Ottawa a annoncé jeudi que la « taxe fédérale sur le carbone » sera imposée à l’Alberta à compter du 1er janvier.

Le gouvernement conservateur de l’Alberta a officiellement adopté la semaine dernière une loi qui abolit la taxe provinciale sur le carbone mise en place jadis par les néo-démocrates de Rachel Notley. Le chef du Parti conservateur uni, Jason Kenney, en avait fait une promesse électorale et il a remporté le scrutin d’avril. Bien que l’Alberta ait supprimé la taxe pour les particuliers, elle la maintient pour les grands émetteurs industriels.

La ministre fédérale de l’Environnement, Catherine McKenna, a indiqué jeudi qu’elle avait écrit au gouvernement albertain pour l’informer de la décision d’Ottawa.

« C’est regrettable, car l’Alberta avait son propre plan pour imposer un prix à la pollution et l’Alberta doit absolument faire partie de notre stratégie climatique nationale, car l’Alberta a les émissions les plus élevées au pays », a déclaré Mme McKenna à Ottawa, jeudi.

« Nous constatons les effets des changements climatiques, par le biais de conditions météorologiques extrêmes, entre autres en Alberta, où les incendies de forêt se déclarent plus tôt dans la saison, sont plus violents et ont de graves répercussions sur la vie des Albertains ainsi que sur leur économie. »

Selon la ministre, 90 % des recettes de la redevance fédérale sur les combustibles retournera aux contribuables albertains, sous forme de paiements, libres d’impôt, lorsqu’ils produiront leur déclaration de revenus. Les 10 % restants serviront à améliorer l’efficacité énergétique de bâtiments dans cette province.

Ottawa estime qu’une famille albertaine moyenne de quatre personnes recevra un remboursement de 888 $ l’année prochaine.

Le premier ministre de l’Alberta, Jason Kenney, a déclaré qu’il ne croyait pas Mme McKenna. « Je ne peux tout simplement pas acheter ces promesses concernant la taxe sur le carbone », a-t-il déclaré à Fredericton, où il rencontrait le premier ministre conservateur du Nouveau-Brunswick, Blaine Higgs, lui aussi opposé à la taxe fédérale.

« Le propre ministère de Mme McKenna a déclaré que la taxe devrait être de 300 $ la tonne pour atteindre les objectifs de Paris en matière de climat, a dit M. Kenney. Si vous croyez vraiment qu’une taxe sur le carbone puisse être l’instrument d’une politique climatique, cette taxe sur le carbone devrait être de 200 à 300 $ minimum pour avoir un effet significatif sur la consommation » de carburants fossiles.

Sauvée par les élections ?

Plusieurs études ont démontré que la taxe provinciale sur le carbone en Colombie-Britannique avait fait chuter de 15 % les émissions et réduit la consommation d’essence et de gaz naturel par habitant.

Le ministre de l’Environnement de l’Alberta, Jason Nixon, a estimé que le délai accordé à l’imposition de la taxe fédérale — jusqu’en janvier — constitue une belle occasion de débattre encore de cet enjeu. « Avec les élections fédérales (d’octobre) entre les deux, beaucoup de choses peuvent se passer d’ici le 1er janvier », a-t-il aussi souligné.

L’Alberta s’est jointe à quatre autres provinces — le Nouveau-Brunswick, l’Ontario, le Manitoba et la Saskatchewan — qui ont refusé d’adopter leur propre système de « prix sur le carbone », ce qui a poussé Ottawa à leur imposer sa propre « tarification de la pollution ».

Keith Stewart, de Greenpeace, a déclaré que ce mouvement constant de va-et-vient de politiciens qui tentent de défaire le travail des autres ne fait qu’empirer les choses. « Ces changements de politiques sont néfastes pour notre climat, notre santé et notre économie », a-t-il soutenu. « Faisons en sorte que la transition se déroule sans heurts. Le Canada a besoin d’une réponse coordonnée et urgente à la crise climatique, et non de politiciens qui se mettent la tête dans le sable. »

La ministre McKenna n’a pas expliqué pourquoi la taxe fédérale n’entrera en vigueur que le 1er janvier.

Le premier ministre Kenney a déjà déclaré que si Ottawa devait imposer sa « taxe carbone » en Alberta, la province se joindrait à la Saskatchewan et à l’Ontario pour contester sa validité devant les tribunaux.

La taxe fédérale s’élève actuellement à 20 $ la tonne d’émissions de gaz carbonique, mais elle devrait ensuite augmenter de 10 $ par année pour atteindre 50 $ la tonne d’ici 2022.