(Gatineau) Le film Avatar était sur toutes les lèvres jeudi au forum sur l’intégration des activités minières organisé par l’Union des municipalités du Québec (UMQ). Les élus municipaux ont rappelé au gouvernement Legault qu’ils ne veulent pas d’activité minière sur leur territoire sans avoir leur mot à dire.

Un important gisement minier est découvert dans une communauté qui est consultée seulement en apparence. Un projet qui va de l’avant malgré un manque évident d’acceptabilité sociale. C’est le scénario du premier film Avatar du réalisateur James Cameron, sorti en 2009.

C’est aussi le scénario que les élus municipaux ne veulent pas avoir à suivre, ont-ils rappelé jeudi à Gatineau au cours du forum intitulé Intégration des activités minières : accessibilité sociale et acceptation organisé par l’UMQ.

Un forum au cours duquel les élus de l’UMQ ont adopté une « déclaration pour l’intégration harmonieuse des activités minières au territoire ». Celle-ci dresse une liste des demandes municipales au gouvernement du Québec « afin de tenir compte de l’évolution du contexte minier québécois » et la hausse de la demande pour assurer l’électrification des transports.

Dans une allocution préenregistrée, la ministre des Ressources naturelles et des Forêts, Maïté Blanchette Vézina, a indiqué aux élus qu’elle avait demandé à son ministère « de mettre en place une vaste démarche pour un développement harmonieux de l’activité minière ». Elle n’a pas donné plus de détails cependant.

« Un pouvoir rattaché à des conditions »

Les élus demandent notamment le retrait de l’article 246 de la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme et la modernisation des règles permettant aux MRC de désigner des portions de leur territoire incompatibles avec les activités minières.

L’article 246 prévoit que la Loi sur les mines a préséance sur la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme (LAU). Ce qui signifie concrètement qu’aucune disposition de la LAU ne peut empêcher la désignation sur carte d’un claim, l’exploration, la recherche, la mise en valeur ou l’exploitation de substances minérales.

Quant à la désignation des territoires incompatibles avec l’activité minière ou TIAM, dans le jargon municipal, les élus font valoir qu’ils n’ont pas véritablement le pouvoir de fixer les limites du développement minier.

PHOTO SIMON SÉGUIN-BERTRAND, LE DROIT

Daniel Côté, président de l’UMQ

« On nous dit qu’on nous donne le pouvoir, mais ça demeure un pouvoir rattaché à des conditions. Car dans bien des cas, la demande de la MRC est refusée parce que le pouvoir visé ne correspond pas aux critères établis par le gouvernement », a rappelé le président de l’UMQ, Daniel Côté, devant un parterre d’environ 200 personnes.

C’est ce qui est arrivé à la MRC d’Argenteuil, dans les Laurentides. Son projet de TIAM déposé en 2020 prévoyait que 87 % de son territoire était incompatible avec l’activité minière. Celui-ci a été rejeté par Québec.

La MRC de Papineau, en Outaouais, a aussi reçu un avis défavorable du gouvernement Legault en 2019 après avoir soumis son projet à l’ancien ministère de l’Énergie et des Ressources naturelles. « La MRC de Papineau ne veut pas se faire avatariser », a illustré son directeur de l’aménagement, Arnaud Holleville pendant une présentation devant les élus.

Un mot « inventé » qui signifie une « action de vouloir exploiter un minerai sans prendre suffisamment en compte les préoccupations des populations locales », a-t-il expliqué. « Le gouvernement du Québec essaie de nous rassurer, mais on n’est pas rassurés », a précisé M. Holleville.

« En harmonie »

« On pense qu’on a les outils, mais peut-être qu’on ne les a pas tant que ça », a lancé Isabelle Perreault, préfète de la MRC de Matawinie, dans Lanaudière. « Ce sont de timides pouvoirs qu’on nous confère avec les TIAM », a ajouté le préfet de la MRC des Laurentides, Marc L’Heureux, indiquant qu’on devrait d’abord décider des zones où l’on veut de l’exploration minière et non le contraire. « Le premier ministre Legault parle d’acceptabilité sociale, mais on fonctionne à l’envers », croit-il.

Les municipalités sont les mieux placées pour assurer une cohabitation harmonieuse entre les activités minières et les autres activités présentes sur leurs territoires.

Daniel Côté, président de l’UMQ

« On ne souhaite pas interdire le développement minier, on ne veut pas interdire les claims, on ne veut pas empêcher le développement économique, ni la transition énergétique, a ajouté le maire de Gaspé et président de l’UMQ. Ce qu’on veut, c’est que les différentes utilisations de nos territoires soient en harmonie. »

De son côté, la PDG de l’Association minière du Québec, Josée Méthot, a tenu à rappeler que « l’industrie minière a beaucoup évolué au cours des dernières décennies ». « Elle place les citoyens et les communautés d’accueil au cœur de ses préoccupations. »

Selon Mme Méthot, l’exploration minière est essentielle pour trouver les bons gisements. « Plutôt que d’interdire, on devrait travailler ensemble », a-t-elle lancé aux élus, précisant que « toutes les étapes du développement minier sont très très très encadrées avec plus de 100 lois, règlements, directives et codes au fédéral et au provincial ».

Le porte-parole de la Coalition Québec meilleure mine, Ugo Lapointe, croit tout de même que des améliorations sont possibles. « On peut acheter un claim pour 70 $ en moins de 30 minutes avec seulement une connexion internet et une carte de crédit. Mais une municipalité doit mettre de 6 à 24 mois de travail pour justifier une demande de TIAM », a-t-il rappelé aux élus de l’UMQ.

En savoir plus
  • 408 %
    Dans Lanaudière, le nombre de claims a bondi de 408 % entre le 1er janvier 2021 et le 30 juin 2022. Les Laurentides et l’Outaouais ont connu des hausses de 71 % et 211 %.
    Source : Coalition Québec meilleure mine
  • 267 420
    À la fin de l’année 2022, 267 420 claims étaient enregistrés au ministère des Ressources naturelles et des Forêts. On en comptait un peu plus de 200 000 en 2021, 176 000 en 2020 et 143 000 en 2019.
    Source : Coalition Québec meilleure mine