Face aux changements climatiques, les Québécois sont de plus en plus convaincus que les actions collectives sont plus efficaces que les gestes individuels. Mais il y a un hic. La population estime aussi que les gouvernements sont encore très loin d’accomplir les gestes nécessaires pour lutter contre le réchauffement planétaire. Gros plan sur le plus récent Baromètre de l’action climatique dévoilé mercredi.

Préoccupations en forte baisse

De 2020 à 2021, le niveau d’inquiétude des Québécois pour les questions environnementales a connu une baisse importante : 61 % de la population se disait préoccupée « par les problèmes environnementaux en général », contre 79 % un an plus tôt. Le recul est encore plus marqué quant à l’importance accordée à l’image que chacun projette au sujet des gestes faits au quotidien face aux changements climatiques. En 2020, 71 % des Québécois se disaient « soucieux » de leur image sur ce plan, alors que la proportion est passée à 52 % un an plus tard. Selon Valériane Champagne St-Arnaud, professeure de marketing à l’Université Laval et coauteure du Baromètre de l’action climatique, la pandémie de COVID-19 est l’explication la plus plausible à ce recul. « Les Québécois sont épuisés, ils sont à bout, comme le montre l’enquête de la Dre Mélissa Généreux [au sujet des répercussions de la pandémie sur la santé mentale de la population]. »

La confiance dans les gouvernements au plus bas

La population est de plus en plus critique des différents ordres de gouvernement. Seulement 7 % des Québécois croient que le gouvernement fédéral en fait suffisamment pour faire face à la crise climatique. Le gouvernement du Québec fait à peine mieux, à 11 %, tandis que les villes sont jugées un peu moins sévèrement, à 14 %. Dans les trois cas, les chiffres de 2021 constituent des reculs d’au moins 15 points de pourcentage par rapport à 2020. Ces données sont d’une certaine façon le reflet d’une prise de conscience collective voulant que les solutions individuelles ne suffisent pas. « La population reconnaît la problématique, refuse le statu quo et exige maintenant une action sérieuse pour contrer les changements climatiques », estime Alain Branchaud, directeur général de la Société pour la nature et les parcs, section Québec. « C’est une excellente nouvelle qui nous prépare à la prochaine étape d’acceptation des changements profonds à opérer dans notre mode de vie. »

La responsabilité individuelle a ses limites

Si l’action gouvernementale est très critiquée par le public, c’est entre autres parce que la cohérence n’est pas toujours au rendez-vous, croit la Dre Claudel Pétrin-Desrosiers, médecin de famille et présidente de l’Association québécoise des médecins pour l’environnement. « En matière de changements climatiques, des contradictions comme l’achat d’un pipeline [au fédéral] ou le projet de troisième lien [au provincial] viennent miner les autres actions gouvernementales, et le test de la crédibilité passe par la cohérence », précise-t-elle. La Dre Pétrin-Desrosiers se réjouit néanmoins de constater que de plus en plus de Québécois croient qu’il est nécessaire d’agir collectivement pour faire face aux changements climatiques. En effet, la proportion de ceux qui jugent que des actions collectives sont requises est passée de 57 % en 2020 à 70 % en 2021. « Le poids de la transition ne doit pas reposer seulement sur les individus ; les gouvernements ont une grande responsabilité », ajoute la jeune médecin. « La population est de plus en plus exigeante envers les autorités publiques », confirme Valériane Champagne St-Arnaud.

L’éventail des mesures a aussi ses limites

Malgré cette prise de conscience, toutes les mesures qui peuvent être déployées ne reçoivent pas le même appui. Par exemple, 62 % de la population se dit favorable à ce que des frais supplémentaires soient imposés lors de l’achat de billets d’avion afin de compenser les émissions de gaz à effet de serre. Presque une personne sur deux (48 %) appuie une mesure similaire pour la livraison des achats en ligne. Et seulement 33 % des Québécois sont en faveur d’une somme qui leur serait facturée pour l’utilisation du réseau routier. « On voit bien que, quand ça touche plus directement les gens, on sent une résistance aux changements », analyse Valériane Champagne St-Arnaud.

Consultez l’édition 2021 du Baromètre de l’action climatique

Quelques bonnes nouvelles

De nouvelles mesures d’évaluation ont été ajoutées au Baromètre en 2021. Par exemple, 58 % des Québécois disent vouloir un lieu de résidence à proximité de leurs activités principales, et 46 % veulent aussi choisir leur domicile en tenant compte des possibilités de déplacement écoresponsables, comme la marche, le vélo ou les transports en commun.

Qu’est-ce que le Baromètre de l’action climatique ?

Le Baromètre de l’action climatique est le fruit d’une collaboration entre l’Université Laval et le média spécialisé en environnement Unpointcinq. L’enquête qui a mené à ce troisième rapport a été réalisée du 27 septembre au 2 octobre auprès d’un échantillon de 2002 personnes âgées de 18 ans et plus vivant au Québec.

89 %

Proportion de répondants qui affirment faire des gestes pour le climat

33 %

Proportion de répondants qui croient qu’une majorité de Québécois font des gestes pour le climat

Source : Baromètre de l’action climatique 2021