L’un des derniers caribous montagnards de la Gaspésie a été tué par des chasseurs, à la mi-octobre, un « abattage illégal » au sujet duquel la Protection de la faune du Québec (PFQ) enquête.

Le caribou abattu, qui portait un collier télémétrique, était l’une des six femelles capturées et mises en enclos le printemps dernier, a indiqué lundi dans un communiqué le ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs, de qui relève la PFQ.

Elle avait été libérée à la fin du mois d’août.

Des suspects « ont été rencontrés » par les agents de protection de la faune, le 18 octobre, indique la PFQ, ajoutant que les agents s’étaient préalablement rendus sur les lieux où l’animal a été abattu accompagnés d’un maître-chien et d’un drone pour « démarrer l’enquête », qui est toujours en cours.

Aucune information supplémentaire ne sera fournie, affirme la PFQ.

Le caribou montagnard de la Gaspésie est une espèce « en voie de disparition » depuis 2003 au Canada et désignée comme « menacée » au Québec depuis 2009.

Sa population était estimée à 34 individus dans le plus récent inventaire, réalisé en 2021.

Québec avait difficilement capturé 6 des 15 femelles de la harde en mars et avril pour les placer dans un enclos dans le but de les protéger des prédateurs durant la période de mise bas, mais les deux seuls faons qui sont nés au printemps sont morts peu de temps après, tout comme l’une des mères.

De « très graves » répercussions

L’abattage d’un des derniers caribous de la Gaspésie, particulièrement une femelle, « aura des répercussions très graves sur la dynamique d’une population déjà fragilisée », a déclaré à La Presse Martin-Hugues St-Laurent, biologiste à l’Université du Québec à Rimouski et spécialiste de l’espèce.

« Cet acte de braconnage rapproche donc un peu plus la population de l’extinction », s’alarme aussi Alice-Anne Simard, directrice générale de Nature Québec, exhortant le gouvernement à faire « tout en son pouvoir » pour éviter qu’une telle situation se reproduise.

Le caribou montagnard de la Gaspésie est si fragile que chaque individu qui meurt peut entraîner la disparition de cette population, surtout s’il s’agit d’une femelle.

Alice-Anne Simard, Nature Québec

La mort d’une bête portant un collier télémétrique aura aussi des conséquences négatives « sur notre capacité à comprendre et apprendre sur le plan scientifique », ajoute Martin-Hugues St-Laurent.

La chasse est interdite dans le parc national de la Gaspésie, où vivent les caribous montagnards, mais ces derniers fréquentent aussi les réserves fauniques qui le ceinturent – l’endroit où le caribou a été tué n’a pas été précisé.

Il est toutefois « impossible de confondre un caribou et un orignal », indique M. St-Laurent, rappelant que « tout chasseur doit savoir identifier l’animal sur lequel il tire ».

Nature Québec dit s’inquiéter du climat social qui règne dans les régions où la protection du caribou est perçue comme un obstacle au développement de l’industrie forestière et y voit une raison de plus pour que Québec mette rapidement en place sa Stratégie de protection des caribous forestiers et montagnards.

Cette stratégie, annoncée en 2016 et initialement prévue pour 2019, a été maintes fois reportée et est désormais attendue « d’ici la fin de l’année », disait récemment le ministre de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs, Benoit Charette.