Vous recevez des invités en fin de semaine pour un barbecue ? Que mettrez-vous sur le gril ? Des protéines animales, il y a fort à parier. Même si l’on connaît les effets de la consommation de viande rouge sur l’environnement et potentiellement sur la santé, pour beaucoup, il est inconcevable de s’en priver.

Comment réduire l’empreinte écologique de son assiette sans devenir végétalien ? C’est la question que nous a posée Simon Lavoie.

Au Québec, notre alimentation représente environ 20 % de notre empreinte carbone individuelle annuelle. Selon une étude réalisée par le Centre international de référence sur l’analyse du cycle de vie et la transition durable (CIRAIG) en 2020, la moitié de cette charge est attribuable aux viandes, poissons et produits laitiers. Du strict point de vue de l’émission de gaz à effet de serre (GES) – et de l’éthique animale –, exclure tout produit d’origine animale de son assiette a donc un effet considérable.

Mais, dans la réalité, combien de gens sont prêts à faire le saut ? Selon des données de Statista, en 2022, seulement 3 % des Canadiens se déclaraient végétaliens et 4 % végétariens.

« Le discours simplifié, c’est de dire : si tout le monde devient végane, ça va aller mieux, mais ce n’est pas nécessairement ce que tout le monde veut entendre et il y a d’autres façons d’agir pour réduire significativement l’empreinte environnementale de son alimentation », illustre Catherine Houssard, ingénieure en génie alimentaire et analyste au CIRAIG.

Peu de gens savent que des changements moins radicaux peuvent avoir un effet considérable, estime-t-elle.

« Devenir végane, ça veut dire ne plus consommer de produit animal. C’est draconien, car dans les produits animaux, il y a les viandes, les poissons, les crustacés, les produits laitiers, les œufs. »

PHOTO DOMINICK GRAVEL, ARCHIVES LA PRESSE

Catherine Houssard, ingénieure en génie alimentaire et analyste au CIRAIG

Réduire sa consommation de viande rouge, sans nécessairement la bannir, pourrait déjà faire une très grosse différence.

Catherine Houssard, ingénieure en génie alimentaire et analyste au CIRAIG

En raison de la superficie des terres nécessaires à l’alimentation des bovins, de l’utilisation d’engrais chimiques, des émissions de méthane et de la gestion du fumier, le bœuf a une empreinte carbone à peu près 10 fois plus élevée que celle du poulet.

Des chercheurs de l’Université McGill ont récemment étudié les conséquences d’un remplacement partiel des viandes rouges et transformées et des produits laitiers par des protéines végétales. Leur constat, publié dans la revue Nature Food en début d’année, montre que l’empreinte carbone de notre alimentation chute de 25 % lorsque nous remplaçons la moitié de notre consommation de viandes rouges et transformées par des protéines végétales. Pour les produits laitiers, la diminution est de 5 %.

Consultez l’étude (en anglais)

« Ce n’est pas suffisant pour atteindre les objectifs de l’Accord de Paris, mais tous les secteurs de la chaîne d’approvisionnement alimentaire doivent avoir un rôle pour réduire les gaz à effet de serre liés à la production et à la transformation des aliments », affirme Olivia Auclair, diplômée en nutrition, docteure en sciences animales et chercheuse principale de l’étude.

Celle-ci met aussi en lumière la faible répercussion sur la nutrition des individus, outre une baisse de l’apport en calcium lorsque les produits laitiers sont partiellement substitués. On peut même gagner entre sept et neuf mois d’espérance de vie ! Des cobénéfices non négligeables, selon Olivia Auclair, pour modifier son régime alimentaire.

S’attaquer au gaspillage

Une autre mesure efficace, mais moins médiatisée, est celle du gaspillage alimentaire. Pour Caroline Houssard, c’est même le premier geste à faire. « Idéalement, il faudrait bannir le gaspillage, mais c’est extrêmement difficile. On a tous des vies complètement dingues et on perd des aliments, non pas par mauvaise volonté, mais parce qu’on n’a pas le temps de bien planifier. »

