(Victoriaville) En voyant tous ces sièges d’auto pour enfant envoyés au dépotoir, François Filion s’est mis en tête de leur trouver une seconde vie. Patiemment, il a tricoté tout un réseau de récupération, une démarche qui illustre toute la complexité du recyclage des objets composés de plusieurs matières. Premier de deux textes pour raconter ce parcours.

 « Oui, c’est vrai. C’est comme une mission. »

À voir le dévouement que François Filion a mis dans son projet, on se dit en effet que son « loisir écologique », comme il le dit, s’approche plus du missionnariat que du bénévolat. N’empêche, grâce à son entêtement à éviter que les vieux sièges d’auto pour enfant se retrouvent à la poubelle, 25 000 d’entre eux ont été recyclés à ce jour en mobilier urbain, comme des bancs de parc ou des tables à pique-nique.

Résumons : il y a environ cinq ans, alors qu’il s’adonnait à la récupération du métal, François Filion a remarqué que les propriétaires de sièges d’auto pour enfants n’avaient d’autre choix que de les envoyer à la poubelle lorsque la garantie du fabricant était échue. Pour des raisons de sécurité, à cause de la détérioration du plastique avec le temps, la durée de vie d’un siège de voiture pour enfant est de 6 à 12 ans après sa date de fabrication.

« Ça fait une grosse quantité de plastique envoyée à la poubelle », a remarqué l’homme de 59 ans. Et du plastique de qualité, en plus, qui pourrait intéresser les transformateurs.

Mais voilà, un siège de voiture n’est pas seulement fait de plastique. Il contient aussi du textile, des sangles, de la styromousse, de la mousse pour le rembourrage, des vis, des barres, des rivets, des ressorts de métal… Le tout, évidemment, solidement fixé à la grande coque de plastique rigide convoitée par les recycleurs.

François Filion a donc entrepris de démonter les sièges pour en recycler chacune des composantes. Mais bien vite, malgré sa vitesse d’exécution (de 15 à 20 minutes pour démonter un siège de conception simple, jusqu’à 1 heure pour les sièges plus complexes), il a manqué de temps pour venir à bout de tous ces sièges qui commençaient à s’accumuler dans son garage.

C’est alors que son réseau a commencé à se mettre en place.

Du temps et de la patience

Édith Laflamme est éducatrice au centre de jour pour adultes en déficience intellectuelle et en trouble du spectre de l’autisme de Saint-Léonard-d’Aston, près de Victoriaville. L’an dernier, après avoir entendu parler de l’aide dont François Filion avait besoin pour démonter des sièges, elle a pris contact avec lui.

PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

Vanessa Leroy et Sylvain Lizé en plein travail, avec Lise Rheault, assistante en réadaptation. 

Depuis l’été dernier, donc, des participants du centre font du démontage. « Ce ne sont pas tous les participants qui aiment démonter les sièges », dit-elle. La tâche demande patience, débrouillardise et motricité fine. « Ils doivent aussi s’entraider pour trouver des solutions », ajoute-t-elle.

Au moment de notre visite, à la fin de janvier, Vanessa Leroy et Sylvain Lizé étaient au travail. À l’aide de tournevis pied-de-biche, de pinces, de ciseaux ou d’une petite scie, ils enlevaient patiemment chacune des pièces. « Le plus difficile, c’est le métal », a dit Sylvain, en montrant une pièce du système de harnais fixée à la coque. « Mais on a trouvé un truc pour l’enlever », a-t-il assuré, en expliquant comment il s’était servi d’une perceuse pour en venir à bout.

À mesure que les sièges sont démontés, les composantes sont classées dans différents bacs qui seront récupérés par François Filion.

PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

Sylvain Lizé s’exécute sous l’œil vigilant
de Lise Rheault. 

L’homme le reconnaît : il consacre beaucoup de temps et d’énergie à son projet bénévole (il occupe un autre emploi à temps plein). Il va lui-même chercher des sièges avec son propre véhicule dans les écocentres où le CAA – qui vient de conclure un partenariat avec lui – encourage ses membres à déposer leurs vieux sièges (dont celui de L’Islet, à quelque 200 km de Victoriaville !). Il va ensuite porter les sièges aux bénévoles, puis récupère les pièces qu’il apporte chez les transformateurs.

