Le chef néo-démocrate Thomas Mulcair accuse ses adversaires conservateurs et bloquistes d'aller trop loin en politisant la question du niqab durant cette campagne. Mais signe que la question continue à soulever des vagues au Québec, les deux principaux maires de la province ont jugé bon hier de se prononcer publiquement contre la prestation de serment à visage couvert.

Alors que ses adversaires faisaient une pause pour se préparer au premier débat de la campagne en français, qui a lieu ce soir, Thomas Mulcair a livré hier un discours pour dénoncer la tournure de la campagne. « Depuis plusieurs jours, cette campagne a pris un tournant négatif, plus vicieux, plus divisif que jamais, tout à fait comme le souhaitent Stephen Harper et les conservateurs », a déploré le chef du Nouveau Parti démocratique (NPD).

Évoquant la mort du jeune réfugié syrien sur une plage de Turquie puis le débat sur le port du niqab, Thomas Mulcair a estimé que « les conservateurs ont franchi la ligne avec l'intention de faire peur aux Canadiens, quitte à le faire sur le dos de citoyens vulnérables ».

Plus tard, il a aussi écorché le Bloc - sans le nommer - en critiquant les récentes publicités politiques qui ont traité de la question du niqab. « Quand on fait de la caricature publicitaire pour marquer des points politiques, je pense aux personnes qui se sentent visées », a dit le chef néo-démocrate.

Il faisait ainsi référence à une vidéo du Bloc dans laquelle on voit une goutte de pétrole se transformer en niqab. « Si on n'est pas d'accord avec le port du niqab pour voter ou se faire assermenter, Thomas Mulcair, lui, il l'est », accuse la narratrice.

Le chef du NPD a profité de son discours pour clarifier sa position. « Je comprends que le port du niqab par une femme puisse créer un malaise et même de la colère. Je comprends qu'on puisse y voir un symbole d'infériorité et d'oppression des femmes. Là-dessus, je veux être clair, personne n'a le droit de dire à une femme ce qu'elle doit ou ne doit pas porter. »

« Si certaines de ces femmes sont opprimées, on doit les aider. Ce n'est pas en les privant de leur citoyenneté canadienne et de leurs droits qu'on va y arriver. »

Invité à commenter le mouvement des Québécois qui prévoient voter à visage couvert le 19 octobre pour protester contre le port du voile, Thomas Mulcair a répondu : « Vous avez le droit de voter assis dans votre salon. Si ça vous tente de le faire avec un sac de papier sur votre tête, personne ne peut vous en empêcher. »

Sur la question des prestations de serment le visage voilé, le chef du NPD s'est dit satisfait des mesures en place, qui prévoient l'identification des femmes avant le début de la cérémonie.

Coderre et Labeaume se prononcent

Si le chef néo-démocrate a tenté de mettre le couvercle sur la marmite du niqab, la question a continué à dominer la campagne fédérale. Invité à se prononcer lors de la visite de Thomas Mulcair dans son hôtel de ville, le maire de Montréal Denis Coderre s'est clairement prononcé pour l'obligation pour les femmes de prêter serment à visage découvert.

« Tu deviens citoyen, alors faut que tu te montres la face. »

Le premier magistrat de la métropole s'est dit convaincu que le port du niqab « n'est pas une question de religion, c'est clairement une question de culture. Le voile, ça va, tant qu'on peut voir le visage ».

Sur la question de voter à visage couvert, le maire Coderre s'est toutefois montré plus nuancé, soulevant la difficulté posée par le vote par la poste. Obliger le vote à visage découvert imposerait de « tout remettre en question la façon de voter », a-t-il souligné.

Moins nuancé, le maire de Québec s'est dit carrément opposé au port du voile couvrant le visage. « Je suis contre le port du niqab. Aucun motif religieux ne devrait servir de prétexte pour justifier une pratique qui infériorise la femme », a-t-il écrit.

Le maire de Québec ajoute que « d'un strict point de vue d'identification à des fins juridiques et administratives, il est essentiel, tant pour les femmes, les hommes et les enfants, de se présenter à visage découvert devant les autorités concernées. Cela ne constitue en rien une entrave à la liberté des individus ».