(Québec) Tout comme la métropole, la Ville de Québec pourrait choisir de se soustraire à la nouvelle norme plus permissive sur le nickel dans l’air que s’apprête à mettre en place le gouvernement québécois.

« Ce serait possible », a confirmé lundi Jacob Martin-Malus, sous-ministre adjoint au ministère de l’Environnement du Québec.

« Il est prévu dans la Loi sur les compétences municipales que les municipalités puissent réglementer certains aspects liés à la qualité de l’air », a continué le haut fonctionnaire.

Le gouvernement Legault veut modifier les normes sur le nickel dans l’air au bénéfice de l’industrie. La limite pour les particules dans l’air doit passer de 14 à 70 nanogrammes par mètre cube (ng/m⁠3) quotidiennement.

Or, la mairesse de Montréal, Valérie Plante, a fait savoir la semaine dernière que la métropole n’allait pas se conformer à ce nouveau règlement. La limite permise de nickel dans l’air va demeurer à 15 ng/m⁠3 de nickel sur huit heures dans la métropole.

Montréal est la seule ville dans la province qui adopte ses propres normes sur la qualité de l’air. Mais voilà que le gouvernement confirme que d’autres villes pourraient emprunter ce chemin.

La norme de nickel dans l’air touche particulièrement Québec. C’est ici que la plupart des dépassements, sinon tous, ont été constatés. Le quartier Limoilou est particulièrement à risque, bordé par l’incinérateur de déchets et les activités de transbordement de nickel au port de Québec.

« Ce serait seulement à Québec qu’on observe des dépassements de la norme de nickel et ce sont des dépassements que je qualifierais d’occasionnels », a dit M. Martin-Malus lors d’une présentation technique aux médias.

La volonté du gouvernement provincial d’adopter une norme plus permissive sur le nickel a suscité une levée de boucliers dans la capitale. Plusieurs groupes citoyens s’y opposent farouchement.

La Ville de Québec va d’ailleurs tenir jeudi une séance plénière sur la question. Bruno Marchand n’a pas encore fait connaître sa position, mais il répète que « tout est sur la table ».

« S’il est possible que la norme soit différente à Montréal, il n’y a aucune raison que ce ne soit pas aussi le cas pour Québec. La réalité des milieux urbains doit être prise en compte dans ce projet de règlement », a déclaré lundi le maire Bruno Marchand.

Mais la Ville ne pourrait pas décider de se soustraire à la norme québécoise du jour au lendemain. Elle devrait établir sa norme, la documenter et ensuite en faire la demande au ministre de l’Environnement.

Une experte se veut rassurante

L’exposition à des quantités importantes de nickel dans l’air est associée à une augmentation du risque de cancer du poumon.

Mais lors de la présentation technique lundi, une experte qui a produit un rapport pour le gouvernement a estimé que « le risque devrait être négligeable » avec la nouvelle norme.

Michèle Bouchard, professeure titulaire à l’École de santé publique de l’Université de Montréal, avait pourtant recommandé une norme de 40 ng/m3 quotidiennement. Le gouvernement a plutôt retenu 70 ng/m3.

La chercheuse a rappelé que plusieurs États avaient des normes similaires. L’Ontario, par exemple, permet une moyenne quotidienne maximale de 100 ng/m3.

Attirer des investissements

Le sous-ministre adjoint explique que la décision de revoir la norme provient en partie de considérations économiques.

« Derrière ça, il y a le fait de pouvoir attirer des investisseurs internationaux dans des projets liés à la transition énergétique, à l’électrification des transports. Tout ça motive en partie la démarche actuelle », avance Jacob Martin-Malus, du ministère de l’Environnement.

Le nickel est notamment un des métaux névralgiques dans la fabrication de batteries pour les voitures électriques.

Le gouvernement du Québec fait valoir que la nouvelle norme, bien que plus permissive, sera toutefois appliquée rigoureusement.

« L’intention du gouvernement est d’assurer l’application du règlement, assure M. Martin-Malus. Toute situation où il y aurait un dépassement sera évaluée par le Centre de contrôle environnemental du Québec. »

Le gouvernement a enregistré à Limoilou un dépassement de plus de 20 fois la norme à une occasion en 2020 et un autre de 14 fois la norme en 2021.

« Malgré la modification de la norme de 14 à 70 ng/m3, ça va rester complexe à respecter à 100 %, note M. Martin-Malus. Alors, on va travailler avec les directions régionales de santé publique et les partenaires économiques pour assurer le respect de la réglementation. »