Et tout ça, François Filion le fait sans autre financement que l’argent qu’il tire essentiellement de la vente du métal et du plastique… dont les prix fluctuent selon la demande.

« Ma principale motivation est environnementale, dit cet ancien candidat du Parti vert. Je le fais parce que j’aime ça. Et parce que c’est bon pour la planète ! »

Beaucoup de sièges à récupérer

N’empêche. Avec 80 000 naissances par année, et une utilisation d’au moins trois types de siège et réhausseur jusqu’à l’âge de 9 ans, ça commence à faire beaucoup de sièges à récupérer… « Actuellement, reconnaît M. Filion, je ne suis pas capable d’en prendre plus. » Ne devrait-il pas y avoir des écofrais imposés à l’achat des sièges, comme c’est le cas lors de l’achat d’appareils électroniques ? Ou une autre forme de paiement comme ailleurs au Canada (voir encadré) ? Pour l’instant, les sièges ne figurent pas sur la liste prioritaire des articles à recycler, confirme Recyc-Québec.

Pierre-Olivier Fortin, du CAA, craint pour sa part qu’une hausse du coût d’un siège neuf ne pousse des parents à utiliser un vieux siège désuet plutôt qu’un nouveau. Il reconnaît néanmoins la valeur du travail environnemental de l’équipe de François Filion et la nécessité de réfléchir à une forme de financement du recyclage des sièges.

« Ça tient à la dévotion de quelques individus ! dit M. Fortin. François Filion fait un travail d’exception, et a investi temps et argent. S’il décide de ne plus le faire, quel sera le plan B ? »

Payer 15 $ pour faire recycler son siège ?

Des programmes existent dans certaines villes canadiennes (notamment en Alberta, en Ontario et en Colombie-Britannique) pour recycler les vieux sièges de voiture. Les contraintes sont cependant sévères : ceux qui souhaitent donner une autre vie à leurs sièges doivent les apporter eux-mêmes à des points de dépôt précis, après les avoir débarrassés au moins du textile et des sangles. Mais surtout, ils doivent acquitter des frais de recyclage variant entre 5 $ et 15 $ selon les endroits.

Du siège d’auto au banc de parc

À lire, le deuxième volet de notre série sur le recyclage des sièges d’auto pour enfants : Du siège d’auto au banc de parc.

Sur l’écran radar

Fermeture réclamée d’un oléoduc polluant

PHOTO EMRE RENDE, ARCHIVES REUTERS

Des habitants du Soudan du Sud

Un oléoduc stratégique au Soudan du Sud a subi en 2019 au moins deux graves fuites, s’est inquiétée mardi dernier l’ONG allemande Sign of Hope, appelant les autorités à le fermer pour éviter de nouvelles pollutions. L’ONG, qui étudie depuis des années les effets de la pollution provoquée dans le pays par l’exploitation pétrolière, a précisé dans un rapport avoir utilisé des images satellites pour détecter ces deux fuites, dont une seule avait été annoncée par les autorités. La première, il y a environ cinq mois, près de Rubkona, dans le nord du pays, avait laissé s’échapper l’équivalent de 2000 barils de brut dans la nature, selon les déclarations à l’époque du ministre du Pétrole Awou Daniel Chuang. Mais l’ONG juge cette estimation irréaliste, compte tenu des « fuites massives dans toutes les directions » observées par satellite, et considère qu’il s’agit plutôt de l’équivalent de 12 500 barils, ou 2 millions de litres, qui se sont répandus et ont pollué l’eau. Sign of Hope a également affirmé avoir découvert une seconde fuite, deux fois plus importante – l’équivalent de 25 000 barils – qui n’avait été signalée ni par le gouvernement ni par les compagnies pétrolières, à 6,5 km de la précédente. « Le principal oléoduc pour l’exportation au Soudan du Sud est délabré. C’est la raison pour laquelle il connaît des ruptures, qui provoquent des fuites massives de pétrole », a affirmé l’ONG.

— Agence France-Presse

La justice britannique rejette le projet d’agrandissement d’Heathrow

PHOTO HANNAH MCKAY, REUTERS

La Cour d’appel de Londres a jugé que le projet d’extension d’Heathrow n’était pas assez respectueux de l’environnement.

