Il est possible d'identifier les régions où la fracturation hydraulique est le plus susceptible de causer des tremblements de terre, selon une nouvelle étude canadienne. Cela permettra de limiter l'intensité de l'exploitation du gaz et du pétrole de schiste plutôt que de la limiter si le nombre de séismes augmente, après coup, comme c'est la pratique actuellement dans l'ouest du Canada.

« Nous pensons avoir compris le mécanisme en cause », explique David Eaton, de l'Université de Calgary, qui est l'auteur principal de l'étude publiée dans la revue Science. « Nous avons identifié des lignes de faille auparavant inconnues, situées entre 3,4 et 4,1 kilomètres de profondeur.

« Quand nous aurons des simulations numériques et une connaissance détaillée de cette région du sous-sol dans les zones où un développement des hydrocarbures est proposé avec la technologie de la fracturation hydraulique, il sera possible de prévoir à l'avance les limites qu'il faut imposer pour éviter que le nombre de séismes augmente. »

Même en Alberta et en Colombie-Britannique, où se trouve l'essentiel de l'industrie de la fracturation hydraulique au pays, le nombre de séismes d'importance est rare, selon M. Eaton : 0,3 % de tous les séismes sont supérieurs à 3 à l'échelle de Richter. Le tremblement de terre d'Amatrice, en Italie, qui a fait 300 morts en août dernier, avait une magnitude de 6,2, une puissance 30 000 fois supérieure à un tremblement de terre de force 3. En Alberta, l'exploitation d'un puits doit être interrompue si un séisme de force supérieure à 4 survient.

M. Eaton est arrivé à ces résultats en analysant de façon détaillée la sismologie des régions entourant plusieurs puits de gaz et de pétrole de schiste, dont les données d'exploitation lui ont été fournies par les exploitants. Il veut maintenant analyser plus en détail le lien entre l'injection de fluides et les « séismes induits » par l'exploitation des hydrocarbures. « Dans les puits traditionnels de pétrole, on utilise aussi l'injection de fluides pour augmenter la pression dans les puits et le taux de récupération du pétrole, dit M. Eaton. Ça semble être le principal mécanisme des séismes induits, plutôt que le poids des réservoirs d'eaux usées. »

« TOUT DÉPEND DE LA PERCEPTION DU RISQUE »

Les simulations numériques permettront-elles un jour d'interdire la fracturation hydraulique dans les régions plus sensibles ? « Je préfère ne pas répondre à cette question, dit M. Eaton. Tout dépend de la perception du risque. Il semble que plus les gens sont familiers avec une technologie, plus ils sont disposés à vivre avec des risques faibles. La même chose s'est produite à l'avènement de l'automobile : au départ elle faisait très peur, après un certain temps on s'est rendu compte que le risque d'accident était somme toute relativement bas. »

Quand une simulation numérique du risque de séisme sera-t-elle assez abordable pour que les autorités l'exigent pour les permis de fracturation hydraulique ? « C'est très difficile à prévoir, dit M. Eaton. On pense que, dans la prochaine année ou deux, on publiera à nouveau sur le sujet plus précis du rythme et du volume d'injection. Mais au-delà de ça, je ne peux pas m'engager. »

Pense-t-il voir une telle application commerciale avant sa retraite ? « Oui, certainement », dit en riant M. Eaton, qui est au milieu de la cinquantaine.

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Fuites dans les puits fermés

S'ils sont mal colmatés, les puits de pétrole émettent du méthane, un puissant gaz à effet de serre, après la fin de leur exploitation, selon une nouvelle étude américaine. En Pennsylvanie, ces fuites équivalent chaque année à 5 à 8 % des émissions de méthane de cet État américain, le premier où a eu lieu l'exploitation commerciale moderne de l'or noir, en 1859. Il y aurait entre 470 000 et 750 000 puits abandonnés en Pennsylvanie, dont une minorité - 10 % - sont responsables de 90 % des émissions de méthane. « Ça montre l'importance de suivre les bonnes pratiques de fermeture des puits à la fin de leur vie commerciale », explique Mary Kang, de l'Université Stanford, l'auteure principale de l'étude publiée dans la revue PNAS, qui étudie maintenant le type de géologie plus susceptible de fuites et la contamination des nappes d'eau souterraines.

EN CHIFFRES

21 > Nombre annuel de séismes de force supérieure à 3, en moyenne entre 1973 et 2008, à l'est des Rocheuses aux États-Unis

600 > Nombre de séismes de force supérieure à 3 en 2014 à l'est des Rocheuses aux États-Unis

1000 > Nombre de séismes de force supérieure à 3 en 2015 à l'est des Rocheuses aux États-Unis

SOURCE : USGS