Si de nouvelles technologies pour stocker du carbone font régulièrement les manchettes, on parle moins souvent des solutions impossibles à breveter… tout simplement parce qu’elles existent déjà ! C’est le cas notamment des grandes baleines, qui pourraient donner un sérieux coup de pouce pour lutter contre le réchauffement climatique, à condition de mieux les protéger.

33 tonnes de CO2

En 2019, le Fonds monétaire international (FMI) a publié une analyse rappelant l’importance de protéger les baleines afin de limiter les émissions de gaz à effet de serre (GES) dans l’atmosphère. L’analyse se basait sur une étude dévoilée en 2014 dans la revue Frontiers in Ecology and the Environment. Une équipe de scientifiques, dont la biologiste québécoise Lyne Morissette, ont alors indiqué qu’une grande baleine séquestre en moyenne 33 tonnes de CO2. Celui-ci se trouve pour ainsi dire stocké dans l’océan pour des milliers d’années, puisqu’à sa mort, une baleine coule dans les fonds marins.

Autant que 1000 arbres

L’analyse du FMI rappelle qu’un arbre stocke en moyenne 48 kg de CO2 par année. Une seule baleine permettrait donc de séquestrer autant de CO2 que 1000 arbres, précisent les experts du FMI. Il n’y aura jamais autant de baleines dans les océans que d’arbres à la surface de la Terre, mais « la protection des baleines pourrait contribuer de manière significative à la capture du carbone, car la population actuelle des plus grandes baleines n’est qu’une petite fraction de ce qu’elle était autrefois », ajoute le FMI.

Populations en déclin

Les baleines susceptibles de stocker autant de carbone sont les grandes baleines à fanons, comme la baleine bleue, la baleine à bosse, la baleine noire, ainsi que le cachalot, qui fait cependant partie de la famille des cétacés à dents. Plusieurs espèces de grandes baleines ont connu un déclin spectaculaire au cours du siècle dernier. On estime qu’elles ont perdu en moyenne 66 % de leur population pendant cette période. C’est pire encore pour la baleine bleue, réduite à 1 % de sa population historique. En plus de leur capacité à stocker du carbone, les grands cétacés jouent aussi un rôle essentiel pour réguler les écosystèmes marins. Ils permettent de maintenir les stocks de phytoplanctons, en bonne partie responsables de la capacité des océans à capturer d’immenses quantités de CO2.

Neuf espèces animales clés

Une étude récente parue dans la revue Nature Climate Change signale qu’en protégeant six espèces animales et en favorisant l’expansion de trois autres, on pourrait retirer chaque année 6,4 milliards de tonnes de CO2 de l’atmosphère, soit l’équivalent de 17 % des émissions en 2022. Pour y arriver, il faudrait maintenir à leur niveau actuel les populations de requins des récifs, de loups gris, de gnous, de loutres de mer, de bœufs musqués et des poissons de mer. Il faudrait aussi favoriser la hausse des populations d’éléphants de forêt d’Afrique, de bisons des Amériques et des baleines dans l’hémisphère Sud.

36,8 milliards de tonnes

En 2022, les émissions mondiales de CO2 issues des énergies fossiles se sont élevées à 36,8 milliards de tonnes.

Source : Agence internationale de l’énergie