La justice britannique a donné raison jeudi aux écologistes opposés à la construction d’une troisième piste à l’aéroport londonien d’Heathrow, le plus fréquenté d’Europe, ce qui pourrait enterrer le projet. Cette décision est symbolique pour les défenseurs de l’environnement à quelques mois de l’organisation de la COP26 à Glasgow et pourrait peser sur les projets d’infrastructure du gouvernement à travers le pays pour aider l’économie après le Brexit. La Cour d’appel de Londres a jugé que ce projet d’extension n’était pas assez respectueux de l’environnement et que le précédent gouvernement conservateur, qui l’a approuvé en 2018, aurait dû tenir davantage compte des accords de Paris de 2015 visant à limiter le réchauffement climatique. « Les accords de Paris auraient dû être pris en compte par le ministre [des Transports], […] et il aurait dû expliquer comment il les prenait en compte, mais cela n’a pas été le cas », a déclaré le juge Keith Lindblom. L’aéroport d’Heathrow a immédiatement fait savoir qu’il faisait appel devant la Cour suprême.

— Agence France-Presse

Des mesures de protection de l’Amazonie ordonnées par la justice

PHOTO GETTY IMAGES

La justice colombienne a ordonné des mesures de protection dans les parcs naturels de l’Amazonie afin de freiner la déforestation et les feux volontaires.

La justice colombienne a ordonné des mesures de protection dans les parcs naturels de l’Amazonie afin de freiner la déforestation et les feux volontaires, a annoncé le Parquet mardi dernier. Ces mesures contraignent les autorités à mettre fin aux installations humaines, à limiter l’élevage et à suspendre les prêts publics pour des projets agricoles dans les parcs naturels de Tinigua et de Los Picachos, selon un communiqué. Il y a une « perte accélérée de la forêt indigène » et des feux pour aménager des espaces agricoles dans ces zones protégées des départements du Meta, du Guaviare et du Caqueta, a ajouté le Parquet dans ce texte. Des mesures de protection avaient été sollicitées par le Parquet à un juge du Caqueta lors du procès d’une vingtaine de personnes accusées d’occupation de zones de réserve et d’avoir déboisé plus de 1800 hectares de jungle en cinq ans pour développer des projets agricoles. D’une superficie de 447 740 hectares, le parc de Los Picachos est considéré comme l’un des sites « les plus complets et biodivers » de Colombie, connectant la cordillère des Andes, le bassin de l’Orénoque et l’Amazonie. Son écosystème comprend des paramos ou landes humides d’altitude, de la forêt humide andine, de la jungle humide et de la forêt inondable, selon la direction des parcs nationaux.

— Agence France-Presse

COP26 : de hauts responsables économiques pressent la finance de s’engager

PHOTO TOLGA AKMEN, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Mark Carney, gouverneur de la Banque d’Angleterre

De hauts responsables économiques, dont les dirigeants de la Banque d’Angleterre et de la Banque centrale européenne, ont demandé jeudi au monde de la finance d’accroître ses efforts en faveur de l’environnement, dans le contexte de la COP26 qui se tiendra à Glasgow. « Vous pouvez tous contribuer à une transition réussie vers une économie neutre en carbone », a souligné le gouverneur de la Banque d’Angleterre (BoE), Mark Carney, devant un parterre d’investisseurs réuni au Guildhall, le siège de la City of London Corporation, le cœur politique du très influent quartier d’affaires londonien. S’exprimant en tant que conseiller du gouvernement à l’organisation de la COP26, le futur envoyé spécial des Nations unies pour le climat a insisté sur l’importance d’étendre l’évaluation et la publication des risques climatiques pour les entreprises. Lors de cet événement destiné à amorcer la mobilisation avant la COP26, qui se tiendra à Glasgow, en Écosse, à la fin de l’année, plusieurs dirigeants de grandes sociétés financières, comme Philipp Hildebrand, vice-président de BlackRock, le plus gros gestionnaire d’actifs au monde, ou David Schwimmer, patron du London Stock Exchange (LSE), ont discouru sur leurs ambitions climatiques. « La décarbonisation est l’avenir. Avec d’immenses occasions pour ceux qui sont prêts à agir maintenant », a fait miroiter Alok Sharma, ministre britannique chargé des Entreprises.

— Agence France-Presse