code d'éthique, on a constaté que la question n'était pas du tout présente. Comme on était en plein #moiaussi, on s'est dit qu'il fallait agir et ne pas attendre des cas de dénonciation », dit l'élue Cathy Wong, présidente du Conseil municipal.

Dans son approche, Montréal privilégie la médiation. «C'est important pour rétablir le climat de travail », précise Laurence Lavigne Lalonde, élue responsable de la gouvernance au sein de l'administration Plante. En vertu des nouvelles pratiques, c'est le service des ressources humaines qui veillera désormais à l'application de la politique. Celui-ci a constitué une équipe composée de médiateurs et d'enquêteurs spécialisés pour traiter les demandes.

Auparavant, il revenait à chaque unité de s'occuper individuellement de ses cas. Montréal estime que sa nouvelle façon de faire permettra de traiter les plaintes de façon plus uniforme.« On voulait s'assurer d'éviter qu'il y ait des failles. Certains peuvent prendre la question très au sérieux, mais d'autres moins », explique Laurence Lavigne Lalonde.

La métropole demande également à son contrôleur général d'assister les enquêtes menées sur les inconduites. Moins médiatisé que l'Inspecteur général et la Vérificatrice générale, celui-ci dispose aussi de pouvoirs d'enquête à l'interne et joue ainsi un rôle important en arrière-scène à la ville. Surtout, la métropole lui donne le «mandat d'assurer les mesures de protection à l'égard des employés qui ont fait un signalement et qui font l'objet de représailles».

«C'était important d'assurer cette protection pour que tout le monde se sente à l'aise, pour que personne n'ait l'impression de pouvoir faire l'objet de représailles. Ça ne sert à rien si les gens ne peuvent pas avoir confiance.»

- Laurence Lavigne Lalonde, élue responsable de la gouvernance

Montréal a renoncé à l'idée de parler directement d'«inconduite» dans sa politique puisque ce terme relève du Code criminel et donc des corps policiers. La Ville a donc plutôt décidé de parler d'«incivilité» et de «harcèlement», qui relèvent du droit du travail.

La politique s'appliquera tant aux élus, au personnel politique que tous les 28 000 employés de la Ville. En se dotant d'une seule politique pour tous, Montréal veut éviter de créer une zone grise dans le traitement des plaintes. L'ensemble des employés et élus recevront une formation sur la politique.

Hausse des plaintes

La Ville de Montréal a observé en 2017 une «hausse fulgurante du nombre de demandes» en vertu de la politique de respect de la personne. De 277 cas en 2016, la Ville en avait reçu 577, dont 161 de la part d'employés du SPVM. Impossible de savoir s'il s'agit d'un contrecoup du mouvement #moiaussi, qui a débuté en octobre 2017 puisque les plaintes ne se limitent pas aux incivilités, couvrant aussi les problèmes de climat de travail.

Dans son bilan annuel, Montréal notait «une explosion sans précédent des démarches de climat de travail ce qui est révélateur de la présence de facteurs de risque dans plusieurs unités administratives». L'équipe dédiée au traitement de ces plaintes avait été renforcée à l'époque, passant de 3 à 11 employés.

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Demandes en vertu de la politique sur le respect de la personne de Montréal*

2011   126

2012   140

2013   164

2014   202

2015   194

2016   277

2017   577

*Les données 2017 incluent 161 dossiers du SPVM, données qui n'étaient pas intégrées auparavant