Une chaîne britannique de supermarchés largue la mention « Meilleur avant » pour combattre le gaspillage alimentaire

Un supermarché britannique retirera la date de consommation recommandée sur des centaines de produits, afin de lutter contre le gaspillage alimentaire. Une mesure applaudie par des organismes et des experts du Québec, qui estiment que les règles entourant les dates de péremption devraient être revues.

À partir de septembre, les supermarchés britanniques Waitrose supprimeront les mentions « Meilleur avant » sur près de 500 produits frais, en particulier des fruits et légumes sous emballage.

Cette mesure « vise à réduire le volume de gaspillage alimentaire des ménages britanniques en invitant les clients à faire preuve de jugement » au moment de décider si un produit est encore consommable.

Cette chaîne de supermarchés haut de gamme estime ainsi être en mesure de sauver l’équivalent de 7 millions de paniers de nourriture de la poubelle.

L’entreprise Waitrose n’est pas la première à opter pour une telle mesure. En 2018, le groupe de distribution international Tesco a supprimé les dates de consommation recommandée sur une centaine de produits. De son côté, la chaîne britannique de supermarchés Morrisons a retiré en janvier la date de péremption sur 90 % des produits de sa marque de lait maison, encourageant ses clients à sentir le contenu de la bouteille pour savoir s’il est toujours bon.

Modifier les règles

Un sondage mené au Québec par la firme Léger en mai dernier a révélé que la date de péremption représentait la deuxième raison en importance qui amène les consommateurs à gaspiller.

Pour Recyc-Québec, les règles entourant les dates de péremption mériteraient donc d’être revues « pour maximiser les efforts qui permettraient de réduire le gaspillage alimentaire ». La société d’État précise toutefois que l’étiquetage des aliments relève du fédéral.

Le Conseil de la transformation alimentaire du Québec (CTAQ) est du même avis.

On a demandé à plusieurs reprises à Santé Canada d’opter pour un meilleur libellé que ‘‘Meilleur avant’’, parce qu’on est bien conscient que ça crée du gaspillage.

Annick Van Campenhout, vice-présidente, progrès en alimentation et développement durable, au CTAQ

Sans retirer complètement les dates de péremption, le Conseil propose d’indiquer clairement sur l’étiquette que le produit est toujours bon, pendant un certain délai, au-delà de la date.

Influencer les consommateurs

Au Canada, la date « Meilleur avant » renseigne sur la fraîcheur et la durée de conservation potentielle des produits non ouverts, mais ne garantit pas la salubrité du produit.

« C’est bien connu et documenté que les dates “Meilleur avant” influencent le comportement des consommateurs et vont les décourager de consommer certains produits », soutient Louise Hénault-Ethier, directrice du Centre Eau Terre Environnement de l’Institut national de la recherche scientifique (INRS).

PHOTO ADRÉ PICHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Louise Hénault-Ethier, directrice du Centre Eau Terre Environnement de l’INRS

« Parfois, c’est une aberration totale. Quand il y a une date sur le sel de table, ça n’a pas lieu d’être », explique-t-elle.

Quand on parle de ‘‘meilleur avant’’, ça ne veut pas dire ‘‘plus bon après’’ et c’est souvent mal compris par les consommateurs.

Louise Hénault-Ethier, directrice du Centre Eau Terre Environnement de l’INRS

En revanche, certains aliments, tels que les préparations pour nourrissons et les suppléments nutritifs, doivent obligatoirement présenter une date de péremption. Au-delà de la date, l’aliment pourrait ne plus répondre aux normes canadiennes et sa teneur nutritive déclarée sur l’étiquette pourrait être modifiée. Ces aliments ne sont pas touchés par la mesure des supermarchés britanniques Waitrose.

Des consommateurs prêts au changement

Mme Hénault-Ethier estime que les Québécois seraient prêts à s’adapter à un retrait de la mention « Meilleur avant ». Les consommateurs rencontrés par La Presse à la sortie d’un supermarché montréalais, lundi, sont du même avis.

« Je suis tout à fait d’accord avec le principe. Il y a beaucoup de gaspillage en Amérique du Nord et au Canada. Je n’ai jamais tenu compte à 100 % de ces dates-là », dit Alain Boivin, sacs d’épicerie à la main.

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, ARCHIVES LA PRESSE

Alain Boivin

Quelques mètres plus loin, Diane Audy serait aussi d'accord avec cette mesure. « Quand tu achètes un produit, tu le vois s’il est bon. Il y en a qui sont un peu trop sensibles à la date et il y a énormément de gaspillage qui se fait », dit-elle.

De son côté, Philippe Lafrenière juge être en mesure d’estimer la durée de vie de ses aliments. « Les dates encouragent souvent les gens à jeter des aliments qui sont encore de bonne qualité », dit-il.

« Je pense qu’on est assez intelligents pour savoir quand ça n’a plus l’air bon », renchérit Isabelle Carrier, qui dit toutefois apprécier le fait d’avoir accès aux dates de péremption. « Tantôt, j’ai acheté des bagels. La première chose que j’ai faite, c’est de regarder la date et prendre les plus récents », dit-elle.

Avec l’Agence France-Presse

En savoir plus
  • 2,2 millions
    Nombre de tonnes d’aliments gaspillés au Canada chaque année
    SOURCE : Conseil national zéro déchet
  • 17 milliards de dollars
    Valeur de la perte causée par le gaspillage alimentaire
    SOURCE : Conseil national zéro déchet