Étant donné que la production, la distribution et la transformation de nos aliments représentent 82 % de leur empreinte carbone, jeter de la nourriture, de la viande particulièrement, a des conséquences considérables. « On associe le gaspillage aux émissions des déchets organiques dans les décharges, mais l’impact est dans la production de l’aliment, de sa culture au champ jusqu’à son transport, sa transformation en usine, sa distribution, sa réfrigération, expose Mme Houssard. C’est des impacts sur tout le cycle de vie de l’aliment pour que finalement il finisse à la poubelle. »

Si la réduction de la viande rouge et celle du gaspillage alimentaire constituent les deux principaux piliers pour alléger l’empreinte de nos assiettes, de multiples questionnements subsistent dans les allées des épiceries. Local ou biologique ? Fraises du Mexique ou fraises locales de serre ? « Tout n’est pas intuitif. On a besoin de développer des systèmes pour éduquer les gens », déclare celle qui est en faveur d’un étiquetage environnemental sur les aliments.

D’autres façons d’alléger l’empreinte de son assiette

  • Éviter les aliments transportés par avion et ceux dont la production est associée à la déforestation (chocolat, café, huile de palme).
  • Avant de jeter un aliment dont la date d’expiration est passée, réfléchir et vérifier ! Ces indications concernent la fraîcheur des aliments et non la salubrité.
  • Consulter les applications antigaspillage comme FoodHero et Too Good to Go.
  • Privilégier les produits locaux et en saison.
  • Puisque les emballages ne représentent que 5,5 % de l’empreinte carbone des aliments, acheter en vrac n’est pas le geste ayant le plus grand effet, surtout si on doit s’y rendre en voiture. Pour le moins, éviter le suremballage.

Précision :
Le titre de cet article a été modifié afin de remplacer le terme « végane » par « végétalien ». Le véganisme désigne un mode de vie qui exclut tout produit issu de l’exploitation animale, pas seulement dans l’alimentation.
Par ailleurs, concernant les effets de la consommation de viande rouge sur la santé, bien que plusieurs études aient démontré qu’une grande consommation de viande rouge peut entraîner l’augmentation du risque de maladies cardiovasculaires, de diabète de type II et de certains cancers, la plupart sont des études d’observation, qui ne permettent pas de déterminer si la consommation de viande est une cause directe de ces maladies.

Le chiffre de la semaine

0,12 $

PHOTO JOSIE DESMARAIS, ARCHIVES LA PRESSE

Un trio de HEC Montréal a conçu un calculateur permettant d’estimer le coût réel de différents modes de transport.

C’est la somme que permet d’économiser à la société chaque dollar dépensé par les cyclistes, selon un projet de recherche des diplômées de HEC Montréal Gabrielle Beaudin et Muriel Julien et du professeur David Benatia. Chaque dollar dépensé par les piétons permet d’économiser 0,01 $ tandis que l’automobile représente un coût social de 1,55 $ par dollar dépensé, et le transport collectif, de 0,49 $. Le trio a aussi conçu un calculateur permettant d’estimer le coût réel de différents modes de transport.

Consultez la page du projet

Ils ont dit

PHOTO CHARLY TRIBALLEAU, AGENCE FRANCE-PRESSE

Le secrétaire général de l’ONU, António Guterres

« Dans le cas du climat, nous ne sommes pas les dinosaures. Nous sommes le météore. Nous ne sommes pas seulement en danger – nous sommes le danger. Mais nous sommes aussi la solution. »

António Guterres, secrétaire général de l’ONU, lors d’une allocution prononcée mercredi à New York, dans laquelle il a appelé les pays à interdire les publicités de l’industrie des énergies fossiles.

Feu vert

Après le Trottibus, le vélobus

PHOTO AMY OSBORNE, THE WASHINGTON POST

Un « vélobus » à San Francisco

Aux États-Unis, plus de la moitié des enfants arrivent à l’école en voiture. Pour inciter les familles à se déplacer à vélo, des parents de San Francisco ont mis sur pied des « vélobus ». Chaque jour, un convoi de parents et d’enfants se rend à l’école à vélo, selon un trajet prédéfini, en récupérant les enfants en cours de route. L’idée, popularisée par les Barcelonais, a été reprise dans de nombreuses villes du monde.

Lisez un article du Washington Post (en anglais)
En savoir plus
  • 638 %
    Les Nord-Américains consomment 638 % plus de viande rouge que le préconise le régime alimentaire pour la santé planétaire établi par la commission EAT-Lancet.
    Source : Rapport de synthèse de la commission eat-lancet, 2019