L’impasse perdure sur le financement du cadre mondial pour la protection de la nature post-2020, à la 15conférence des Nations unies sur la biodiversité (COP15), mais les pays riches annoncent çà et là des contributions destinées aux pays en développement.

Le Canada a notamment promis vendredi 255 millions de dollars pour financer quatre projets visant à favoriser la biodiversité tout en luttant contre les changements climatiques.

« Le succès du cadre mondial pour la biodiversité passe inévitablement par le soutien et l’inclusion des pays en développement, où se trouve la majeure partie de la biodiversité mondiale », a déclaré le ministre de l’Environnement et du Changement climatique, Steven Guilbeault.

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

Mélanie Joly et Steven Guilbeault, ministres canadiens des Affaires étrangères et de l’Environnement et du Changement
climatique, ont annoncé vendredi à la COP15 un financement de 255 millions de dollars destinés à la protection de la nature dans les pays en développement.

« La perte de biodiversité, comme les changements climatiques, ne connaît pas de frontières ; c’est un catalyseur d’instabilité, de conflits, de famine et de pandémie », a ajouté à son côté la ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly.

L’essentiel de la somme, 219 millions, sera versé au Fonds pour l’environnement mondial (FEM), le mécanisme financier de la Convention sur la diversité biologique, pour le cycle de financement des quatre prochaines années, ce qui fait du Canada le septième contributeur en importance de ce fonds.

Le reste de la somme ira à un projet d’action climatique féministe en Afrique de l’Ouest, à la stratégie forestière marocaine et au volet biodiversité du Programme des Nations unies pour le développement.

La contribution du Canada porte notre total de la dernière année à 1,5 milliard de dollars pour les pays du Sud, spécifiquement sur la biodiversité.

Steven Guilbeault, ministre de l’Environnement et du Changement climatique du Canada

Cette annonce en suit d’autres faites jeudi par un groupe de 14 pays donateurs, qui ont souligné avoir doublé leur financement pour la nature pour la période 2015-2020 par rapport à la décennie précédente et promis de continuer d’accroître leurs contributions.

Où verser l’argent ?

Au-delà des sommes requises pour aider les pays en développement à mettre en place des mesures de conservation et de restauration de la nature, la question du véhicule de financement divise les parties.

Les pays en développement souhaitent créer un nouveau fonds mondial pour la biodiversité, tandis que les pays développés préfèrent utiliser le Fonds pour l’environnement mondial, créé il y a 30 ans.

Mais le fonds existant « ne sera pas suffisant » avec l’augmentation des besoins, estime Flora Mokgohloa, directrice générale adjointe pour la biodiversité et la conservation au ministère des Forêts, des Pêches et de l’Environnement d’Afrique du Sud.

La création d’un nouveau fonds retarderait la mise en œuvre du nouveau cadre mondial, rétorque Virginijus Sinkevičius, commissaire à l’environnement de la Commission européenne, qui propose plutôt d’améliorer l’efficacité du fonds existant.

« Il a fallu de sept à huit ans pour négocier le Fonds pour l’environnement mondial », souligne-t-il.

L’occasion d’une génération

En dépit des désaccords qui subsistent, les pays riches demeurent optimistes.

« Si nous avons été prêts, sur la question des changements climatiques, à fournir collectivement 100 milliards de dollars par année, de toutes les sources, institutions multilatérales, secteur privé, secteur philanthropique et bien sûr secteur public, je vois difficilement comment on pourrait ne pas être prêts à faire la même chose pour la biodiversité », a déclaré Steven Guilbeault, estimant que la somme devrait être du même ordre de grandeur.

Les pays membres de la Coalition pour la haute ambition pour la nature et les peuples ont réitéré vendredi leur détermination à inscrire dans l’accord final de la COP15 l’engagement de protéger 30 % des terres et des mers d’ici 2030, et de garantir les moyens de le réaliser.

« On ne peut pas se permettre de quitter Montréal sans financer cet engagement », a déclaré Zac Goldsmith, ministre des Territoires d’outre-mer, du Commonwealth, de l’Énergie, du Climat et de l’Environnement du Royaume-Uni.

Évoquant « l’occasion d’une génération » de dessiner le « chemin vers la restauration de la nature », il a invité les autres pays à adhérer eux aussi à cet engagement.

M. Goldsmith insiste aussi sur la nécessité de rediriger le financement nuisible à la biodiversité vers des solutions permettant la protection de la biodiversité, soulignant qu’il y a là une source de fonds potentiels majeure.

« Les 50 plus importants pays producteurs de denrées alimentaires dépensent environ 700 milliards de dollars [des États-Unis] par année pour subventionner des formes d’utilisation des terres parfois fortement destructrices », a-t-il déploré.

Réaffecter ces fonds permettrait selon lui de « combler l’écart financier » qui demeure.

Avec La Presse Canadienne