Après une journée dictée par l’incertitude quant aux moyens de pression à adopter pour la suite des négociations, la Fédération autonome de l’enseignement (FAE) a annoncé, vendredi soir, qu’elle poursuivra la grève générale illimitée (GGI) qu’elle mène depuis plus d’une semaine.

« On est en mesure maintenant de confirmer que nous avions à analyser une proposition soumise par le gouvernement, a affirmé la présidente de la FAE, Mélanie Hubert. C’est une proposition intéressante, qui proposait des avancées et qui méritait qu’on s’y attarde, mais le conseil [fédératif de négociation] n’a pas jugé cela satisfaisant pour la levée de la grève, qui va se poursuivre lundi. »

Pendant presque deux jours, les syndicats membres de la FAE ont discuté de la marche à suivre pour la suite des négociations avec Québec.

« Le temps passé depuis deux jours a été consacré à travailler le texte d’une contre-offre qui sera présenté aussi rapidement que possible », a fait savoir Mme Hubert. La présidente syndicale a reconnu que le gouvernement avait fait un pas dans la direction des enseignants avec sa plus récente proposition, déposée mardi soir dernier. « On va faire un pas vers eux en retour, a-t-elle ajouté. Notre contre-offre, ce ne sera pas un sens unique, elle vise un règlement. »

La FAE souhaite un règlement rapide

Parmi les éléments qui expliquent que les négociations achoppent : le désir de la FAE de permettre à ses membres de faire du télétravail lors des heures de travail personnel. « C’est un des éléments qui manquent, a reconnu Mme Hubert. Et c’est quelque chose qui ne coûte rien. »

De plus, la FAE souhaite que soit revue la composition de la classe ordinaire, qui, avance-t-elle, « a franchi un seuil de difficulté tel qu’elle constitue une contrainte à l’enseignement ».

Mme Hubert espère que les négociations se poursuivront au cours du week-end et souhaite un règlement rapide.

PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

La présidente de la FAE, Mélanie Hubert, en conférence de presse, vendredi

L’objectif n’a jamais été de rester en grève longtemps. La grève visait à faire débloquer 11 mois de négociations qui n’avançaient pas et 70 rencontres qui n’ont rien donné.

Mélanie Hubert, présidente de la FAE

Elle a par ailleurs estimé que les membres de la FAE auraient maintenant les « yeux rivés » sur Sonia LeBel, présidente du Conseil du trésor.

Cette dernière a réagi vendredi soir à l’annonce de la Fédération : « Nous sommes conscients des impacts de la grève pour les élèves et évidemment déçus, mais nous nous sommes engagés à signer des ententes au bénéfice des élèves et du personnel, alors nous allons poursuivre nos efforts pour y arriver le plus rapidement possible », a-t-elle écrit. Le cabinet de la ministre a ajouté que les négociations se poursuivraient sans arrêt pour parvenir à une entente.

La FAE avait comme autres options de suspendre la grève ou encore de demander l’intervention d’un conciliateur. La décision de maintenir la GGI touche des centaines de milliers de jeunes répartis dans 800 établissements scolaires de la province.

Legault accusé de faire du « chantage émotif »

Vendredi, le premier ministre François Legault a demandé à la FAE de cesser la grève parce qu’« on ne peut pas faire mal à nos enfants » et s’est à nouveau dit prêt à bonifier l’offre salariale.

Lisez « Négos du secteur public : Legault implore les enseignants de cesser la grève »

Il s’agit de « chantage émotif » de la part du premier ministre, a écrit la FAE sur les réseaux sociaux. « Ce qui fait mal à l’école publique, c’est la détérioration du système qui s’est exacerbée depuis que vous êtes au pouvoir », ajoute-t-on aussi.

La présidente de l’Alliance des professeures et professeurs de Montréal, qui compte environ 9500 membres, a transmis une déclaration écrite à La Presse, qualifiant les déclarations du premier ministre de « mépris à l’endroit des enseignantes qui se tiennent debout pour des conditions d’enseignement de qualité pour les élèves du Québec ».

« Nous retournerons en classe auprès de nos élèves lorsque le gouvernement s’engagera à appliquer un remède aux maux de l’école publique », a déclaré Catherine Beauvais-St-Pierre.

Sur les lignes de piquetage, cette semaine, les profs rencontrés par La Presse semblaient déterminés à tenir le fort longtemps. Même ceux qui se disaient « moins syndicalistes » affirmaient qu’ils étaient sortis dans la rue pour donner de meilleures conditions d’apprentissage à leurs élèves.

Les syndicats affiliés à la FAE se sont dotés de mandats de grève générale illimitée avec des votes en faveur allant de 84 % à 98 %, ce dernier pourcentage ayant été obtenu par l’Alliance des professeures et professeurs de Montréal.

Ces enseignants sont répartis dans 12 centres de services scolaires de la province. Ils sont à Montréal, Laval, Québec, mais aussi en Estrie, dans les Laurentides, en Outaouais et en Montérégie.

Avec la collaboration d’Hugo Pilon-Larose, La Presse

Les aides à la classe ne suffiront pas

Les aides à la classe, soit des membres du personnel de soutien travaillant dans les écoles, ont pour objectif annoncé d’alléger la charge de travail qui pèse sur les enseignants. Or, de l’avis de la présidente de la FAE, cette seule solution ne suffira pas à pallier le problème qui guette l’école publique. « Ça fait partie de la solution, et les aides à la classe pourraient venir en soutien, mais ce ne sera sans doute pas suffisant », a avancé Mélanie Hubert. Il s’agit, entre autres, de membres du personnel des services de garde et de techniciens en éducation spécialisée. Ces ressources sont attribuées à un enseignant ou à un groupe d’enseignants.