L'aménagement de cette rue discrimine-t-il les femmes ou les personnes transsexuelles? Et ce projet de logement social tient-il compte des personnes ne s'identifiant ni comme un homme ni comme une femme? Pendant deux ans, Montréal mènera un projet-pilote pour vérifier si certaines de ses décisions risquent de discriminer une partie de la population.

L'administration Plante a décidé de faire prendre à Montréal le virage de «l'analyse différenciée selon les sexes et plus», ADS+. Pendant deux ans, certains services et arrondissements devront tenir compte de possibles discriminations que leurs décisions pourraient avoir.

En prenant ce virage, la Ville dit vouloir «prévenir les discriminations systémiques dans toutes ses politiques, programmes et services». Au-delà du sexe, l'analyse touchera aussi les possibles discriminations en fonction des conditions socioéconomiques, l'origine ethnoculturelle, le handicap et l'orientation sexuelle.

Montréal dit déjà avoir intégré cette approche dans certains projets réalisés récemment, comme le nouveau Complexe aquatique de Rosemont. Un vestiaire non genré a été aménagé. Vitré, celui-ci peut accueillir les personnes de tous les sexes ou ceux s'identifiant autrement. L'endroit a également été pensé pour être accessible aux personnes à mobilité réduite.

Pour le projet-pilote, seuls les services de la diversité et l'inclusion, celui de l'urbanisme et la mobilité, celui de la planification immobilière ainsi que Direction des sports mettront cette approche en vigueur. Deux arrondissements participeront également au projet-pilote, soit Ville-Marie et Côtes-des-Neiges-Notre-Dame-de-Grâce.

«Nous amorçons ce virage parce que nous visons l'équité et l'inclusion pour tous les groupes de citoyens dans tous nos projets, programmes et services municipaux. Il importe de se poser les bonnes questions dès le départ, dès que nous nous préparons à prendre une décision», a indiqué la mairesse Valérie Plante, dans un communiqué.

L'ADS+ viendra s'ajouter aux autres grilles d'analyse déjà en place pour les projets. En effet, pour chaque décision, Montréal demande à ses services de valider les impacts financiers, leur conformité aux principes du développement durable ou qu'elles respent l'ensemble des règles et politiques de la Ville.

Lors de l'aménagement d'une rue par exemple, le service de l'urbanisme devra veiller à ce qu'il y ait assez de lumières pour assurer la sécurité des passants, des bancs sont-ils présents pour accommoder les personnes âgées, ou des rampes d'accès pour les personnes à mobilité réduite.

Ce n'est pas la première décision de Montréal touchant la question de la différenciation basée sur le sexe. La métropole a récemment adopté l'écriture épicène pour ses communications, qui vise à utiliser des mots pouvant désigner tant le masculin que le féminin.

L'analyse différenciée selon les sexes n'est pas non plus une nouvelle approche. Celle-ci a été adoptée en 1995 lors de la Quatrième conférence mondiale des Nations unies sur les femmes. Le Canada et le Québec y avaient adhéré. Plusieurs ministères québécois ont intégré cette façon de faire depuis. Ainsi, le ministère de l'Éducation diffuse des données en fonction du sexe depuis 1997, ce qui a notamment permis d'observer les difficultés scolaires des garçons. Les chercheurs subventionnés par Québec doivent d'ailleurs tenir compte de l'analyse différenciée lorsqu'ils étudient la persévérance scolaire.