À la veille du très attendu témoignage de l'ex-chef de cabinet du premier ministre Nigel Wright, Stephen Harper s'est attiré mardi les railleries de ses rivaux qui l'accusent de se défiler en fuyant au pôle Nord.

Avec la reprise en pleine campagne électorale du procès de l'ex-sénateur Mike Duffy mercredi, les questions au chef conservateur sur ce dossier embarrassant risquent de se multiplier. Comme l'avion de campagne de M. Harper s'apprête à se poser aux Territoires du Nord-Ouest et au Nunavut à la fin de la semaine, Thomas Mulcair prétend que M. Harper tente «d'aller se cacher au pôle Nord».

«Il a essayé de s'esquiver de mes questions à la Chambre des communes par rapport à M. Duffy, mais ça n'a pas marché. Il peut s'éloigner dans l'Arctique, mais les questions vont continuer de le talonner», a lancé le chef néo-démocrate. Selon lui, M. Harper a dit une chose et son contraire dans l'affaire Duffy, et il croit que la réalité va bientôt le rattraper.

Le leader du Parti libéral, Justin Trudeau, a tapé sur le même clou en affirmant que les Canadiens allaient découvrir avec cette reprise du procès que les conservateurs agissent dans l'intérêt de leur parti plutôt que celui de la population. Il a d'ailleurs profité d'une visite à son bureau de campagne de Papineau, à Montréal, pour rappeler son intention de réformer le Sénat et annoncer des «mesures de transparence».

«Après s'être fait élire en promettant plus d'imputabilité et de transparence, M. Harper a dirigé le gouvernement le plus partisan et le plus secret de l'histoire de notre pays», a déploré M. Trudeau.

Le chef conservateur, lui, n'a pas paru ébranlé à l'approche de la reprise de ce procès médiatisé. En campagne à Markham, en Ontario, il a répété qu'il avait d'abord cru que c'était M. Duffy qui avait remboursé ses 90 000 $ de dépenses inappropriées - pas M. Wright. «Quand j'ai appris que ce n'était pas le cas, j'ai pris des actions nécessaires et des gens sont en train d'être tenus responsables pour leurs actions», a-t-il affirmé.

M. Harper a toutefois esquivé les questions spécifiques sur le sujet, notamment si M. Wright avait démissionné ou avait plutôt été congédié.

Lutte contre la drogue

Après avoir beaucoup évoqué la sécurité au cours des derniers jours, M. Harper a abordé un autre de ses sujets de prédilection mardi en annonçant diverses mesures contre la drogue. Il a promis de hausser le financement des activités de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) contre les laboratoires clandestins de production de stupéfiants et de mettre sur pied une ligne téléphonique d'aide aux proches des toxicomanes. Il entend également exiger de la Commission de la santé mentale du Canada qu'elle se penche davantage sur les liens entre la toxicomanie et la santé mentale.

Le chef conservateur a ainsi voulu tracer une ligne claire entre lui et ses adversaires, qui prônent une approche plus souple à l'égard de la marijuana, M. Trudeau allant jusqu'à faire l'apologie d'une légalisation. M. Harper croit que la majorité des gens aux pays rejettent cette idée. «Nous pensons que c'est la mauvaise direction pour la société et je ne pense pas que c'est la façon dont la plupart des Canadiens veulent s'attaquer au problème», a-t-il dit.

Syndicats et souverainistes

Comme ils le font régulièrement, les syndicats se sont invités dans la campagne électorale. La Fédération des travailleurs du Québec (FTQ) a notamment délaissé son traditionnel appui au Bloc québécois en adoptant une stratégie «n'importe qui, sauf les conservateurs», ce qui se traduira plus souvent qu'autrement par un appui au candidat néo-démocrate local.

En entrevue, le secrétaire général de la centrale syndicale, Serge Cadieux, a expliqué qu'à ses yeux l'appui offert au Bloc québécois par le passé avait échoué puisque les conservateurs sont au pouvoir depuis 2006.

Si cette sortie a semblé faire le bonheur de M. Mulcair, elle a fait grincer des dents les autres partis politiques. M. Trudeau s'est même servi de cet appui pour insinuer que le NPD n'était pas aussi fédéraliste que le PLC.

«La FTQ est un organisme ouvertement et officiellement séparatiste. Ça m'aurait surpris qu'ils appuient un parti comme le Parti libéral, qui est un parti réellement fédéraliste», a-t-il lancé.

Le chef bloquiste Gilles Duceppe a quant à lui mis en doute la stratégie des syndicats québécois, puisque à son avis, c'est plutôt à l'extérieur du Québec que les conservateurs risquent de faire des gains. «Ce n'est pas ici que les conservateurs de Harper gagnent, c'est dans le reste du Canada. Moi je dis aux syndicats: faites votre job ailleurs si vous voulez battre Harper. Ici on la fait, on le bat régulièrement», a-t-il lancé.

Le ministre conservateur québécois Denis Lebel a quant lui visé directement les centrales syndicales sur Twitter, les accusant de «détournement des cotisations des travailleurs pour de la politique partisane».

Débat supplémentaire

S'ils croisent actuellement le fer par points de presse interposés, les chefs auront la chance de le faire en face à face une fois de plus, puisque le nombre de débats des chefs confirmés à venir est passé à deux. M. Mulcair a en effet accepté de participer à un débat sur les affaires étrangères bilingue organisé par Munk Debates. Il a par ailleurs pressé le premier ministre sortant d'accepter l'offre d'un autre débat en français, en plus de celui de TVA le 2 octobre.