Se dressant, imposante et forte, à quelques dizaines de mètres du périmètre de la plus importante catastrophe ferroviaire qu'ait connue le Québec, l'église Sainte-Agnès est devenue, un peu comme dans les villages d'autrefois, le coeur de Lac-Mégantic.

Il faut dire que les lieux de rencontres que sont aujourd'hui les cafés et les bars se font rares dans la petite ville. Tous ont été rasés. Sauf la brasserie Laval, sur la rue du même nom, où l'on ne parle que de ça devant une bière, grosse de préférence.

Tout se passe donc à l'église. Du matin (une messe y a été célébrée, jeudi) jusqu'à tard le soir. On y défile sans cesse.

Les locaux s'y recueillent. Y pleurent des amis, fils, filles, pères et mères. Ils déposent sur l'autel des photos, des mots ou des souvenirs de leurs proches disparus.

Comme la chaussure de course de Mélissa Roy, ou cette touchante lettre signée par la «belle blonde brune qui t'aimera toujours» d'Éric Pépin, un des disparus.

«Je sais qu'avec tes ailes d'ange, tu sauras m'enlacer et effacer ma peine. Je sais que tu seras toujours là jusqu'au jour où l'on se retrouvera, et ce jour-là, je pourrai te dire je t'aime en te serrant très fort dans mes bras», écrit-elle.

«Quand on s'ennuie, on vient la voir», explique la fille de 13 ans de Karine Lafontaine, qui a longuement sangloté dans les bras d'une proche en regardant des photos de famille où l'on voit la défunte avec son conjoint, son aînée et leurs deux autres enfants.

Son père, Pascal Lafontaine, a donc perdu sa femme, mais aussi son jeune frère Gaétan et la conjointe de celui-ci, Joanie Turmel. Tous ont été formellement identifiés par le coroner parmi les 42 corps retrouvés jusqu'à maintenant.

«On est chanceux que notre église ait été rouverte si vite. C'est notre place», dit l'homme.

La nuit du feu, il a accouru sur les lieux avec la machinerie de l'entreprise familiale d'excavation pour aider les pompiers.

«J'ai passé la nuit là, dans l'espoir de les retrouver, mais en sachant bien que ma femme, mon frère et ma belle-soeur étaient dans le brasier. C'est moi qui les avais conduits là, au Musi-Café", dit-il.