L'avocat du conducteur de train accusé dans la tragédie ferroviaire de Lac-Mégantic affirme que les procureurs de la Couronne tentent d'éviter une enquête préliminaire.

L'avocat Thomas Walsh a soutenu que la Couronne l'avait informé, mercredi, dans une lettre, qu'elle réclamerait un acte d'accusation privilégié pour son client, une procédure qui permet d'aller en procès sans devoir subir d'enquête préliminaire.

Le conducteur Tom Harding et deux autres employés font face chacun à 47 chefs d'accusation de négligence criminelle ayant causé la mort - une pour chaque victime du déraillement de juillet 2013 dans la petite municipalité de l'Estrie. Les trois accusés s'exposent, s'ils devaient être reconnus coupables, à des peines d'emprisonnement à vie.

Me Walsh a fait valoir que l'absence d'une enquête préliminaire pour Tom Harding empêcherait les avocats des deux parties d'entendre certains témoins et de déterminer quelles portions de leur témoignage sont fiables.

L'avocat a affirmé que l'enquête préliminaire permettait à un accusé de découvrir «ce que la Couronne a sur lui et d'agir en conséquence». Il a ajouté croire que les enquêtes préliminaires permettaient de gagner du temps, et que la décision de la Couronne portait atteinte à l'administration de la justice.

Un porte-parole du bureau du procureur a affirmé mercredi ne pas pouvoir commenter sur un élément n'ayant pas encore été soumis au tribunal. Parlant des actes d'accusation privilégiés en général, Jean-Pascal Boucher a souligné qu'il pouvait être requis, par exemple, dans l'intérêt public pour réduire des délais inutiles.

«Une enquête préliminaire n'est pas une nuisance», a fait valoir Me Walsh, ajoutant croire que les procureurs agissaient ainsi probablement pour ne pas exposer trop rapidement les faiblesses dans leur cause.

Me Walsh a fait valoir que l'acte d'accusation privilégié dans la cause de Tom Harding serait difficile à contester car il ignore le processus de décision de la Couronne à l'égard de cette requête.

Tom Harding devait comparaître jeudi au palais de justice temporaire aménagé dans un édifice public de Lac-Mégantic pour qu'une date soit fixée pour l'enquête préliminaire, mais Me Walsh a affirmé que l'audience avait été annulée à la suite de la requête de la Couronne. Une nouvelle date de comparution devant la Cour supérieure du Québec sera donnée à son client, a-t-il ajouté.

Tom Harding a demandé un procès devant jury.

Me Walsh a dit ignorer si la Couronne demandait aussi des actes d'accusation privilégiés pour les coaccusés: le contrôleur ferroviaire Richard Labrie et le directeur des activités de la Montreal, Maine & Atlantic Railway (MMA) au Québec, Jean Demaître.

En septembre dernier, le Directeur des poursuites criminelles et pénales avait confirmé qu'il n'y aurait pas d'accusations de portées contre Ed Burkhardt, qui était président de la MMA à l'époque de la tragédie, au grand dam de la population de la ville estrienne qui estimait que celui-ci devait répondre des lacunes en matière de sécurité sur son réseau.