Le nombre de claims miniers continue d’augmenter dans le sud de la province, selon le plus récent bilan de la Coalition Québec meilleure mine. Une situation qui inquiète les citoyens de plusieurs régions, comme le confirme le rapport de synthèse d’une consultation publique gouvernementale dévoilé jeudi.

Ce qu’il faut savoir

  • Plusieurs régions du sud du Québec constatent une hausse importante du nombre de claims miniers depuis deux ans.
  • Le ministère des Ressources naturelles et des Forêts (MRNF) a tenu une consultation publique le printemps dernier pour entendre les préoccupations de groupes de citoyens et du monde municipal.
  • Un rapport de synthèse de la consultation montre que les citoyens ont de nombreuses préoccupations quant à l’exploration et l’exploitation minière dans leur région.
  • Le MRNF travaille actuellement à une révision de la Loi sur les mines.

Selon le plus récent bilan de la Coalition Québec meilleure mine, le nombre de claims miniers dans le sud du Québec poursuit sa progression. Entre le 1er août 2022 et le 1er août 2023, cinq MRC situées dans les régions de l’Outaouais, de la Mauricie, de Lanaudière et des Laurentides ont connu une hausse moyenne de 52 % du nombre de nouveaux claims miniers sur leurs territoires respectifs.

Cette nouvelle hausse inquiète aussi des groupes environnementaux, dont la SNAP Québec et la Coalition québécoise des lacs incompatibles avec l’activité minière, qui réclament toujours une réforme du droit minier dans la province.

Un claim minier est un droit exclusif permettant de vérifier la présence de minerai sur un territoire d’environ 0,5 km⁠2. Pour moins de 100 $, l’acquisition d’un claim se fait en quelques minutes seulement par l’entremise de la plateforme de gestion de titres miniers (GESTIM) du ministère des Ressources naturelles et des Forêts.

CARTE FOURNIE PAR LA COALITION QUÉBEC MEILLEURE MINE

Claims miniers dans le sud du Québec

Dans la MRC de Maskinongé, en Mauricie, la progression du nombre de claims miniers a été fulgurante : une hausse de 146 % en une année. Cette augmentation est attribuable en partie à un nouveau phénomène : des citoyens acquièrent des claims pour empêcher des entreprises de s’approprier des droits d’exploration dans leur région. Selon les chiffres transmis par la Coalition Québec meilleure mine, un peu moins du tiers des 399 nouveaux claims accordés dans la MRC dans la dernière année appartiennent à des citoyens de la région.

En Mauricie, l’opposition aux claims miniers se manifeste notamment dans les municipalités de Saint-Élie-de-Caxton, de Saint-Boniface et de Saint-Mathieu-du-Parc.

CARTE FOURNIE PAR LA COALITION QUÉBEC MEILLEURE MINE

Claims miniers autour du parc national du Mont-Tremblant

En Outaouais, la MRC des Collines-de-l’Outaouais a connu une hausse de 49 %, suivie de la MRC de la Vallée-de-la-Gatineau à 39 %. Des hausses moins importantes ont été observées dans la MRC de Matawinie (19 %), dans Lanaudière et dans la MRC d’Antoine-Labelle (10 %), dans les Laurentides.

« De plus en plus de conflits sur le territoire »

Les régions de l’Outaouais et des Laurentides sont d’ailleurs celles où d’éventuelles activités minières suscitent le plus d’interrogations au sein de la population. Au printemps dernier, la ministre des Ressources naturelles et des Forêts, Maïté Blanchette Vézina, a tenu une consultation publique afin d’assurer « un développement harmonieux de l’activité minière ». Au total, 105 mémoires ont été présentés au cours de l’exercice, selon le bilan dévoilé jeudi par le MRNF. Un peu plus de 40 % de ces mémoires proviennent de ces deux régions.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

La ministre des Ressources naturelles et des Forêts, Maïté Blanchette Vézina

Avec le développement de la filière des batteries électriques, « il va y avoir de plus en plus de conflits sur le territoire », croit Éric Pineault, professeur de sociologie à l’UQAM. « On va avoir besoin d’un nouveau cadre qui respecte les communautés. »

« Pour beaucoup de minéraux qu’on veut aller chercher [au Québec], ça nécessite des mines à ciel ouvert. C’est le cas du graphite et du lithium », précise-t-il, indiquant au passage qu’il partage les inquiétudes de plusieurs communautés.

Selon M. Pineault, le droit minier au Québec doit être revu afin de permettre aux villes et aux MRC de mieux gérer leur territoire.

Actuellement, c’est le Far West, on fonctionne avec des règles qui ont un côté un peu primitif [avec les claims].

Éric Pineault, professeur de sociologie à l’UQAM

« L’encadrement du processus d’attribution et de révocation des claims a été mentionné lors des interventions, par exemple en ce qui concerne la facilité d’acquisition d’un titre minier, et ce, en l’absence de consultation du milieu », mentionne d’ailleurs le rapport d’une quarantaine de pages rendu public jeudi par le MRNF.

Un projet de loi dans les cartons

« On s’attend à ce que la ministre [Maïté Blanchette Vézina] tienne compte des préoccupations des citoyens qui se demandent pourquoi c’est si compliqué de protéger des portions de territoire, mais si simple de les claimer, souligne Rodrigue Turgeon, porte-parole de la Coalition Québec meilleure mine. Si la ministre ne met pas en place des mécanismes pour retirer des claims déjà octroyés, ça ne passera pas », ajoute-t-il.

« Je comprends bien les préoccupations associées aux claims pour la population, et c’est la raison pour laquelle j’ai lancé les consultations sur un développement plus harmonieux de l’activité minière au printemps dernier. On est à l’écoute des citoyens et on agit, ce pour quoi on travaille actuellement à trouver des solutions. L’objectif est de trouver un équilibre entre le développement minier, la protection de l’environnement et les solutions aux préoccupations de la population », a indiqué Mme Blanchette Vézina, dans une déclaration transmise à La Presse.

Dans une entrevue au Journal de Québec, jeudi, la ministre a indiqué vouloir modifier la Loi sur les mines afin de développer la filière batterie avec des minéraux extraits au Québec. Elle a cependant réitéré qu’il n’y aurait pas de nouvelles mines au Québec sans acceptabilité sociale.

Un projet de loi serait en préparation au MRNF, mais il semble acquis qu’il ne sera pas déposé cet automne, a précisé le cabinet de la ministre.

C’est le cabinet de la ministre et non la ministre qui a indiqué qu’un projet de loi ne serait probablement pas déposé cet automne, contrairement à ce qui était écrit dans une version précédente de ce texte.

Consultez le rapport de synthèse du MRNF au sujet des consultations publiques