À la veille des inscriptions dans les écoles, la Commission scolaire English-Montréal (CSEM) courtise les familles qui ont le droit d’envoyer leurs enfants à l’école en anglais. Son message : on enseigne en français, nous aussi.

Tout le mois de janvier, la CSEM mène une campagne de promotion pour « célébrer le bilinguisme et l’excellence du français » qui est enseigné dans ses écoles primaires et secondaires.

Des publicités sont notamment diffusées sur des chaînes de radio francophones. « Être bilingue, c’est gagnant ! », y entend-on.

La période à laquelle on mène cette campagne n’a pas été choisie au hasard. En janvier, c’est le temps des inscriptions dans les écoles, et la commission scolaire souhaite attirer des parents qui hésitent entre l’école francophone ou anglophone.

Le plus récent recensement a montré qu’au Québec, plus de 230 000 enfants avaient droit à l’instruction en anglais. Or, « une bonne proportion [de ces élèves] est soit dans une école privée, soit dans une école francophone », indique le président de cette commission scolaire, Joe Ortona.

Ce sont ces jeunes qu’on souhaite recruter.

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Le président de la Commission scolaire English-Montréal, Joe Ortona

Les parents se demandent où inscrire leurs enfants pour la maternelle. On veut démontrer qu’à English-Montréal, c’est un enseignement en français de qualité.

Joe Ortona, président de la Commission scolaire English-Montréal

C’est aussi une occasion pour certains enfants francophones d’apprendre l’anglais. Jeudi matin, dans une classe de 5année de l’école Pierre-Elliott-Trudeau, environ la moitié des élèves ont levé la main quand on leur a demandé lesquels parlaient français à la maison.

Sandy Lima enseigne la 5année en français. Elle observe que sa classe est « un mélange d’enfants qui parlent français ou anglais à la maison. Des fois, c’est les deux ». Elle partage sa tâche avec une collègue qui enseigne en anglais : les enfants font la moitié des cours dans une langue, la moitié dans l’autre.

La directrice de l’école, Tanya Alvares, explique que beaucoup de parents choisissent son école du quartier Villeray « parce que c’est bilingue ».

Sheyma, 10 ans, en est un bon exemple. Elle explique qu’elle est arrivée de France il y a un an. « C’est pour ça que je parle français. »

« En 4année, je ne comprenais rien aux cours [en anglais], mais je trouve ça plus facile maintenant », poursuit la jeune fille.

À son côté se tient Vincent. « Ma mère est née en anglais, mais là, elle sait comment parler français », dit le garçon.

« Renverser la perception »

La commission scolaire ne s’est pas fixé d’objectif de recrutement pour l’an prochain, mais la majorité de ses écoles sont loin de faire le plein d’élèves. À l’école Pierre-Elliott-Trudeau, par exemple, il y a cette année 337 élèves pour 486 places.

La campagne de promotion organisée ce mois-ci a donc pour mandat de « renverser la perception que dans les écoles anglaises, on n’enseigne que l’anglais », explique Joe Ortona, qui se cite lui-même comme exemple.

« Je ne parlais pas un mot de français quand j’ai commencé la maternelle. J’étais en programme d’immersion française et ça m’a permis de continuer mes études : je suis allé à l’université en français, je travaille en français », explique l’avocat.

Pour les enfants dont l’un des parents est anglophone, c’est une occasion en or, fait valoir le porte-parole de la CSEM. Il s’agit de dire : « Eille, vous avez une opportunité que votre enfant soit bilingue ! », illustre Michael Cohen.

« Ce n’est pas la même chose avec les centres de services scolaires, c’est seulement en français. C’est ça, l’avantage », poursuit-il.

Jeudi matin, le chef parlementaire de Québec solidaire et député de Gouin, Gabriel Nadeau-Dubois, était de passage à l’école Pierre-Elliott-Trudeau pour parler aux jeunes de 5année. La discussion s’est déroulée entièrement en français.

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Le chef parlementaire de Québec solidaire et député de Gouin, Gabriel Nadeau-Dubois, à l’école Pierre-Elliott-Trudeau jeudi matin

Au Québec, la Charte de la langue française prévoit que les enfants doivent fréquenter l’école francophone jusqu’au terme de leurs études secondaires.

Un enfant peut fréquenter l’école en anglais si son père ou sa mère a reçu le plus gros de son enseignement primaire en anglais au Canada. Les nouveaux arrivants ayant un permis de séjour temporaire sont aussi autorisés à envoyer leurs enfants dans les écoles anglophones.